tag:jffortier.ca,2005:/blogs/discipline?p=24Discipline : les carnets d'un mystique du dimanche2023-11-12T18:20:00-05:00Jean François Fortierfalsetag:jffortier.ca,2005:Post/65862772023-11-12T18:20:00-05:002023-12-20T20:38:31-05:00#30 : Forever Jung (26-03-21)<p style="text-align:justify;"> Quand j’ai fait part de mon enthousiasme à un ami parce que j’avais commencé à percer le mystère de la pensée de Jung grâce à un cours à l'université (Religion et psychologie), il m’a répondu que j’étais atteint de la Jungle Fever ! Il avait pas tort. Mais j’ai plutôt choisi de titrer ce carnet Forever Jung (Forever young) en lien avec Rod Stewart et son magnifique album <i>Every picture tells a story</i> qui a meublé de belle façon mon dernier hiver. Un mélange de folk et de rock très cru, très beau et très sincère. Et puis j’ai réalisé qu’une 2e raison, encore plus pertinente, justifiait le choix de l’Écossais. Il se trouve au cœur de l’album une version magnifique d’<i>Amazing Grace</i>. Et Jung s’est justement beaucoup intéressé à l’expérience mystique qui est décrite dans <i>Amazing Grace</i> et il a tenté tout au long de sa carrière d'expliquer rationnellement ce phénomène dont on dit qu’il est ineffable, au-delà des mots et de la raison telle qu’on l’entend normalement. Même si on sait à quelle enseigne il loge personnellement – il a déjà affirmé que <i>quand on sait, on sait, on n'a pas besoin de croire</i> –, Jung essaya toujours de proposer une analyse du phénomène qui peut autant satisfaire un croyant qu’un athée (à moins d'être freudien mais ça, c'est une autre histoire). La psychologie, via le symbolisme, serait une voie par laquelle un contenu incréé nous serait communiqué, et ce, inconsciemment et collectivement. Peu importe par qui ou par quoi, Jung s'intéresse avant tout à la manière et au contenu. Pour lui, il est évident que l’expérience subjective est primordiale ; non seulement c’est tout ce que nous avons, la subjectivité est en soi un phénomène objectif auquel il faut s’attarder un peu plus longuement si l’on désire comprendre qui nous sommes vraiment. </p><p style="text-align:center;"> </p><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="PJqC0snhCbs" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/PJqC0snhCbs?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div><p> </p><p style="text-align:justify;"> Pour Jung, le témoignage d'un individu qui estime avoir vécu une expérience mystique dont la teneur et l'intensité lui ferait dire qu'elle est la chose la plus significative qui lui soit arrivée, ce témoignage ne peut pas être écarté et étiqueté comme étant une simple fabulation. Jung ne voit pas sur quelle base il s'appuirait pour ne pas tenir compte du récit bouleversant, une expérience qui va jusqu'à changer radicalement la vision que cette personne a du monde et d'elle-même... Et lorsqu'on prête attention à ce que raconte le personnage dans <i>Amazing Grace</i>, c'est tout sauf banal. Il nous parle d’une révélation, d’une transformation ; avant il était aveugle, maintenant il voit, il est sauvé. Non seulement Jung semble bien comprendre, tel que rapporté plus haut, ce dont il est question, il a trouvé comment cartographier le parcours psychologique de celui qui traverse une expérience mystique pourtant réputée comme étant indescriptible. Fallait le faire. Jung n’a pas réduit pour autant ce phénomène à un événement prédéterminé, qui s’expliquerait grâce à la science et à la physiologie. On reste devant une transcendance, mais une transcendance qu’il est impossible d’ignorer tant elle désire se manifester et entrer en contact avec nous. C’est que nous aurions un inconscient collectif qui nous chuchote constamment des choses à l’oreille, à travers ce que Jung appelle les archétypes. </p><p style="text-align:center;">*** </p><p style="text-align:justify;"> Les archétypes seraient des patterns, des traits psychologiques, on dira une forme, mais une forme qui aurait toujours existé. Un peu comme le serait un réflexe ; personne n’apprend à respirer, le système s’en charge tout seul. L’archétype serait à la psyché ce que le réflexe est au corps. Et tout comme l’évolution a façonné notre biologie, l’évolution tend également vers des formes psychologiques pré-établies et données collectivement à l’humanité. Mais nous aurions seulement accès à la forme, jamais à l’archétype en soi. Dieu, toujours selon Jung, serait justement l’archétype qui est responsable de l’instinct religieux qui nous habite. Représentation à la fois subjective et objective, la forme que Jung nomme l'image-Dieu est en fait un symbole, symbole qui est manifesté par une source archétypale à laquelle l’esprit n’a pas directement accès. Dieu est donc un a priori qui appartient à l'inconscient collectif et qui participe à la formation de notre psyché – ne serait-ce qu'en raison de la finitude à laquelle son concept nous renvoie –, même si on ne peut l’appréhender que d’une manière symbolique, ce qui lui laisse beaucoup de latitude pour épouser les formes culturelles (Zeus, Allah, Brahman, Dieu, etc.) et individuelles qu'il évoque et manifeste de manière objective ET subjective, on le répète...</p><p style="text-align:center;"> </p><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="2AMu-G51yTY" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/2AMu-G51yTY?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div><p> </p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:justify;"><br> Je connaissais bien sûr le nom de Jung, que j’associais surtout au phénomène de la synchronicité – hâte de lire comment il explique que la réalité puisse devenir à ce point intriqué à la psyché de l’individu, <a class="no-pjax" href="https://jffortier.ca/les-carnets-d-un-mystique-du-dimanche/blog/24-synchronicites-ou-quand-le-hasard-exagere-beaucoup-trop" target="_blank" data-link-type="url" contents="j’en sais quelque chose">j’en sais quelque chose</a> (carnet #24) ! – mais dont le concept des archétypes me dépassait ; chaque fois que j’avais voulu lire Jung, je n’y comprenais absolument rien. Ce fut la découverte la plus spectaculaire que j’ai fait cette année à l’université mais c’est loin d’être la seule. Mon cours d’Introduction à l’islam est passionnant, tout comme le professeur qui le donne, et j’apprends une foule chose que j’ignorais de notre passé à travers mon cours d’Histoire religieuse du Québec grâce à un professeur tout aussi intéressant. Contrairement à ce qu’on aime penser, notre histoire religieuse ne fut pas qu'une grande noirceur ; une frange très libérale du clergé canadien-français a formé toute une jeunesse dans les années 30, elle ne s’est pas faite toute seule la Révolution Tranquille ! La bande-annonce de Vinland que j'ai vue passer m'a tout l'air de traiter justement de ce sujet.</p><p style="text-align:justify;"> Mais pour revenir à Jung, ce n’est que maintenant que je suis pleinement en mesure de constater que l’esprit de Jung souffle partout au-dessus de ces carnets. Le #3, <a class="no-pjax" href="https://jffortier.ca/les-carnets-d-un-mystique-du-dimanche/blog/philip-k-dick-le-reve-de-l-ile" target="_blank" data-link-type="url" contents="celui où je décris le rêve de l’Île-Falaise">celui où je décris le rêve de l’Île-Falaise</a>, songe que j’ai fait alors que j’étais très jeune enfant, aurait pu être un cas d'école si j'avais étais un patient de Jung tant les symboles qu'il contient sont éloquents ! J'ai aussi cité un extrait de son livre <i>L'homme et ses symboles</i> en introduction de ce carnet, <a class="no-pjax" href="https://jffortier.ca/les-carnets-d-un-mystique-du-dimanche/blog/26-l-esprit-du-temps-et-la-mecanique-des-idees" target="_blank" data-link-type="url" contents="le #26 L'esprit du temps et la mécanique des idées">le #26 L'esprit du temps et la mécanique des idées</a> car j’aimais ce que la citation exprimait sans toutefois pleinement saisir le contexte duquel elle avait été extraite. </p><p style="text-align:justify;"> Pour Jung, peu importe sa source, la décharge énergétique et l’intensité du témoignage et l’importance qu’il revêt aux yeux de la personne qui revient d’une expérience mystique ne peut réfuter la vérité de ce qui est rapporté. Et ce qui est rapporté raconte souvent la même chose, <a class="no-pjax" href="https://jffortier.ca/les-carnets-d-un-mystique-du-dimanche/blog/l-eternite-ne-dure-jamais-longtemps" target="_blank" data-link-type="url" contents="on revient ébahi du fait qu’il n’y a plus de contradictions (carnet #17)">on revient ébahi du fait qu’il n’y a plus de contradictions (carnet #17)</a>, la coincïdence des opposés à laquelle Jung fait souvent référence. Tout devient UN, il n’y a plus de distance, de temps, il n’y a plus d’opposés. La logique de la contradiction n’a plus cours (ce dont traite <a class="no-pjax" href="https://jffortier.ca/les-carnets-d-un-mystique-du-dimanche/blog/carnet-29-confession-d-un-goy-je-t-aime-toi-non-plus" target="_blank" data-link-type="url" contents="le carnet #29 sur Stéphane Lupasco et la kabbale">le carnet #29 sur Stéphane Lupasco et la kabbale</a>) et c’est bien parce qu’elle n’est plus là qu’on est à même de réaliser qu’elle a toujours été là..! <br>« I was blind but now-ow-a-ow I see » chante Rod dans <i>Amazing Grace</i>... Bref, je suis jungien full pin... Bon, j’avais dit que j’arrêtais au 30e carnet, de toute façon j’ai des travaux de sessions à remettre. Faque ciao bye, et merci à ceux qui me lisent !</p><p style="text-align:justify;"> </p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/53016192023-03-21T01:30:54-04:002023-11-12T18:17:03-05:00#14 Nécessaires contradictions : Stéphane Lupasco et la logique de l'énergie (06-2018)<p style="text-align:center;"> </p><p style="text-align:center;">Pas évident d'afficher de la sympathie pour la communauté hassidique. Faites le test pour voir autour de vous. On devrait vous répondre assez vite qu'ils ont beau vivre <a class="no-pjax" href="http://lys-dor.com/2012/03/16/le-retour-des-bigots-religieux-prise-2-les-juifs-hassidiques-doutremont/" target="_blank" data-link-type="url" contents="chez « nous »">chez « nous »</a> , ça ne les empêche pas de se sentir au dessus des lois et de nous mépriser ouvertement. Ou encore qu'il est épouvantable qu'au 21e siècle, il soit possible d'endoctriner des enfants avec des idées et des coutumes aussi rétrogrades, que cette secte est à l'origine de bien des drames qui auraient pu être évités n'eut été la complaisance des autorités à leur égard, et ainsi de suite... Je ne dis pas qu'ils auraient nécessairement tort de le penser mais pour ma part, j'aime l'idée qu'une communauté organise son existence autour du sens même de l'existence. Car c'est fondamentalement de cela qu'il s'agit. Bien sûr, étant un mystique du dimanche qui habite Rosemont, il est facile pour moi d'affirmer cela. On s'entend, comme n'importe quelle entreprise humaine, cette entreprise - dont les origines remontent au 18e siècle - est forcément imparfaite même si son but, je trouve, reste noble. Et c'est pourquoi je ne me formalise pas de leur indifférence à notre égard. Le sens de la vie est une quête plutôt prenante quand on s'y attaque avec toute l'intensité et le sérieux que le font les Hassidiques. Faut dire aussi que d'avoir lu sur <a class="no-pjax" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pens%C3%A9e_hassidique" target="_blank" data-link-type="url" contents="l'histoire de ce mouvement">l'histoire de ce mouvement</a> - assez récent du judaïsme - m'a rendu encore plus sympathique à leur cause.</p><p style="text-align:center;"> </p><div class="video-container" style="--video-width:320px;text-align:center;"><div class="video-container" style="--video-width:320px;"><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="obC5MAJkm-w" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/obC5MAJkm-w?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div></div></div><p> </p><p style="text-align:center;">Pour quiconque s'intéresse aux différents concepts métaphysiques qui tentent de donner une signification à l'aventure humaine, j'ai trouvé très convaincante la façon dont le hassidisme justifie l'existence de Dieu, existence dont la potentialité ne peut être pleinement réalisée qu'à travers l'humanité, Dieu étant, toujours selon le hassidisme, autant créé par l'homme que l'homme par Dieu ( if my memory serves me well... ). En d'autres mots, les archétypes moraux présents en Dieu demeurent latents, inactifs, aussi longtemps qu'ils ne seront pas incarnés par l'action vertueuse des hommes et des femmes. D'où la grande piété des Hassidiques et leurs nombreux rituels qui visent à maximiser la présence du divin sur la Terre. C'est donc un win-win, car si Dieu dépend de l'humanité pour totalement s'actualiser, il la divinise en retour lorsque celle-ci agit en accord avec sa loi. Notez que malgré l'aspect rigide de ce mode de vie, aucune ascèse n'est nécessaire, au contraire. La joie, la danse et la jouissance des sens y sont encouragées afin de vivifier l'esprit et mieux servir Dieu. Bref, on est en présence, qu'on soit d'accord ou non avec son postulat, d'une mystique somme toute rationnelle. Mais ma plus grande surprise allait surgir lorsque j'ai constaté que la non-dualité, et ce que certains philosophes et mystiques appellent la coïncidence des opposés, se trouvaient également au cœur de la pensée hassidique... </p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:center;">Dans son ouvrage intitulé <i>Qu'est-ce que la réalité? Réflexions autour de l'oeuvre de Stéphane Lupasco</i>, <a class="no-pjax" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Basarab_Nicolescu" target="_blank" data-link-type="url" contents="Barasab Nicolescu">Basarab Nicolescu</a> - ancien chercheur au Centre National de la Recherche Scientifique de Paris, spécialisé en physique quantique - affirme qu'il existe plusieurs niveaux de réalité. Rien pour appeler sa mère me direz-vous. Mais d'en prendre conscience permettrait de résoudre bien des problèmes - notamment <a class="no-pjax" href="http://basarab-nicolescu.fr/BOOKS/TDRocher.pdf" target="_blank" data-link-type="url" contents="grâce à la transdisciplinarité">grâce à la transdisciplinarité</a> - et de comprendre en quoi la coïncidence des opposés - un concept présent dans toutes les traditions mystiques - réside au cœur de notre, ou plutôt de nos réalités, qu'elle soit physique, biologique, psychologique, artistique, religieuse, politique ou sociologique, name it... Mais qu'entend-on exactement par la coïncidence des opposés?</p><p style="text-align:center;"> </p><p style="text-align:center;">Oubliez le sens premier du mot coïncidence – qui réfère au hasard - et pensez plutôt à un point où une apparente contradiction s'en retrouverait résolue, unifiée. Selon la logique dite classique, A ne peut être simultanément A et non-A; en d'autres mots, une chose ET son contraire. Le bas ne saurait être à la fois le bas et le haut, pas plus que le jour, simultanément le jour et la nuit. On appelle ce principe, principe de non-contradiction. Sa première formulation fut énoncée par <a class="no-pjax" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_d%27identit%C3%A9" target="_blank" data-link-type="url" contents="les Grecs de l'Antiquité">les Grecs de l'Antiquité</a>. Mais un Roumain - <a class="no-pjax" href="https://www.cairn.info/revue-societes-2013-1-page-71.htm" target="_blank" data-link-type="url" contents="Stéphane Lupasco">Stéphane Lupasco</a>, débarqué à Paris au début du 20e siècle - a commencé à questionner l'absoluité de cet axiome à la lueur des résultats déroutants que les pionniers de la physique quantique obtenaient. On ne savait pas pourquoi cela se produisait mais on était témoin de phénomènes bizarres qui défiaient clairement le principe de non-contradiction. Dans l'infiniment petit, A peut être A et non-A simultanément. Certains affirment que la contradiction n'est qu'apparente et que dans les faits, le principe d'identité et de non-contradiction restent inviolés; ce à quoi Barasab Nicolescu <a class="no-pjax" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_Copenhague_(physique)" target="_blank" data-link-type="url" contents="et bien d'autres qui furent aux premières loges de ces découvertes">et bien d'autres qui furent aux premières loges de ces découvertes</a> rétorquent que devant le scandale causé par un tel spectacle, on préfère recourir à des contorsions linguistiques plutôt que d'accepter que les choses ne se passent pas comme elles le devraient... Bref, cela ne se fit pas en un seul livre et prit plusieurs décennies, mais Lupasco tenta d'apporter une explication à ces phénomènes étranges, explications dont les implications déborderont largement le domaine de la physique quantique comme nous le verrons plus bas.</p><p style="text-align:center;">Pour Lupasco, n'importe quel phénomène énergétique est par définition le résultat de forces antagonistes. Et la manière dont le phénomène se manifeste; son actualisation, est également tributaire de sa potentialisation, qui demeure, à divers degré, toujours présente dans le phénomène. Il y a donc sous-jacent à n'importe quel processus énergétique un pont entre son actualisation et sa potentialisation, ainsi qu'entre la tendance qu'aura le phénomène (l'énergie) à devenir homogène; comme la matière inerte, ou hétérogène; comme le vivant, ou à mi-chemin entre les deux; comme <a class="no-pjax" href="http://www.revue3emillenaire.com/blog/la-logique-de-lenergie-entretien-avec-stephane-lupasco/" target="_blank" data-link-type="url" contents=" les phénomènes quantiques, et les phénomènes psychiques">les phénomènes quantiques et psychiques</a> qui seraient de même nature lorsqu'on les regarde sous un angle purement logique! Ce pont, ou plutôt cet état - qu'il nomme état T - Lupasco le décrit comme étant <a class="no-pjax" href="http://dictionnaire.sensagent.leparisien.fr/Tiers%20inclus/fr-fr/#anchorWiki" target="_blank" data-link-type="url" contents="le tiers inclus">le tiers inclus</a>. Tiers parce qu'il devient la passerelle par laquelle les 2 pôles contenus dans toute contradiction sont reliés. Selon Nicolescu, les implications de cette logique n'ont pas encore été bien comprises, ni mêmes reconnues*, probablement parce qu'elles bousculent trop violemment notre conception, consciente et inconsciente, de la réalité. Et puisque l'énergie, donc la matière, est une manifestation de forces contradictoires – et pour Lupasco, la psyché est une matière, soumise elle aussi aux dynamismes d'actualisation et de potentialisation, donc un phénomène énergétique comme il tend à le démontrer à travers son livre <i>Les 3 matières, </i>et brièvement dans <a class="no-pjax" href="http://www.revue3emillenaire.com/blog/la-logique-de-lenergie-entretien-avec-stephane-lupasco/" target="_blank" data-link-type="url" contents="cette entrevue">cette entrevue</a> –, on comprendra pourquoi Nicolescu déplore encore qu'à ce jour le travail de Lupasco soit à ce point ignoré. Il y aurait beaucoup plus à dire là-dessus, et je devrai moi-même lire et relire sur le sujet afin de mieux le maitriser, mais le livre de Basarab Nicolescu est justement là pour ça. Moi qui se sens vite perdu quand vient le temps d'aborder des ouvrages de philosophie et/ou de physique, les réflexions de Nicolescu sur l'oeuvre de Lupasco sont étonnamment compréhensibles, du moins apprivoisables... L'admiration évidente qu'il a pour son ami et compatriote d'origine roumaine - maintenant décédé - y joue sûrement pour quelque chose, tout comme la contribution que Nicolescu a lui-même apporté à la nouvelle logique de Lupasco lorsqu'il y a ajouté le principe des différents niveaux de réalité, avec la bénédiction de Lupasco lui-même. Ainsi disparaît un irritant important du système de Lupasco qui pouvait laisser penser que sa logique abolissait le principe d'identité, ce qui aurait été absurde bien entendu. Mais tout comme la Loi de la relativité d'Einstein n'invalide pas la théorie de Newton, Lupasco - avec son principe du tiers inclus – n'abolit pas non plus la logique classique pour autant. Celle-ci reste toujours aussi pertinente mais elle n'est pas pour autant absolue, comme le démontre entre autres la physique quantique. Avec l'ajout du postulat des niveaux de réalité, Nicolescu a donc raffiné la thèse de Lupasco en faisant ressortir que le tiers inclus n'est jamais manifeste dans la contradiction elle-même et ne peut pas se manifester sur le même plan de réalité que la contradiction qui le fait naître. Comme lui-même l'explique dans <a class="no-pjax" href="https://www.ouvertures.net/basarab-nicolescu-il-y-a-toujours-un-tiers-inclus-entre-les-choses-opposees-qui-permet-de-les-considerer-simultanement/" target="_blank" data-link-type="url" contents="cette entrevue">cet entretien</a> : </p><p style="text-align:center;">« Un exemple célèbre est la dualité onde-corpuscule qui est un des fondements de la physique quantique : cette dualité se vérifie au niveau quantique et pas au niveau macrophysique. » </p><p style="text-align:center;">Et de continuer plus loin : </p><p style="text-align:center;">« Ce que les scientifiques ont du mal à accepter, c’est le prolongement de ce constat étrange aux niveaux de la psychologie, de l’histoire, de la politique ou de la société. » </p><p style="text-align:center;">En effet, la logique des contradictoires que Lupasco a construite et que Nicolescu a peaufinée aurait une portée beaucoup plus grande que la physique qui lui a servi de point de départ. Toujours selon Nicolescu : </p><p style="text-align:center;">« Son idée centrale (celle de Lupasco) est que la contradiction est la texture de l’univers. Tout ce qui est dans le monde, et pas seulement ce qui est dans notre pensée ou nos propositions, résulte d’une tension entre des contradictoires. » </p><p style="text-align:center;"> </p><div class="video-container" style="--video-width:320px;text-align:center;"><div class="video-container" style="--video-width:320px;"><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="LiU-VtbyMFo" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/LiU-VtbyMFo?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div></div></div><p> </p><p style="text-align:center;">Tout ça, comme je l'explique en entrée de jeu, à cause d'une discussion qui tournait autour de la communauté hassidique d'Outremont il y a 2 semaines... Selon Louria - un rabbin du 16e siècle dont la pensée et la renommée influença fortement la mystique juive - pour que Dieu puisse créer le monde, il fallut qu'il crée d'abord un vide, un espace où il n'était pas. On appelle<a class="no-pjax" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tsimtsoum" target="_blank" data-link-type="url" contents=" tsimtsoum"> tsimtsoum</a> dans la kabbale cet acte où Dieu se retire en un seul point, créant ainsi tout autour les ténèbres et un infini dans lequel Sa lumière, et le Jugement - la raison - peut se propager, et la matière exister. Avant que la matière et le temps n'apparaissent, Dieu étant tout ce qu'il y avait, rien ne pouvait exister en dehors de lui. C'est en repensant à cette explication, ainsi qu'à la potentialisation et l'actualisation des archétypes moraux dérivant de Dieu - tel qu'évoqué en introduction - qu'un lien s'est fait dans mon esprit entre la logique de l'énergie de Lupasco et la façon dont la kabbale nous parle de l'origine du monde. Je ne sais pas si Lupasco lui-même serait d'accord mais l'exercice en aura valu la peine, ne serait-ce que pour la redécouverte du livre de Barasab Nicolescu <a class="no-pjax" href="https://www.amazon.com.br/Quest-ce-que-r%C3%A9alit%C3%A9-R%C3%A9flexions-loeuvre/dp/2895781915" target="_blank" data-link-type="url" contents="Qu'est-ce que la réalité? Réflexion autour de l'oeuvre de Stéphane Lupasco"><i>Qu'est-ce que la réalité? Réflexion autour de l'oeuvre de Stéphane Lupasco</i></a>. </p><p style="text-align:center;">On entend parfois dire qu'au fond, les religions livrent toutes le même message. C'est un cliché qui, comme bien des clichés, contient sa part de fausseté... et de vérité. Mais cette part de vérité a ceci de paradoxal qu'on la trouve surtout parmi les courants mystiques, courants avec lesquels les autorités religieuses des différentes traditions entretiennent souvent une relation ambigüe, quand elle n'est pas carrément hostile.** Et que ce soit à travers le soufisme - une branche mystique de l'islam - , les mystiques chrétiens tels que Maitre Eckhart, Sainte Thérèse d'Avila ou Saint Jean de la Croix, Milarepa; moine bouddhiste ayant vécu au 12e siècle, sans oublier <a class="no-pjax" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A2makrishna" target="_blank" data-link-type="url" contents=" des saints de l'Inde">les saints de l'Inde</a>, tous nous entretiennent sur l'illusion du dualisme qui comme un voile obscurcit notre vision du réel. Stéphane Lupasco - qui ne semble pourtant pas avoir eu de révélations mystiques - a su, avec les seuls outils de la raison et de la logique, lever ce voile pour nous aider à voir un peu plus clair sur la nature du monde qui nous entoure et sur nous-même. Je terminerai en lui laissant le dernier mot tiré <a class="no-pjax" href="http://www.revue3emillenaire.com/blog/la-logique-de-lenergie-entretien-avec-stephane-lupasco/" target="_blank" data-link-type="url" contents="d'une entrevue qu'il a donnée en 1987">d'une entrevue qu'il a donnée en 1987</a>, peu de temps avant sa mort : </p><p style="text-align:center;">" ... si l’on prend votre logique en compte, il faudra en déduire que les trois matières macrophysique, biologique, psychique ou microphysique, existaient de tout temps. Comment peut-on imaginer un psychisme avant l’apparition des êtres vivants? "</p><p style="text-align:center;">S. L. : " Eh bien, tout d’abord une logique est une logique. Elle se suffit à elle-même. Quand on crée une logique, elle peut être constatée après ou non, exactement comme en physique, par exemple, où des hypothèses sont émises pour être ensuite infirmées ou confirmées. Donc ma logique généralisée est une logique autosuffisante en tant que logique; par la suite, on peut vérifier si elle est valable ou non. "</p><p style="text-align:center;"> " Oui bien sûr. Mais on peut, à juste titre, poser cette question puisque votre logique postule la coexistence de ces trois matières, même avant l’apparition des êtres vivants. "</p><p style="text-align:center;">S. L. : " Oui, elle existait. Mais elle était inobservable. Les êtres vivants sont là avant ma logique que j’ai appliquée aux systèmes vivants; donc même s’il n’y avait pas d’êtres vivants, elle aurait continué à avoir une valeur en tant que logique. Donc au départ, le problème qu’il y ait des phénomènes qui viennent la justifier ou non ne se pose pas. C’est par la suite que l’on peut en faire le constat. "</p><p style="text-align:center;">" Vous différenciez donc votre logique d’un fait expérimental, et vous dites qu’une logique se suffit à elle-même si elle est cohérente, mais qu’après, elle peut être vérifiée par l’expérience ou non… "</p><p style="text-align:center;">S. L. : “ Exactement. Et il se trouve qu’elle est vérifiée. Mais ma démarche n’a pas consisté à créer d’abord une logique et puis à l’appliquer aux faits. Je suis parti de l’expérience, des faits, et j’ai constaté par induction ce que j’ai décrit sur les trois matières. Mais par la suite, je peux dire que je pouvais, en effet, créer et élaborer cette logique et puis la vérifier par les faits. ”</p><p style="text-align:center;"> </p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:center;"> </p><p><i>* Sauf à l'intérieur d'un cercle restreint dont fit partie le philosophe et essayiste Marc Beigbeder (père de Frédérique Beigbeder) qui rédigea sa maitrise sur Lupasco dont le travail a d'abord été suivi avec intérêt par plusieurs artistes, dont André Breton, Eugène Ionesco et Salvador Dali.</i></p><p><i>** Il faut toutefois différencier les religions monothéistes de celles originaires de l'Inde et des autres pays asiatiques où par définition le mysticisme, c'est-à-dire l'expérimentation directe du divin, est au cœur de la pratique spirituelle.</i></p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/65324962022-10-18T19:25:35-04:002023-02-18T23:31:54-05:00#28 Cachez ce mort que je ne saurais voir (02-2021)<p style="text-align: center;">– « … ben oui mais ce sera pas grave Suzanne, quand tu seras morte, tu seras pu là pour voir de quoi t’as l’air..! Être exposé, ça donne à ceux qui restent la chance de te dire un dernier adieu, et ça aide à mieux faire notre deuil je trouve… » </p>
<p style="text-align: center;">– « J’m’en fous, j’ai pas envie qu’on me voit toute ratatinée… » </p>
<p style="text-align: center;">J’avais beau essayer d’expliquer à ma belle-mère que selon ma perspective, ce n’était pas pour soi mais pour ceux qui restent qu'on organise des obsèques, que je préférais de loin la voir (de proche) une dernière fois en chair et en os plutôt qu’en photo devant une urne, rien n’y faisait, ça restait un dialogue de sourd. Il faut dire que le départ d’une amie de ma mère que je connaissais bien était encore récent et le vide causé par le fait que je n’avais pas pu la voir une dernière fois m’habitait encore. Je m’étais arrêté au salon funéraire avant de prendre la route pour de courtes vacances en pensant pouvoir lui rendre un dernier hommage mais j’étais reparti avec la vague impression de n’avoir pas pu le faire. Sans vraiment d’endroit pour se recueillir, planqué devant un montage photo et un vase qui contenait ses cendres, j’avais offert mes condoléances à sa fille, après quoi j’avais quitté la salle un peu penaud, triste parce qu’elle était morte et qu’on n'irait plus la voir l’été tous ensemble avec la famille élargie autour de sa piscine, mais aussi parce que j’avais le sentiment qu’elle méritait un peu plus de décorum, un peu plus de chaleur et de sacré. Évidemment, comme on ne recourt plus à l’Église pour assurer les rites funéraires, on est laissé à soi-même et ce n’est pas évident. Je ne sais pas ce que les sociologues et les anthropologues diront plus tard sur la façon relativement nouvelle que l’on a d’enterrer nos proches, mais d’offrir une dernière cérémonie devant une urne et une photo révèle forcément quelque chose sur notre époque et notre rapport à la mort… </p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Je me souviens d’une Pâques il y a une vingtaine d'année où le grand-père d’une ex me racontait comment anciennement on veillait les morts; à la maison, pendant plusieurs jours et plusieurs nuits. Comment on les pleurait, avec de vrais pleureuses qui se forçaient à nous tirer les larmes. Et comment ça pouvait aussi déraper solide! Après quelques jours à partager la bouteille et à côtoyer le maccabée, on devenait un peu moins intimidé et l’envie de jouer des tours pouvait nous prendre. Le grand-père riait encore de la fois où l’épouse du défunt avait non seulement crié de ne plus voir le corps de son mari dans le cercueil, elle s’était évanouie lorsqu’elle l’avait aperçu suspendu par les bretelles derrière la porte..! L'expression "trop c'comme pas assez" prend tout son sens quand on compare avec les rites d'aujourd'hui.</p>
<p style="text-align: center;">*** </p>
<p style="text-align: center;">Quelques jours avant son décès, bien que très affaibli, mon père avait insisté pour qu’on lui fasse de belles funérailles. On le lui avait promis même si on s’était jamais pratiqué avant... Son frère ainé avait suggéré qu'on fasse affaire avec le salon funéraire d’une de ses connaissances. On avait suivit ses conseils, ça nous avait évité de magasiner. Et ça doit pas être évident de magasiner des funérailles quand on y pense... Bien que construit près d’une autoroute, le complexe — c'était plus un complexe qu'un salon — était situé à l’orée d’un boisé. L’intérieur était vaste et élégant. La chapelle, avec son très haut plafond et sa grande fenestration, laissait entrer avec abondance la lumière naturelle. On s’y sentait bien, c’était manifestement un endroit qui favorisait le recueillement. Mais l'endroit à lui seul n'aurait pas suffit à faire de cette cérémonie le beau moment qu'il devint; l’intelligence et la sensibilité du célébrant avait aussi beaucoup aidé. Il venait, pour ainsi dire, avec le forfait (!), forfait suggéré par un des employés de la place, un homme dans la soixantaine qui avait très bien su nous accompagner. Celui qui allait officier les funérailles était issu du clergé catholique, peut-être un vicaire. Mon père y tenait, il avait demandé les derniers sacrements même s’il n’avait pas mis les pieds dans une église depuis des décennies. Le célébrant était un homme vigoureux, qui se tenait bien droit et dont la voix était à la fois chaleureuse et autoritaire. Ma mère et moi avions échangé quelques mots la veille au téléphone avec lui mais c’était comme si nous avions discuté pendant des heures. Un vrai pro, il donnait l’impression d’avoir connu mon père. Pour s’adresser à tous ceux qui étaient venus rendre un dernier hommage, il avait choisi des passages de l’Ancien et Nouveau Testament qui mettaient en relief le sens de la vie et celui de la mort (l'amour crisse..!), tout en sachant être réconfortant. Ses oraisons duraient juste le temps qu’il fallait. Il nous guidait avec assurance pour la prière et invitait quand leur tour était venu ceux et celles qui devaient venir prendre la parole. Je chantai avec ma soeur une chanson à propos d’un petit chalet sur une île où nous avions l’habitude d’aller en famille, et mon père à la chasse avec ses amis l’automne venu. Un invité de dernière minute de son frère cadet entonna l’Ava Maria. C’était un ténor italien dont l’interprétation magnifique et bouleversante résonna partout dans la chapelle et secoua toute l’assistance. </p>
<p style="text-align: center;">Tout cela se passa pendant que mon père était exposé dans son cercueil, ce qui ajoutait forcément à la cérémonie un aspect sacré, solennel; ce n’est pas tous les jours qu’on a sous les yeux le corps mort d’une personne qu’on a aimée. C’était au mois de mai et les tulipes que mon père avait plantées dans la cour qu’il avait transformé au fil du temps en un grand jardin étaient sorties de terre. Les petits-enfants et tous ceux qui le désiraient avaient déposé dans son cercueil les tulipes que nous avions cueillies avant de quitter la maison. Cela aussi avait été très touchant. J’avais pour ma part beaucoup apprécié le moment passé seul en sa présence, alors que j’étais revenu en catimini dans la chapelle pendant que continuait dans une salle adjacente une réception pour les invités. De pouvoir déposer un dernier baiser sur son front avait bouclé la boucle amorcée quelques mois auparavant alors que le diagnostic d’un cancer foudroyant m’avait laissé incrédule. </p>
<p style="text-align: center;">*** </p>
<p style="text-align: center;">Mon père n’a pas qu’eu de belle funérailles, il a aussi eu une belle mort. Du moins j’aime le penser, j’espère que je ne me trompe pas. J’ignore à quel point cela est plus important pour nous que pour celui qui s’en va mais j’imagine qu’il est plus… facile..? de s’éteindre chez soi qu’à l’hôpital. Ma mère avait appelé un organisme bénévole qui aide les gens à mourir à la maison et ils étaient venus installer un lit dans le salon. Une infirmière passait tous les jours. Nous avions pu célébrer Pâques tous ensemble et ma conjointe lui avait chanté l’Ave Maria en lui tenant la main. Ce fut beau et intense. Cela faisait 2 jours que mon père n’ouvrait plus les yeux lorsque son âme l’a quitté. C’était en fin de journée et le ciel était noir et pluvieux. Quelqu’un est allé chercher du homard et nous avons bu du vin. Ma fille qui n’avait pas un an s’est mise à marcher pour la première fois. La vie continuait. </p>
<p style="text-align: center;">*** </p>
<p style="text-align: center;">On tend à l’oublier, l’être humain est un animal éminemment symbolique. Il y a certes des cérémonies à ré-inventer mais au-delà de l’opinion qu’on peut avoir sur l’au-delà, notre époque a peut-être sous-estimé les rituels, leur pertinence, leur nécessité, le rôle qu’ils ont à jouer dans les étapes de la vie. Je dirais qu’en plus de celui de mon père, j’ai eu à vivre 2 autres deuils importants. Et les 3 fois, tout mon être fut secoué par d’immenses vagues de chagrin, comme si mon corps expiait une douleur qui provenait de tréfonds inconnus et dont mon physique prenait simultanément acte, une douleur qui s’était accumulée au fur et à mesure que l’inéluctable se dessinait. Mais une fois les secousses terminées, il y a une paix qui s’installe et qui aide à accepter l’épreuve à laquelle on fait face. Plus j’y pense et plus je crois que les rituels sont là pour favoriser ce genre de moment, souligner la sacralité de ce qui se passe et qui est immanent à l’existence, et ce, peu importe ce qu'on l'on pense de la transcendance.</p>
<p style="text-align: center;">*** </p>
<p style="text-align: center;">Mais il paraitrait que la tendance se renverse. Selon un invité entendu cet automne à l’émission « Y’a du monde à messe », l’exposition du défunt serait à nouveau prisée parmi les amateurs de funérailles. Je blague mais j’étais surpris et à la fois heureux de l’entendre. Heureux est un peu fort mais disons que j’y voyais là une prise de conscience sur la nécessité de ramener un peu de sacré dans nos vies. Nous sommes passés en un temps record de société hyper religieuse à une société non pratiquante et on peut dire que ça parait beaucoup quand vient le temps d’enterrer nos morts. </p>
<p style="text-align: center;">*** </p>
<p>Je peux juste parler pour moi mais je ne crois pas être le seul qui trouve important de pouvoir voir une dernière fois le corps sans vie d'une personne qu’on a aimée quand vient le temps de lui dire adieux. Au-delà de ce que je serais capable d’en dire, cela participe à quelque chose d’insaisissable, qui nous amène ailleurs, nous ramène forcément à notre propre mort et nous oblige à nous arrêter.</p>
<p style="text-align: center;">Tout ça pour te rappeler Suzanne que j’aime mieux te voir ratatinée que pas pantoute. Bon.</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/53881162022-10-18T15:00:00-04:002023-01-10T01:17:40-05:00#17 Entre l'extase et l'éternité : Chronique de l'Incréé (08-2018)<p style="text-align: center;">D'Éric-Emmanuel Schmitt à <a contents="Blaise Pascal" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9morial_(Blaise_Pascal)" style="" target="_blank">Blaise Pascal</a>, en passant par <a contents="Jean de la Croix" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_la_Croix" target="_blank">Jean de la Croix</a> et de nombreux <a contents="Born again" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://born%20again%20christian" target="_blank">Born again</a>, ils sont plusieurs à avoir évoqué la Nuit de Feu, nuit pendant laquelle un intense brasier intérieur semble brûler l'âme, la purifier, pour par la suite la laisser baigner dans la félicité, révélant ainsi la pleine mesure du mot miséricorde. Je peux comprendre qu'on soit dubitatif face à de tels témoignages mais on ne peut nier les similitudes que partagent beaucoup de ces compte-rendus, et ce, peu importe l'époque ou la contrée d'où ils proviennent. Il s'agirait là d'un état de coeur et d'esprit certes rare et particulier, mais dont l'occurence est manifeste pour quiconque s'y intéresse. Bien sûr, on peut questionner la stabilité psychologique de certains saints dont le jeûne et les mortifications ont certes pu altérer considérablement leurs facultés, mais on peut aussi constater - à la lumière du récit d'Éric-Emmanuel Schmitt ci-bas par exemple - que si un point de rupture semble nécessaire pour pouvoir accéder à cet état, il n'a pas besoin d'être extrême pour autant. Et je pense bien pouvoir parler ici en toute connaissance de cause. J'ai quelques fois fait référence au cours de ce blogue à ce bel après-midi de l'été 2004 où ma compagne de l'époque, revenant du travail, m'a trouvé sur le lit, les bras en croix, extatique et pleurant littéralement de joie. </p>
<p style="text-align: center;">C'est que j'étais justement entrain de traverser cette Nuit de Feu...</p>
<p lang="fr-FR" style="margin-bottom: 0cm; caret-color: rgb(0, 0, 0); color: rgb(0, 0, 0); font-family: -webkit-standard; line-height: 0.49cm; text-align: center;"> </p>
<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="m06GCJUOHTs" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/m06GCJUOHTs/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/m06GCJUOHTs?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div>
<p> </p>
<p lang="fr-FR" style="margin-bottom: 0cm; caret-color: rgb(0, 0, 0); color: rgb(0, 0, 0); font-family: -webkit-standard; line-height: 0.49cm; text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Merde, j'avais complètement oublié d'appeler Luc. Je pris le combiné et je composai son numéro sur le champ. C'est sa blonde qui répondit. Luc n'y était pas mais m'ayant au bout du fil, elle en profita pour m'informer qu'il n'allait pas très bien depuis quelques temps. D'apprendre cela me secoua. Et comme ça faisait quelques jours que j'étais censé l'appeler, je ne pus m'empêcher de penser que mon oubli avait peut-être ajouté à son mal-être, ce qui me remua davantage, au point où j'eus la sensation qu'une vague de compassion m'emportait et que je pouvais réellement ressentir le tourment de Luc. C'en était presque exagéré. Non pas qu'il soit anormal d'avoir de l'empathie pour un ami qui a le moral dans les talons, mais l'intensité avec laquelle je percevais la situation était inhabituelle, pour ne pas dire disproportionnée. Mais telle une vague, cela finit par passer au gré de la conversation que j'avais entamée avec sa blonde, blonde que je connaissais quand même bien. L'être humain est généralement complexe mais certains le sont plus que d'autres. La copine de mon ami appartenait définitivement à la seconde catégorie. Elle non plus n'était pas à son meilleur. Elle avait commencé à m'entretenir des problèmes qu'elle rencontrait et dont la plupart étaient de nature familiale. J'écoutais patiemment, et lorsque je pouvais lui suggérer une solution que j'entrevoyais ou une manière différente d'aborder le conflit qu'elle m'exposait, je pouvais noter qu'elle ne tenait pas vraiment compte de mes suggestions, passant très vite par-dessus, évitant de réellement considérer les arguments que je lui amenais. C'était peut-être présomptueux de ma part de penser que je pouvais l'aider en quoi que ce soit mais il m'apparut dès lors évident qu'elle n'était pas intéressée par la résolution de ses problèmes, comme si leurs racines étaient trop profondes et que d'une certaine façon, les résoudre devait nécessairement passer par un détachement qu'elle ne voulait, ou n'arrivait pas à envisager. J'eus alors la vision très claire que son esprit était une sorte de circuit fermé, qui ressassait toujours les mêmes patterns, ce qui provoquait inlassablement les mêmes réactions néfastes pour son humeur. Je compris du même coup qu'il n'y avait rien à faire, qu'elle était prisonnière d'un cercle vicieux dont elle n'arriverait pas à s'expulser, du moins pas pour le moment. Et de le constater m'attrista grandement, en même temps qu'une 2e vague de compassion, encore + grosse que la première, prenait son élan et se préparait à m'entrainer avec elle. Il s'agissait vraiment d'un mouvement du cœur qui allait en s'accentuant, et dont on pouvait pressentir le pic et l'intensité qui suivrait, étonnamment similaire au mouvement des vagues dans la mer. Je raccrochai, un peu confus par le trop-plein d'émotions que je ressentais. Un peu inquiet aussi.</p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">C'est que je me doutais qu'une 3e vague se préparait et que son amplitude dépasserait les 2 précédentes. Ça peut sembler bizarre comme ça de craindre d'être submergé par un excès de compassion, mais ce n'était pas tant cela qui m'angoissait que le changement qui s'opérait tranquillement dans ma psyché, comme si j'approchais les limites d'un étrange et nouveau territoire, accessible par une brèche qui n'aurait pas dû s'ouvrir. La vague avait bel et bien amorcé son mouvement et cette fois-ci, c'était sur l'humanité toute entière que ma compassion avait jeté son dévolu..! Sentant que je perdais pied, je décrochai le combiné et j'appelai ma blonde à son travail. Au bord des larmes, je lui dis que ce serait bien si elle pouvait rentrer à l'appartement, que je me sentais vraiment bizarre et que tout serait tellement plus simple si on s'aimait les uns les autres, si on se souciait un peu plus les uns des autres. Dans mon esprit, ce souhait n'avait rien d'utopique. J'étais vraiment sincère, il suffisait seulement qu'on s'y mette tous. Maintenant. Juste ça. Mais de savoir que cela ne serait pas pour demain, que l'humanité repousserait encore l'atteinte de cet idéal, cela m'emplit à nouveau de compassion pour tous ceux qui souffraient et la 3e vague, gigantesque, s'abattit sur moi et m'engloutit. Dans mon tourment, la phrase " Ce que tu fais aux autres, c'est à toi-même que tu le fais " vint à mon esprit et sa vérité m'apparut implacable, indéniable, aussi vraie que le ciel est bleu lorsque le soleil y trône à son zénith. Mon cœur était immense et j'étais complètement désorienté par la démesure de ce que je vivais et absorbais. </p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Plus rien n'allait, mon esprit perdait ses repères. On aurait dit que la réalité commençait graduellement à se dissoudre. Puis je me sentis happé vers le haut, comme si un énorme aimant invisible était suspendu au-dessus de ma tête et m'aspirait vers lui. J'en étais rendu à me déplacer nerveusement sur la pointe des pieds dans le petit salon de la chambre, paniquant à l'idée de partir je ne savais où. Toujours dressé sur le bout des orteils, je m'immobilisai à côté du lit, résistant du mieux que je pouvais à la force d'attraction que mon être tout entier rencontrait, jusqu'à ce que je sente ma tête dégringoler jusque dans mon cœur ! J'entends par tête la façon dont on est habituellement conscient. À cet instant même où j'écris ces mots, si j'avais à situer le lieu où opère ma conscience, je n'aurais pas d'autre choix que de désigner ma tête. Mais là ce n'était plus le cas. Non seulement ma tête et mon cœur ne faisaient qu'un, le bref instant où la descente s'effectua, j'entrevis en accéléré ce qui semblait être le film de dizaines - peut-être même une centaine - de vies antérieures ! Se produisit ensuite une énorme explosion, comme si en fusionnant, mon cœur et ma tête avaient déclenché une immense réaction psycho-nucléaire qui pulvérisa l'espace et le temps. Et aussi invraisemblable que cela puisse paraitre, mon esprit se retrouva propulsé dans le cosmos parmi les étoiles... J'avais l'impression d'être moi-même une étoile dont je n'arrivais pas à déterminer si <a contents="naissait où si elle s'effondrait" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://expositions.bnf.fr/ciel/elf/page12.htm" target="_blank">elle naissait où si elle s'effondrait</a>...</p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Mais cela n'avait plus aucune espèce d'importance. Le feu avait foudroyé toutes mes peurs et tous mes doutes, avait réduit en cendres toutes mes fautes, mes croyances, tout ce qui faisait de moi la personne que je pensais être, pour n'en laisser que son expression la plus simple, la plus libre qui soit. Irradié par l'amour et la miséricorde, la joie et la connaissance, je flottais dans l'éternité, là où le temps n'a plus cours. Lorsque toute sa vie on est soumis au joug sans fin des secondes et des minutes, comme il devient apaisant d'y échapper ! Je pouvais constater que mon être, devenu un simple étant, s'allégeait grandement de ne plus avoir à s'éreinter à la tâche constante d'incarner <em>quelqu'un, </em>de maintenir - littéralement - sa réputation et de préserver sans relâche sa cohésion. Le repos psychique qui en découlait me plongeait dans une félicité sans nom, ce qui en retour me faisait réaliser le lourd tribut que l'on avait à payer pour entretenir et nourrir notre insatiable égo. J'étais à même de voir que celui-ci était une espèce d'excroissance qui s'était greffée à la nature incréée de mon être, nature qui contrairement à l'égo, tirait sa source hors du temps ; dans un éternel présent où rien ne commençait ni ne finissait. L'étonnement et le ravissement que procurait cette révélation étaient amplifiés par la simplicité désarmante, le caractère naturel et enfantin de ce qui s'avérait une simple mais ô combien réconfortante évidence. Comment avais-je pu oublier tout cela !? Aussi longtemps ? Je comprenais par le fait même que l'inquiétude qui nous tenaille à chaque instant - cette mamelle à laquelle s'abreuve notre égo, et dont on ne sent même plus le poids ni la présence tellement elle nous colle à la peau - que cette inquiétude originait d'un vaste, très vaste malentendu. Malentendu que notre condition temporelle et notre entendement limité perpétraient, voilant par le fait même la part d'incréé qui n'avait jamais cessé, malgré mon ignorance, d'être la charpente même de mon être ! Incréée parce que vide, sans forme, à l'état d'étant pur, sans début ni fin. C'était donc <em>ça</em> l'éternité ! Non pas une enfilade infinie de séquences mais à l'inverse, une absence de temps, un vide où rien n'est séparé, où aucune distance n'est possible, et où règnent sans partage l'amour et la joie, comme si le vide se réjouissait et s'étonnait lui-même de pouvoir ainsi s'engendrer et devenir le lieu de tous les possibles ! Le vide était bel et bien la forme. Et la forme, bel et bien le vide. Voilà qui devenait enfin clair ( <a contents="merci Jack" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/8-jack-kerouac" target="_blank">merci Jack</a> ) ! Et cela me parut tout à coup très drôle. À tous les jours, à tout moment, une immense blague cosmique nous est contée, et à chaque fois, le punch nous échappe ! Non seulement j'avais douté de son existence, j'avais aussi grandement sous-estimé son sens de l'humour ; y'avait pas à dire, Dieu était un sacré farceur..! * Au rire intérieur que déclencha cette constatation, s'ajouta la gratitude de savoir que mon intuition était juste, que ma quête n'était pas vaine, qu'il y avait effectivement, incontestablement, un sens à tout cela. Et tout me revenait : Tout cela n'était qu'un jeu, depuis toujours, depuis jamais..! <a contents="The game of Hide and Seek comme l'explique si bien Alan Watts!" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.reddit.com/r/Psychonaut/comments/3t6sei/life_is_god_playing_hide_and_seek_with_himself/" target="_blank">Une grande joute de cache-cache comme l'explique si bien Alan Watts :</a></p>
<p style="text-align: center;"><em>"...Now when God plays hide and pretends that He is you and I, He does it so well that it takes Him a long time to remember where and how He hid Himself. But that’s the whole fun of it, just what He wanted to do. He doesn’t want to find Himself out too quickly, for that would spoil the game. That is why it is so difficult for you and me to find out that we are God in disguise, pretending not to be Himself. But when the game has gone on long enough, all of us will wake up, stop pretending, and remember that we are all one single Self, the God who is all that there is and who lives for ever and ever..."</em></p>
<p style="text-align: center;"><em>***</em></p>
<p style="text-align: center;">Je ne sais pas si l'auteur Jean Bédard a lui-même connu ce genre d'extase pour pouvoir faire parler ainsi <a contents="Maitre Eckhart " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ma%C3%AEtre_Eckhart" target="_blank">Maitre Eckhart </a>dans son roman du même nom mais je dirais que la description suivante complète bien le récit de ce que j'ai entrevu : </p>
<p style="text-align: center;"><em>« Dans la petite cachette de l'âme, juste de l'autre côté des bois, je suis allé. C'est là que j'ai éternellement reposé et sommeillé dans la connaissance cachée du Père éternel, demeurant en lui, inexprimé. Dans cet être de Dieu où Dieu est au-dessus de tout être et de toute distinction, j'étais moi-même, je me voulais moi-même, je me connaissais moi-même, voulant créer l'homme que je suis. Et c'est pourquoi je suis la cause de moi-même selon mon être qui est éternel, mais non pas selon mon devenir qui est temporel. La félicité, c'est l'état naturel de l'âme qui assiste et participe à la naissance du cosmos... »</em></p>
<p style="text-align: center;"><em>***</em></p>
<p style="text-align: center;">J'ignore combien de temps je suis resté ainsi suspendu mais c'est seulement lorsque j'ai entendu mon nom que j'ai réalisé que j'étais couché sur le lit, les bras en croix, braillant de joie. Je revins graduellement à moi-même alors que ma blonde inquiète se demandait ce qui se passait. Complètement hébété, encore sous le choc et l'emprise de ce que je venais de vivre, j'avais du mal à rassembler mes esprits et à expliquer quoi que ce soit tant tout cela était extraordinaire. Mais au-delà du caractère exceptionnel de l'expérience, c'était avant tout l'inadéquation du langage pour décrire ce que j'avais vécu qui s'érigeait en obstacle. Ineffable est un mot qu'on rencontre souvent lorsqu'on lit sur les expériences mystiques et effectivement, la description des événements que je viens de faire ne saurait rendre compte de ce qui a été réellement vécu étant donné la nature essentiellement duale, binaire du langage. Cela a été évoqué à travers d'autres carnets, le langage est un procédé dualistique qui repose sur la contradiction. Et bien que ce mode de communication soit parfaitement adapté pour le Dualistan - notre plancher des vaches - il perd de sa pertinence lorsqu'on traverse dans l'Unistan – où la contradiction n'existe plus –, et encore plus lorsqu'on en revient. Il n'est pas étonnant que l'on soit épris de vertige lorsqu'on se met à penser au début des temps et ce qu'il y aurait avant ou après. Étant donné que le caractère non-dual de ces considérations échappe à notre entendement, le langage n'arrive tout simplement pas à exprimer d'une manière satisfaisante une proposition qui fait du sens...</p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Bien qu'une immense joie continuait de m'habiter, le retour sur terre ne se fit pas sans heurts. L'expérience avait libéré une telle énergie que je n'ai pas pu dormir pendant les 2 jours qui ont suivi mon <a contents="extase" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Extase" target="_blank">extase</a>, et j'ai dû sommeiller 2-3 heures par nuit pendant les 2 semaines qui suivirent. Aussi, comme la compréhension globale des ouvrages spirituels que j'étais entrain de lire augmenta significativement, je me transformai en un insupportable verbo-moteur. Et je n'avais plus peur de rien ni de personne, ce qui aurait pu me mettre dans le trouble, notamment la fois où je suis allé remettre une canette qu'un douchebag-en-roller-blade-sur-stéroïdes-en-chest-comme-ses-deux-amis avait lancée dans l'entrée d'une ruelle. Ramassant la canette, je me suis mis au pas de course pour le rattraper sur la piste cyclable et la lui tendre en disant : "J'pense que t'as échappé ça..." J'appris toutefois rapidement à me la fermer quand je constatai qu'on commençait autour de moi à s'inquiéter de ma santé mentale. Mais il y avait définitivement quelque chose dans l'air, comme en témoigne la série d'événements bizarres qui se déroula quelques jours après. Alors que j'étais dans la cour avec quelques amis, passa dans la ruelle un magicien saoûl qui insista pour se joindre à nous et nous faire son numéro - qu'il ratait immanquablement étant donné son état -, le tout sous un ciel jauni par un incendie qui s'était déclaré sur la rue voisine tandis qu'un chat dévorait un oiseau qu'il projetait dans les airs de temps en temps avec sa gueule juste à côté de moi... Et comme si ce n'était pas assez, juste devant la fenêtre du petit salon qui donnait sur la rue où j'étais allé prendre une pause de l'étrange cirque qui se déroulait dans la cour, un passant affublé d'une cape déclama avec vigueur :<em> </em></p>
<p style="text-align: center;"><em>" Oh what a joy ! / You quenched your thirst / But don't worry boy / Everything's gonna get worst..."</em></p>
<p style="text-align: center;"> Ça ne s'invente pas ! J'avais vraiment l'impression que l'univers me tenait dans sa ligne de mire, comme si je devais passer par une sorte d'anti-extase qui provoquait du coup son lot d'événements particuliers... J'aurais pu croire que je basculais dans la folie si ça n'avait pas été des livres que j'étais entrain de lire, dont le roman Maitre Eckhart cité plus haut, et qui me rassuraient sur la nature de ce que j'avais expérimenté. Aussi, je dois l'admettre, je trouvais un certain réconfort dans les paroles ( prémonitoires ? ) de certaines de mes chansons que j'étais entrain de mixer et dont le sens se révélait maintenant sans détour : </p>
<p style="text-align: center;"> <em>" L'amour m'emporte dans un grand vent, et m'éblouit de sa lumière, jusqu'à la fin des temps </em></p>
<p style="text-align: center;"><em>Non je n'ai jamais vu autant, autant d'amour depuis que je cesse </em></p>
<p style="text-align: center;"><em>De penser qu'il est important </em></p>
<p style="text-align: center;"><em>D'être soi-même </em></p>
<p style="text-align: center;"><em>Il suffit d'être "</em></p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="PKdoxUeVKgg" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/PKdoxUeVKgg/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/PKdoxUeVKgg?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div>
<p> </p>
<p style="text-align: center;">Ou encore : </p>
<p style="text-align: center;"><em>" Je suis seul en apesanteur, juste assez haut pour me faire peur </em></p>
<p style="text-align: center;"><em>Et je sais plus comment revenir, ni tout ce qui vous fait tous courir </em></p>
<p style="text-align: center;"><em>J'exige des explications, j'exige des explications "</em></p>
<p style="text-align: center;">( <a contents="Rage de dent" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jeanfrancoisfortier.bandcamp.com/track/rage-de-dents-3" target="_blank">Rage de dent</a> )</p>
<p lang="fr-FR" style="margin-bottom: 0cm; caret-color: rgb(0, 0, 0); color: rgb(0, 0, 0); font-family: -webkit-standard; line-height: 0.49cm; text-align: center;"> </p>
<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="ryOtjTAyTSE" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/ryOtjTAyTSE/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/ryOtjTAyTSE?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div>
<p> </p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;">Mais le passage suivant était le plus étonnant. J'ignorais ce qu'il pouvait signifier à l'époque où je l'ai écrit mais comme j'aimais comment ça sonnait, j'avais décidé de le garder tel quel : </p>
<p style="text-align: center;"><em>" Et quand je serai revenu à moi</em></p>
<p style="text-align: center;"><em>C'est qu'il sera trois heures et trois </em></p>
<p style="text-align: center;"><em>Le jour comme la nuit, c'est une loi "</em></p>
<p style="text-align: center;"><em>( Quand je suis à côté de moi )</em></p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="5Po-HIVKDO0" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/5Po-HIVKDO0/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/5Po-HIVKDO0?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div>
<p> </p>
<p style="text-align: center;">Mine de rien, cette nuit de feu s'est déroulée en plein cœur d'un bel après-midi d'été, alors que j'avais 33 ans... </p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Mais les choses revinrent lentement à la normale et je décidai de mettre tout ça derrière moi, non sans avoir préalablement sérieusement considérer l'option de tout abandonner pour me consacrer exclusivement à ma quête spirituelle. On comprendra encore plus mon inclinaison pour le mysticisme et les sujets abordés dans ce blogue à la lueur de ce que je relate dans ce carnet, ce qui ne veut pas dire que j'ai gagné en sagesse pour autant... Mais de se remémorer à nouveau cette expérience à travers l'écriture m'a redonné le goût d'y revenir, pas tant à l'expérience comme telle qu'à l'état d'esprit que je cultivais quand cela m'est arrivé. Aussi, sachez en terminant que l'automne amènera son lot de nouveaux projets, principalement en musique. Pour cette raison, il se pourrait bien que ce carnet soit le dernier pour un bon bout. Je compte continuer de nourrir ce blogue mais sans nécessairement observer la discipline à laquelle je m'étais obligé lors de mon carnet d'introduction. </p>
<p style="text-align: center;">Merci à ceux qui m'ont suivi, j'espère ne pas vous avoir trop dérouté..! </p>
<p style="text-align: center;">À+ </p>
<p> </p>
<p>* Pour ce qui est du côté sinistre de cette blague - l'existence du mal - , sachez qu'Alan Watts aborde la question <a contents="Cliquez ici si vous n'avez pas été sur le lien + haut" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.reddit.com/r/Psychonaut/comments/3t6sei/life_is_god_playing_hide_and_seek_with_himself/" target="_blank">sur le lien que j'ai mis + haut ( et remis ici ) .</a></p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/65461372021-01-31T04:00:00-05:002023-01-20T00:12:54-05:00#29 Confession d'un goy : Je t'aime toi non plus<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;">Il y a des scènes comme ça qui vous habite. S’est imprimée dans mon esprit il y a plusieurs années l’image d’un énorme grand-père endimanché, affublé d’un chapeau géant à la fois ridicule et magnifique, entouré d'une multitude de petits-enfants qui se couraient après en tournoyant autour de lui sur un trottoir de la rue Bernard pendant que j’attendais dans ma voiture à un feu rouge. Faut dire que j’ai toujours éprouvé de la sympathie pour les Hassidiques. Leur habillement sorti tout droit de la Pologne du 19e siècle et leurs boudins proéminents est un pied-de-nez sympathique à je sais pas quoi, mais ça le fait en ce qui me concerne. Y’a aussi que les questions métaphysiques m’intéressent et la position du hassidisme sur le sujet est vraiment originale. Et cohérente. Leur concept de Tzim Tzum pour expliquer la création du monde est un espèce de Big Bang avant l’heure. Et leur conception du monde et du rôle qu’ils ont à remplir dans ce monde explique aussi pourquoi le fait de se rassembler leur est si primordial et est au centre de leur mode de vie comme on a pu le constater une fois de plus dernièrement. On en conviendra, c'était pas nécessairement joli. Mais les autorités ont aussi pas pire cafouillé, on va se l'dire. C'est que le chant, la danse, la musique, la prière, et la joie qui en résulte lorsqu'on s'y adonne en groupe aide les Hassidiques à devenir plus pieux. C’est ce que veut dire leurs nom d’ailleurs, les Pieux.</p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Je ne m’offusque pas non plus de leur indifférence à mon égard; c'est qu'ils ont d’autres chats à fouetter. Pour les Hassidiques, Dieu et l’humanité sont co-créateurs car c’est à travers les actions vertueuses des hommes que Dieu quitte le domaine pur de l’abstraction et parvient à devenir actif en ce monde. Ce qui en retour, divinise l’humanité dont les actions vertueuses actualisent les émanations divines, les sephiroth en hébreu. Autrement dit, Dieu créa les humains et grâce aux humains, Dieu n’est plus une abstraction. Et ce faisant, les hommes vertueux se rapprochent de Dieu. C’est un win-win. Je comprends qu’on puisse être sceptique devant l’existence du divin mais la question n’est pas là; la proposition est logique, une logique qui n’est pas sans rappeler la logique de l’énergie de Lupasco qui repose sur une dynamique de potentialisation et d’actualisation. Je dis pas ça pour faire mon smatt, c’est comme ça, pour une raison que j'ignore, Lupasco est arrivé un jour sur mon radar. Même si je comprends toujours pas tout ce qu’il explique, j’ai comme l’impression depuis le début qu’il a vraiment craqué le code...</p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="vegidaTBnxg" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/vegidaTBnxg/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/vegidaTBnxg?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">*** <br>Je sais, pas besoin de le dire, c’est comme une secte, dans laquelle certains sont malheureux, et dont on peut difficilement sortir, au prix d'une exclusion sociale très brutale. On dira aussi que les enfants sont brainwashés et que les femmes ont pas de vie. Mais on projette plein d’affaires quand on s’exprime ainsi. Et qu’en est-il de nos propres fêlures? De l’isolement de nos personnes âgées, de la maltraitance de nos enfants, de nos obsessions virtuelles? Sommes-nous vraiment dans une position pour juger? Notre modernité est capable à elle toute seule de générer beaucoup de souffrances. Et face à cette souffrance inhérente à l'existence, les Hassiques ont adopté, ou plutôt préservé, une stratégie différente de la notre. Mais bon, encore une fois, je dis ça, je dis rien.</p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="wC10VWDTzmU" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/wC10VWDTzmU/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/wC10VWDTzmU?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">*** </p>
<p style="text-align: center;">On pourrait dire que Richard Dawkins, un biologiste et théoricien de l'évolution réputé, a insisté beaucoup pour ne pas trouver de vertu à la religion. Il faut que dire c'est un champion – dans le vieux sens du terme – de la Raison. Et pour qu'enfin elle prévale une fois pour toute, il croit avoir réussi à démontrer que la religion – étant donné qu'elle ne peut pas être un trait évolutif avantageux –, a réussi à se propager en contaminant les esprits. C’est ce qu'il a appelé un meme. Un meme a la capacité de se propager comme le ferait un gène, un virus ou un parasite. Des fois, ça donne de bonnes idées comme la culture. D'autres fois un peu moins comme pour la religion. Tadam. Voilà. La démonstration est faite (en écoutant le vidéo en dessous, je m'aperçois que je caricaturise un peu trop mais les implications (non-)téléologiques restent les mêmes au bout du compte. Comme si la raison, dans sa course vers le progrès, devait devenir omnisciente, que l'accroissement de son domaine était proportionnel à l'éradication de l’irrationnel. C'est qu'on confond la déraison et l'irrationnel. L’irrationnel ici n’a rien à voir avec qui est ou non factuel ou avec la liberté qu'on se donne de croire ce qu’on veut juste parce que ça fait notre affaire. Je parle plutôt de ce que la raison n’arrivera jamais à saisir, comme la créativité ou l'intuition par exemple. La raison et la créativité sont des modes psychiques non seulement différents, ils s'auto-excluent; ils ne peuvent co-exister sur le même plan. Ou dit autrement, la couleur est à l’aveugle ce que l’irrationnel est à la raison; une qualité, une dimension à laquelle elle n’a pas accès. Paradoxalement, sans la créativité, c'est l'évolution même qui ne pourrait pas avoir eu lieu. Pas pour rien que la créativité est un sephirot, une émanation divine pour les Juifs. Même chose pour la raison d'ailleurs.</p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="01kn-Z5Nwtg" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/01kn-Z5Nwtg/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/01kn-Z5Nwtg?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">*** </p>
<p style="text-align: center;">L’Occident est présentement un vaste laboratoire social. L’avènement d’une société séculière aussi peu pratiquante et de plus en plus athée est assurément une première dans l’histoire de l’humanité. Si je prends pour exemple mes enfants, ils n'ont assisté à aucune réelle célébration religieuse de leur vie et ce qu'elles savent de la religion est purement anecdotique. Aucune idée s'il y a un lien – comme bien des phénomènes, c'est multi-factoriel, et l'avènement des réseau sociaux jouent clairement un rôle – mais mes enfants appartiendraient à la génération la plus anxieuse <a contents="qui ait jamais existé" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=CI6rX96oYnY" target="_blank">qui ait jamais existé</a>. Le phénomène aurait même explosé depuis le début des années 2010. Et si croire était un besoin physiologique? Une nécessité, inscrite à même notre psyché, et dont la suppression entrainerait des conséquences que nous ne sommes pas en mesure de réaliser étant donné le caractère inédit de ce phénomène sociologique. Comme Jung l'explique, pour l'Homme, Dieu est avant tout une image. Une image dont on a besoin pour se construire ; c'est un archétype, issu de l'inconscient collectif. Mais non seulement Dieu serait mort, le Soi où il trouvait sa place dans notre psyché a créé un vide que notre égo propre est allé remplir grâce à l'expansion vertigineuse du monde virtuel. Il est à se demander si le Narcisse des mythes grecs – qui dépérit à force de se contempler – n'en aurait pas profité pour remplacer Dieu... Jung parle aussi de la manière dont l'époque peut transformer la figure de l'archétype. Pas pour rien que Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft forment une nouvelle principauté; ils sont le territoire dans lequel notre toute nouvelle virtualité évolue. Ça n'a pas que du mauvais, on s'entend. Je ne fantasme aucunement sur le 19e siècle et sa rigidité morale et religieuse et je chéris ma condition, j'en suis reconnaissant. Sauf que pour pouvoir accéder au confort inégalé de notre réalité matérielle, il a fallu quitter le monde du surnaturel et de la superstition, sans toutefois comprendre que le récit raconté par la religion était avant tout symbolique, et que les rituels associés à leur célébration se veulent une façon d'intégrer ses symboles, symboles dont la compréhension se situe justement au-delà de la raison, et dont l'existence, enfouie dans notre inconscient collectif serait intriquée à même notre psyché, grâce aux archétypes. Jung est très convaincant lorsqu'il parle du caractère incréé de nos aspirations religieuses, c’est-à-dire des a priori psychologiques auxquels nous nous référons tous de manière symbolique, processus qui aurait difficilement pu être un fruit de notre imagination. Ce serait plutôt l'inverse; c’est l'existence des archétypes qui oriente notre manière de voir, d’appréhender le monde, de se concevoir et d'en extraire du sens. Ce qui implique forcément notre subjectivité. Les archétypes sont à la psyché ce que l’instinct est au vivant; un kit de départ, distribué à tous. Dans les 2 cas, ils tracent le chemin que prend l’évolution.</p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Tout ça pour dire que si on a évacué le religieux et en même temps gagné en confort, on semble avoir aussi accru notre désarroi. Je veux pas faire mon péteux mais quand Nietzsche a affirmé que « Dieu est mort », ce n’était pas pour se réjouir mais pour s’en inquiéter. Car Dieu, de tout temps, guide les hommes et les femmes. C'est un archétype autour duquel le Soi se construit. C’est tout nouveau que les humains n’aient pas besoin de se serrer les coudes pour survivre, ni d'adhérer à une foi commune. Se pourrait-il que le prix à payer pour y arriver soit l’accroissement de l’isolement, de l’anxiété et de la division?</p>
<p style="text-align: center;">Ça a pas l'air d'être le cas des Hassidiques par exemple.</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/64609262020-10-22T00:32:08-04:002020-11-22T14:04:37-05:00#26 L’esprit du temps et la mécanique des idées <p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;">« En fait, l'esprit a atteint son stade actuel de conscience comme le gland se transforme en chêne, comme les sauriens se sont transformés en mammifères. De même qu'il s'est développé pendant fort longtemps, il continue encore, en sorte que nous sommes poussés par des forces intérieures aussi bien que par des stimuli extérieurs. » </p>
<p style="text-align: center;">C.G. Jung " L'homme et ses symboles ", Robert Laffont, 1964 p.81. </p>
<p style="text-align: center;"><br>Si l’Homo Sapiens est sensiblement resté, biologiquement parlant, le même animal depuis son apparition il y a environ 300 000 ans, il est admis qu’il a continué d’évoluer au niveau psychique. Et tout comme il est possible de trouver des traces de l’évolution du vivant à travers la biologie humaine - les cellules de notre corps sont constituées de mitochondries; de minuscules centrales énergétiques et qui sont apparues 2 milliards d’années avant nous, notre coccyx est le vestige d’une ancienne queue, etc. -, certains ont tenté de dresser, à même la psyché humaine, la carte du cheminement psychologique de l’humanité depuis son berceau, et du reste de la route qui lui resterait à parcourir. </p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;">Parmi ceux-là, le philosophe américain Ken Wilber avance une théorie qui permet de comprendre comment et pourquoi une nouvelle pensée finit par émerger et s’imposer à travers les époques. Grâce à son modèle, Wilber a pu prédire dès les années ’90 ce qui se joue maintenant un peu partout sur les campus universitaires américains et canadiens. La perspective qu'il offre sort des sentiers battus et en ce qui me concerne, ce ne serait pas une perte de temps si vous preniez la peine d’écouter le vidéo juste en-dessous qui aidera non seulement à comprendre comment évolue la psyché humaine, mais aussi comment et pourquoi il s'est produit le choc idéologique auquel on assiste depuis quelques jours à l’Université d’Ottawa. Bref, ce n’est pas un hasard si nous somme plusieurs à se sentir dépassés sur notre gauche, et qu’un phénomène d'inversion de certaines valeurs - la laïcité par exemple - semble s’opérer. Selon Wilber, les secousses idéologiques dont nous sommes témoins seraient le fruit d’une inévitable confrontation, en même temps que la répétition d’un phénomène qui se produit à chaque fois que l’humanité assiste à l’apparition d’un nouveau niveau de pensée. </p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="U2XK812tSmM" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/U2XK812tSmM/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/U2XK812tSmM?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;"><br>Toujours selon lui, il faudrait que seulement 10% de la population adhère à une nouvelle idéologie pour que celle-ci finisse par s’imposer et devienne dominante. Voilà comment et pourquoi les idées des Lumières qui prirent racine au 18e ont fini par devenir la norme au point tel qu’aujourd’hui, du moins en Occident, des concepts tels que la liberté d’expression ou la démocratie vont de soi. Mais pour devenir la norme, l’idéologie nouvelle ne peut pas complètement balayer celles qui l’ont précédé; elle doit plutôt la compléter, et améliorer l’ensemble du système sinon elle ne pourra s’épanouir, et ira même jusqu’à régresser si elle n’arrive pas à faire de compromis, ce qui semble être présentement le cas de la culture « woke » , associée à la pensée post-moderne, courant dont les graines, toutes jeunes, ont germée durant les année ’60. Si celle-ci met en lumière certains des paradoxes qu’a fini par engendrer le stade de pensée moderne - et qui succédait au stade tribal qui a dominé le Moyen-Age et dont certains relents sont encore présents -, Wilber nous explique qu’elle pourrait justement régresser au niveau tribal avec qui elle a beaucoup en commun - identity politics oblige - si elle rejette les piliers de la pensée moderne comme la liberté d’expression, piliers qui lui ont permis la naissance du stade post-moderne. Wilber termine avec une mise en garde contre les défis qui émergent lorsque fleurit un nouveau courant de pensée. Lorsqu'il en est à ses premières incarnations, celui-ci est convaincu de sa supériorité et prétend détenir la vérité, en d’autres mots, il n'est pas très inclusif et cherche plus à s'affirmer qu'à intégrer. Ajoutons à cela les caractéristiques propre au courant post-moderne; une relativisation ET un absolutisme extrême, et ceci explique bien des aspects de l’affaire qui secoue présentement l’Université d’Ottawa. Bref, un entretien fascinant comme le sont la plupart des vidéos que l’on peut visionner sur Rebel Wisdom.</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/62011662020-02-02T21:19:07-05:002020-11-22T14:04:25-05:00#25 Variations sur le vide : 5 bonnes raisons pour le ressortir<p style="text-align: center;"><strong>Raison #1</strong> : C’est pas mal bon </p>
<p style="text-align: center;">Et c’est pas moi qui le dit. Selon les archives dans lesquelles je me suis replongées dernièrement, y’a entre autres Francis Hébert du Voir qui raconte que « Fortier sait mieux que quiconque en nos terres composer de grandes chansons pop ». On va se le dire, il exagère un peu, mais bon, ça se prend quand même bien. </p>
<p style="text-align: center;">Sinon à la défunte émission Bande à Part, on avait parlé de « textes d’une sensibilité à faire frémir, une voix caressante, assez de mélodies pour nous faire fredonner à répétition… ». Toujours sur la radio d’état, Alain Brunet avait affirmé à l’émission matinale de Marie-France Bazzo que <em>Variations sur le vide</em> était « Un de meilleurs disques d’auteur-compositeur-interprète masculin de l’année 2005. Très McCartney au sens de la mélodie et du type d’arrangement ». Oui oui. </p>
<p style="text-align: center;">Je citerai pas tout mon dossier de presse, vous en avez déjà une bonne idée. J’aimerais par contre souligner que Sylvain Cormier a jamais rien écrit à mon sujet. Il avait peut-être pas apprécié que j’aille porter mon disque directement dans sa boite aux lettres. Comme aucun label avait voulu me signer à l’époque, je me débrouillais comme je le pouvais. C’était un gars à Radio-Can qui m’avait conseillé de le faire, il m’avait même donné son adresse. Je me souviens pu qui c’était mais je me rappelle qu’il était très enthousiaste. Un peu trop peut-être… </p>
<p style="text-align: center;">Mais je me plains pas - je serais mal placé - surtout que peu de temps après, Isabelle Porter allait justement écrire dans les pages du Devoir que « Cet album-là est plein de perles…<em> Une fille pour l’été</em> a la perfection des classiques… ». C’était il y a 15 ans et à lire le courrier des lecteurs du Devoir ces temps-ci, pas sûr qu’ils seraient nécessairement tous d’accord avec cette affirmation concernant <em>Une fille pour l’été</em>. Certains ne manqueraient pas d’y voir une chanson qui fait l’apologie du patriarcat. Et que le choix des instruments, notamment le banjo et la mandoline, rappelle un peu trop la musique des rednecks suprémacistes. Ce à quoi je répondrais que comme mes filles fréquentent l’été <a contents="un rock camp" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://ici.tou.tv/camp-rock/S01B00?lectureauto=1" target="_blank">un rock camp</a> où sont acceptées seulement des filles, des trans ou des personnes non-genrées, ça s’annule. </p>
<p style="text-align: center;"><strong>Raison #2</strong> : Il est plus disponible </p>
<p style="text-align: center;">On a beau chialer contre les Spotify et Apple Music de ce monde, j’aime quand même mieux qu’on puisse avoir accès à aux chansons de <em>Variations sur le vide</em> que pas pentoute. Mais comme j’ai toujours trouvé qu’il sonnait un peu trop boomy, Jean-Sébastien, mon partenaire dans Le Bleu du Feu, va le remasteriser. Et corriger 2-3 trucs qui m’ont toujours achalé… C’est d’ailleurs grâce à lui si on le ressort. Il revenait sur l’idée de temps à autres l’automne dernier, sans que cela ne suscite chez moi trop d’enthousiasme - on travaillait sur des compos récentes et je me disais que ça nous retarderait - , jusqu’à ce que je réalise durant les Fêtes que ça fera 15 ans cette année qu’il est sorti et que 15 ans, ça donne un beau chiffre rond pour ce genre de projet. </p>
<p style="text-align: center;"><strong>Raison #3</strong> : J’ai une chanson inédite </p>
<p style="text-align: center;">J’avais décidé de pas l’inclure à l’époque parce que le 3e couplet m’énervait, j’aimais pas les paroles. Elles clashaient trop avec le propos général, propos qui m’échappait il faut le dire. Mais maintenant que<a contents=" je sais de quoi cette chanson parle" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/l-eternite-ne-dure-jamais-longtemps" style="" target="_blank"> je sais de quoi cette chanson parle</a>, j’ai pu la compléter comme il se doit avec un 15 ans d'intervalle. Ça s'appelle Une place et j'ai bien hâte de vous la faire entendre.</p>
<p style="text-align: center;"><strong>Raison #4</strong> : Le vinyle est revenu en force*</p>
<p style="text-align: center;">J’en ai magasinés pour donner en cadeau à Noël à mon neveu et je me suis dit que ça serait bien d’avoir <em>Variations sur le vide</em> avec une belle grosse pochette en carton comme dans l’bon vieux temps. Et comme j’avais clairement pas choisi le meilleur cliché à l’époque parmi les photos que mon amie Claudine avait prises, je vais en profiter pour rectifier la chose; le cover sera donc un peu différent. Je serai aussi en mesure de réaliser l’idée initiale que j’avais en tête. Je voulais une pochette qui évoquerait l’esprit Verve/Blue Note fin ’50 début ’60. J’avais manqué ma shot à l'époque mais je pense bien pouvoir me reprendre cette fois-ci. J’ai l’air un peu fendant sur la nouvelle photo mais ça me dérange pas, je pourrai dire que j’étais jeune et con. Ce qui est pas faux comme vous pourrez le voir au prochain point. Aussi, de le sortir en vinyle m’a amené à repenser l’ordre des chansons. De les aligner sur 2 faces distinctes en a fait un meilleur album je pense, ça coule mieux. Reste juste à m’acheter un table tournante maintenant. </p>
<p style="text-align: center;"><strong>Raison #5</strong> : J’en profiterais pour répondre comme du monde… </p>
<p style="text-align: center;">… à Michel Rivard. Ça fait 15 ans que je me sens mal. Le disque était venu à ses oreilles et non seulement il avait beaucoup aimé, il avait pris la peine de m’écrire un courriel pour me le signifier. Voulant être à la hauteur de son message, j’avais commencé à lui répondre… avec beaucoup trop de sollicitude. J’étais tellement têteux que j’ai arrêté, me disant que les mots justes me viendraient le lendemain. Puis le surlendemain. Puis la semaine d’après. Faut dire que c’était pas la période la plus straight de ma vie… et pour une raison que j’ignore encore à ce jour, j’ai jamais su répondre comme du monde. Alors Michel, sache que je te remercie pour ton mot, et que même si ça fait 15 ans, il me fait toujours chaud au coeur. Et désolé pour mon silence. Des fois, j’ai juste pas d’allure. </p>
<p> </p>
<p>*Étant donné les circonstances, la sortie vinyle est repoussée. Je vous aviserai quand je pourrai le lancer dans une vraie salle avec du vrai monde, comme dans l'temps...</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/59964662019-12-07T16:18:28-05:002023-12-20T20:38:31-05:00 #24 Synchronicité : Quand le hasard exagère<p style="text-align:center;">« Dans la psychologie analytique développée par le psychiatre suisse <a class="no-pjax" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Carl_Gustav_Jung" target="_blank" data-link-type="url" contents="Carl Gustav Jung">Carl Gustav Jung</a>, la synchronicité est l'occurrence simultanée d'au moins deux événements qui ne présentent pas de lien de causalité, mais dont l'association prend un sens pour la personne qui les perçoit ». - Wikipedia </p><p style="text-align:center;"><i>Jung </i>m’est souvent proposé par Youtube. Il est une figure majeure pour de nombreux penseurs auxquels je m’intéresse, notamment en raison de <a class="no-pjax" href="https://www.youtube.com/watch?v=NlDs4BtEe0w" target="_blank" data-link-type="url" contents="son concept de shadow">son concept de shadow</a> qu’il définit comme étant une part d’ombre de notre psyché - pas la plus jolie - qui nous échapperait et à laquelle il nous faudra tôt ou tard faire face si l’on désire pleinement se réaliser. Ceci expliquerait entre autres comment un père de famille aimant peut devenir gardien d'un camp de concentration comme à Auschwitz pendant la 2e Guerre Mondiale, ou briser la famille de son voisin en le dénonçant pour ses activités « subversives » comme en Europe de l’Est avant l’effondrement du mur de Berlin… L’histoire de <i>Jung</i> n’est pas banale. Il raconte être resté jusqu’à l’âge de 11 ans dans un état psychologique <a class="no-pjax" href="https://www.youtube.com/watch?v=NlDs4BtEe0w" target="_blank" data-link-type="url" contents="Il raconte être resté jusqu’à l’âge de 12 ans à un stade de développement très primitif psychologiquement parlant">plutôt particulier </a>( à partir de 2:57 dans le lien ), et qu'avant cet âge, il avait toujours senti qu'il n'était pas séparé du monde, qu'il n'avait pas conscience d'être un individu à part entière ! Quant au concept de synchronicité, <i>Jung</i> l'a développé après qu'il ait lui-même vécu d'étonnantes coïncidences et que plusieurs de ses patients lui aient confié la même chose. Mais une coïncidence n'est pas en soi nécessairement une synchronicité. Pour pouvoir être considérée comme telle, les 2 événements (ou plus) qui participent à la coïncidence doivent aussi être reliés par une trame porteuse de sens. Si la personne qui est devant vous dans une file porte les mêmes nom et prénom que vous, c'est certes une coïncidence mais ce n'est pas une synchronicité pour autant car l'incidence de ce hasard n'a pas de portée en dehors du moment et de l'endroit où il se produit.</p><p style="text-align:center;">Ce n'est que récemment que j’ai réalisé avoir vécu il y a plus de 25 ans une synchronicité dans le sens où <i>Jung</i> l'entend. J'avais bel et bien été un acteur de premier plan dans le déploiement d’une occurrence simultanée lourde de sens, et dont les probabilités qu’elle se réalise dépassaient l’entendement comme vous serez à même de le constater. L'étrange concours de circonstances qu'elle a par la suite engendré 2 décennies plus tard n'est pas banal non plus, comme si l'écho de cette première synchronicité en avait déclenché d'autres..!</p><p style="text-align:center;"> </p><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="1dOmrZZAodc" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/1dOmrZZAodc?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div><p> </p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:center;">En secondaire 3, je suis devenu complètement gaga d'une fille qui était de 2-3 ans mon ainée. Simplement la voir passer devant mon casier me chamboulait. Non seulement je la trouvais très jolie, j'avais l'impression de déjà la connaître, même si je ne lui avais jamais adressé la parole. Mais avec le temps, et malgré qu'elle m'intimidait beaucoup, je réussis tranquillement à m'en approcher. J'ai certes travaillé fort pour que cela se produise mais le nombre de fois où le hasard m'a aidé fut quand même impressionnant. Comme je n'étais pas du genre à tenir un journal, j'ai malheureusement oublié pas mal d'anecdotes mais il serait difficile de ne pas se rappeler la fois où ayant perdu son ancienneté comme monitrice dans les camps de jour de Laval, elle put réintégrer in extremis son emploi en étant affectée à la petite équipe où j'étais moi-même moniteur. Laval, je tiens à le rappeler, c'est quand même la 2e plus grosse ville du Québec, et c’était pas les camps de jour qui manquaient. Par contre, comme 2 années de scolarité nous séparaient, il y a eu de longues périodes où je ne l'ai pas croisée. Mais la vie est ainsi faite qu'un soir, elle se pointa à mon appartement pendant qu'on y tenait une fête. Je ne m'attendais pas à sa venue mais comme mes colocs et elle avaient des amis en commun, ce n'était pas non plus surprenant qu'elle y soit. J'étais bien content de la revoir et elle aussi il me semblait. Ce fut une belle soirée, et de l'avoir passée en sa compagnie raviva mon sentiment pour elle. Je décidai donc de lui écrire quelques jours après pour lui faire part de la chose. Une fois ma lettre terminée, je me suis dit que je passerais avant mon cours par le bureau de poste de l'Uqam pour lui envoyer ; on devait bien offrir ce service quelque part sur le campus. Je ne m'étais pas trompé, il y avait bel et bien un comptoir postal dans l'université mais il était pas facile à trouver. J'ai dû demander mon chemin plusieurs fois avant d'arriver au corridor situé au 2e sous-sol dont on m'avait parlé. On se serait cru dans un film de science-fiction soviétique ou dans une base militaire secrète tant le corridor était long et qu'on y croisait personne. J'en étais même à me demander si j'étais sur le bon chemin; il me paraissait insensé qu'un bureau de poste soit à ce point reculé et difficile d'accès. Mais enfin, après 2-3 minutes à marcher seul - alors que l'Uqam était envahie par des milliers d'étudiants qui se mettaient en route pour leurs cours quelques mètres au-dessus de ma tête - une silhouette est apparue au loin, me donnant à penser que j'allais peut-être dans la bonne direction. Évidemment, plus j'avançais, plus il devenait possible de distinguer les traits de la personne qui marchait vers moi. Je pouvais commencer à déceler qu'il s'agissait d'une fille. Qui avait l'air plutôt jolie. Et dont la démarche me rappelait de plus en plus quelqu'un... Et puis, comme en secondaire 3 lorsque passait devant mon casier un certain visage, mon rythme cardiaque s'est mis à s'accélérer. Je croyais avoir la berlue. La fille dont je ne cessais de me rapprocher ressemblait un peu trop beaucoup à celle à qui je destinais ma lettre... J'ignorais qu'elle étudiait à l'Uquam en même temps que moi avant qu'elle ne se pointe chez nous quelques jours auparavant, et voilà qu'on arrivait simultanément par des chemins opposés devant le bureau de poste encastré à même le mur du corridor où nous nous retrouvions maintenant face à face. J'étais trop sonné. J'ai nerveusement balbutié quelque chose, remis la lettre au préposé (!), et je suis reparti, le pas pressé vers le local où mon cours allait commencer d'une minute à l’autre.</p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:center;">Avouez. Tomber face à face au comptoir postal avec la destinataire de votre lettre à laquelle vous pensez depuis plusieurs jours (la lettre et la destinataire), dans un endroit dont vous ignoriez l'existence une heure auparavant; les chances que cela se produise sont plus qu’improbables. Il faut dire aussi que la mise en scène de cette synchronicité - le long corridor souterrain, le fait qu'il était désert alors que l’université était pleine à craquer, qu’on s’y soit rencontrés en marchant l’un vers l’autre en direction opposée -, tout ça ajoutait à la séquence un côté très cinématographique et encore plus surréel.</p><p style="text-align:center;">Et plus de 25 ans après cet épisode, une cascade de petites synchronicités qui impliqueraient à nouveau cette fille allait se mettre en branle, pour culminer sur une autre synchronicité - cette fois sans elle - , mais du même acabit que celle que je viens de relater. </p><p style="text-align:center;"> </p><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="o5FPPoLqkCk" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/o5FPPoLqkCk?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div><p> </p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:center;">J’avais depuis peu retracé Dominique sur Facebook. Dominique, c’est le prénom de la fille avec qui il est arrivé la synchronicité décrite un peu plus haut. Je venais de me familiariser avec le concept de <i>Jung</i> et j’étais curieux d’avoir son avis sur la question, et de savoir comment elle se souvenait de cet événement. Elle s'en rappelait très bien et avait même gardé la lettre. Comme nous étions maintenant devenus amis sur Facebook, il arrivait de temps à autres que nous commentions les posts qu'elle ou moi affichions sur nos murs respectifs. L'hiver et le printemps passèrent et vers la fin de l'été, notre correspondance épisodique prit une drôle de tournure; une suite de commentaires et de réponses échangés tard dans la nuit qui tournaient autour des <a class="no-pjax" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/7-jesus-de-chardin-et-le-relatif-deficit-d-empathie-de-patrick-lagace" target="_blank" data-link-type="url" contents="réseaux sociaux, l’évolution et Patrick Lagacé">réseaux sociaux, l’évolution et Patrick Lagacé</a> (!) trouvèrent un drôle d'écho le lendemain matin dans <a class="no-pjax" href="https://www.lapresse.ca/actualites/201908/06/01-5236502-de-la-caverne-au-volant.php?fbclid=IwAR2tpEI01sOhJUxxdMivojUqsy9EJPFGure1oHgND2ed2zWOY9OzMGhJaMo" target="_blank" data-link-type="url" contents="une chronique de Patrick Lagacé qui causait justement de réseaux sociaux sous l’angle de l’évolution">une chronique de Patrick Lagacé qui causait justement de réseaux sociaux sous l’angle de l’évolution</a>! Puis quelques jours plus tard, la chroniqueuse culturelle de la toute nouvelle émission radiophonique du retour à la maison de… Patrick Lagacé - encore lui - insisterait pour m’interviewer (ma copine et moi pour être plus précis) tandis qu’elle assistait à un <a class="no-pjax" href="https://www.youtube.com/watch?time_continue=5&v=C0UFYA4q1qM&feature=emb_logo" target="_blank" data-link-type="url" contents="Choeur d’un Soir au Tavernä">Choeur d’un Soir au Tavernä</a> dans le cadre d’un documentaire sur les chorales. Et pour terminer le tout, je tomberais environ une semaine plus tard sur Dominique dans une file à l’épicerie. Cela devait faire 20 ans que je ne l’avais pas croisée. Ça commençait à faire beaucoup de hasards tout d’un coup. Et ça ne s’arrêterait pas là. </p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:center;">2 semaines plus tard, je reçus un couple d’amis pour le souper. La soirée avait été particulièrement intense. Alors que je décantais le tout en picossant le restant d’une salade de haricots dans un bol avec une fourchette, mon regard s’arrêta sur une photographie qui était aimantée sur la porte du frigo. Cette photographie réveilla chez moi une grande tristesse étant donné la situation mouvementée que je vivais alors. À travers les haut-parleurs, <i>Listen to what the man said</i> de McCartney en était à ses dernières notes et laissait graduellement la place à <a class="no-pjax" href="https://www.youtube.com/watch?v=B2PK-jaQJQ4" target="_blank" data-link-type="url" contents="Lonely old people de McCartney ">Treat her gently (Lonely old people)</a>, amplifiant du même coup mon émotion. C’est vraiment une pièce magnifique, méconnue mais très poignante. Des larmes avaient commencé à couler sur mes joues et des vagues de sanglots me secouaient. Ne voulant pas que mes filles me surprennent dans cet état, je me dirigeai dans mon bureau où je me laissai aller sans retenue. Je revins dans la cuisine une fois mon chagrin épuisé, et la forte envie d’écouter une chanson en particulier, <i>4 seasons in 1 day</i> de <i>Crowded House</i>, me prit. Alors que ma plus jeune fille sortait de la salle de bain, j’insistai pour qu’elle reste avec moi et entende cette magnifique chanson. </p><p style="text-align:center;"><a class="no-pjax" href="https://www.youtube.com/watch?v=si3dBlNdifE" target="_blank" data-link-type="url" contents="« Blood dries up Like rain, like rain Fills my cup Like four seasons in one day » ">« Blood dries up </a><br><a class="no-pjax" href="https://www.youtube.com/watch?v=si3dBlNdifE" target="_blank" data-link-type="url" contents="« Blood dries up Like rain, like rain Fills my cup Like four seasons in one day » ">Like rain, like rain </a><br><a class="no-pjax" href="https://www.youtube.com/watch?v=si3dBlNdifE" target="_blank" data-link-type="url" contents="« Blood dries up Like rain, like rain Fills my cup Like four seasons in one day » ">Fills my cup </a><br><a class="no-pjax" href="https://www.youtube.com/watch?v=si3dBlNdifE" target="_blank" data-link-type="url" contents="« Blood dries up Like rain, like rain Fills my cup Like four seasons in one day » ">Like four seasons in one day » </a></p><p style="text-align:center;">Une fois le premier refrain terminé, elle me regarda et me lança: « Wow papa! C’est don’ ben beau cette chanson-là! ». Elle insista pour que je la lui montre à la guitare le soir même, et dès le lendemain, elle arriverait à la chanter en s’accompagnant. Jusqu'ici, rien d'anormal à signaler.</p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:center;">J’habite tout près de la piste cyclable qui longe le chemin de fer sur des Carrières. Je la fréquente souvent le soir pour y jogger ou juste m'y promener, ce que je fis le surlendemain du souper évoqué plus haut, afin de méditer sur la source de la peine qui m’habitait depuis plusieurs jours, espaçant de temps à autres<i> </i>mes pensées en me chantant à voix basse<i> 4 seasons in 1 day </i>qui ne me quittait plus depuis. Alors que j’étais sur le chemin du retour, j'aperçus un couple qui se dirigeait dans ma direction. Mi-punk mi-grundge, tous deux le visage caché par un capuchon, ils marchaient en silence, à côté d’un vélo sur lequel était accroché un sac à dos qui contenait un petit radio ou quelque chose du genre. Plus je me rapprochais d'eux, plus j'arrivais à discerner la musique qu'ils écoutaient. Un beat programmé ponctuait les mesures, accompagné par un piano et des "ah-ah-ah-ah" samplés, le tout formant un motif sur lequel une voix féminine enchainait un air et des paroles qui me devenaient de plus en plus familiers... <strong>"...like rain, like ra-ai-ain, fills my cup... ah-ah-ah... like 4 seasons in 1 day"</strong>. J'étais sûrement entrain d'halluciner. Il faut dire que je ne dormais pas très bien depuis quelques jours, peut-être que ce que je venais d'inhaler pour m'aider à m'endormir m'avait fait imaginer des choses..? À moins que le couple avait ensemble un projet musical et qu'ils écoutaient la reprise inédite de cette chanson qu'ils venaient d'enregistrer (même si ça ne cadrait pas vraiment avec leur look...)? Ou bien la fille était télépathe - rendu là - et avait décidé de s'amuser à mes dépens en ajoutant sa voix sur un beat? Ou encore plus plausible: Je devenais fou et parano? Je commençais à envisager sérieusement cette option tellement il m'apparaissait insensé que parmi les millions de chansons composées et enregistrées depuis que le monde est monde, ce soit celle-là qui résonne à travers le sac à dos des deux piétons qui venaient à ma rencontre. On comprendra j'espère l'ampleur de ma stupeur; on parle ici d'une chanson que ma propre fille était entrain de jouer à la guitare avant que je ne sorte de l'appartement pour aller prendre cette marche. De la même chanson que j'avais désiré écouter pour me consoler 2 jours auparavant. Et la même que je me chantais épisodiquement depuis la <strong>dernière heure</strong>..! Ce n'était pas non plus comme si<i> </i>ça<i> </i>avait été un gros hit qu'on avait entendu souvent à la radio; <i>Crowded House </i>ont quand même eu plusieurs succès qui ont connu une diffusion beaucoup plus large que cette ballade sortie en 1991. Anyway... Éberlué, je continuai de tendre attentivement l’oreille tout en faisant un pas de côté dans la rue, le trottoir n'étant pas assez large pour nous laisser passer tous les 3. Je les dépassai tandis que le rythme suivait sa cadence et que la voix séquencée continuait de scander des "ah-ah-ah-ah", mais sans que je ne puisse entendre d'autres paroles ou une mélodie qui puisse m'en apprendre davantage. Je ne savais pas si j'étais déçu ou soulagé... Et pourtant, j'étais convaincu d'avoir bel et bien entendu au minimum la dernière phrase qui conclue le refrain. Ça aurait pas été la première fois que l'univers <a class="no-pjax" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/l-eternite-ne-dure-jamais-longtemps" target="_blank" data-link-type="url" contents="l'univers manque de subtilité en m'envoyant un message">utilise des voies inhabituelles pour m'envoyer un message</a>... J’écrivis tout de suite en arrivant à la maison à mon ami Philippe - véritable encyclopédie musicale - pour savoir s’il connaissait à tout hasard une fille qui aurait repris cette ballade de <i>Crowded House</i>. Il allait me répondre le lendemain avec un lien menant à cette version. J'étais sur le cul, on pouvait entendre à la toute fin le passage qui s'était rendu jusqu'à mes oreilles...</p><p style="text-align:center;"> </p><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="mwm6FfY8feA" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/mwm6FfY8feA?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div><p> </p><p style="text-align:center;">On a beau tourné ça d’un bord comme de l’autre, il faut convenir que cela est au-delà du hasard, que la chance à elle seule ne saurait suffire pour expliquer cette énorme coïncidence. Ce hasard fut certes incroyable, mais quand en plus on tient compte de l'état d'esprit dans lequel j'étais plongé, du trouble qui m'habitait et qui avait motivé ma promenade pour justement mieux y réfléchir, et qu'une charge émotive particulière reliait cette chanson à mon tourment, il est difficile de nier qu'il s'est déroulé à cet instant précis une extraordinaire synchronicité, dont les critères satisfont pleinement la définition que <i>Jung</i> attribue à ce genre de phénomène.</p><p style="text-align:center;">***</p><p style="text-align:center;">P.S. : Ce matin, après avoir terminé la rédaction de ce carnet, j'ai rédigé un courriel intitulé Le Mur du Son pour la Place des Arts afin me plaindre du son auquel j’ai eu droit pendant le spectacle de <i>Charlebois</i> (ils avaient sollicité mon avis par courriel). Et devinez quelle chanson s’est mise à jouer à la radio.!? Ça s'invente pas ça non plus, comme si d'écrire à propos de la synchronicité en avait provoqué des petites...<br><br> </p><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="Mnsva1wwBQ4" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/Mnsva1wwBQ4?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div><p> </p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/59718192019-11-25T01:00:53-05:002023-01-20T00:24:38-05:00#23 Féminisme, Christianisme et Évolution <p style="text-align: center;">J’avoue avoir de la difficulté à me positionner sur le féminisme. Il faut dire que je n’ai pas de misère à trouver dans mon entourage des femmes qui réussissent bien et qui hésiteraient je crois à blâmer leur féminitude pour les obstacles qu’elles ont rencontrés. Il faut aussi reconnaitre que beaucoup de chemin a été parcouru au cours des dernières décennies et que la condition féminine s’est grandement améliorée, comme en témoigne entre autres depuis peu le fait que la majorité des diplômés issus des cycles d’études secondaire, collégial <a contents="et universitaire sont des femmes" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.cereq.fr/et-les-femmes-devinrent-plus-diplomees-que-les-hommes">et universitaire sont des femmes</a>. C’est un important rattrapage qui continue son cours et qui finira inévitablement par inverser beaucoup de tendances. Ceci étant dit, mes hésitations sur mon positionnement ont beaucoup plus à voir avec le fait que je sois… un homme..! Bête de même. Disons que je ne peux pas parler en toute connaissance de cause. Et de ce que je suis capable d'en déduire - personnellement, empiriquement, ici au Québec - la situation autour de moi me semble plus qu'acceptable; les égarements et le manque de jugement de mes semblables dont on fait état dans les médias ces jours-ci ne semblent pas être un modus operandi que mes amis utilisent. Mais je dois avouer qu’une expérience vécue l’été dernier m’a amené à repenser ma position, ou plutôt mon absence de position sur la question. Peut-être pas sur le féminisme comme tel, mais plutôt sur ce qu’implique d’être une femme, sur les réflexes, les habitudes inconscientes et bien ancrées qui régissent les rapports entre les 2 sexes. J’ai moi-même réalisé la chose seulement plusieurs jours après les événements. Sur le coup, je n’avais rien à redire surtout que ça s’était très bien passé. Je n’avais pas du tout remarqué à quel point j’avais participé d’une manière bien involontaire à l’élaboration d’une scène mille fois répétées… </p>
<p style="text-align: center;">Bien que je sois co-fondateur de la chorale <a contents="Choeur de Loups" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.choeurdeloups.com/" target="_blank">Choeur de Loups</a>, celle-ci doit incontestablement son âme et son essor à Marie-Josée Forest. Sans elle, cette emballante aventure n’aurait jamais vu le jour. Ce qui était à la base une idée toute simple - chanter en groupe, sans audition et sans partition, divers hits des années 60-70 et 80 -, cette idée rencontre un franc succès et suscite encore à ce jour <a contents="une joie palpable" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?time_continue=6&v=1mWomKq4g2s&feature=emb_logo" target="_blank">une joie palpable</a> chez tous nos participants. La qualité des harmonies et des arrangements à 3 voix que nous finissons immanquablement par maitriser à la fin de chaque séance ne cesse de m’étonner. Bref, le mot s’est passé et est parvenu au mois d’août dernier jusqu’aux oreilles de l’équipe de l’émission radiophonique du matin de Stéphan Bureau qui préparait un segment sur les bienfaits de chanter en groupe. On nous a invité Marie-Josée, moi et une choriste à se joindre à un spécialiste sur la question afin <a contents="de témoigner et d’échanger sur le sujet" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/bien-entendu/segments/panel/128466/chant-choral-magie-fortier-forest-richer" target="_blank">de témoigner et d’échanger sur le sujet</a>.</p>
<p style="text-align: center;"><img src="//d10j3mvrs1suex.cloudfront.net/u/277019/067559bfef0239663a3d2b5a63e107f5b15795da/original/capture-d-e-cran-le-2019-11-26-a-01-50-55.png/!!/b:W10=.png" class="size_l justify_center border_" /></p>
<p style="text-align: center;">Une autre émission nous ferait la même demande quelques jours après. Et dans les 2 cas, le même phénomène s’est produit : les animateurs prirent pour acquis que j’étais le directeur de la chorale..! Cela était d’autant plus surprenant que rien sur le site, ni dans les questions des recherchistes, pouvaient laisser penser que c’était le cas. Il est même bel et bien stipulé que c’est Marie-Josée la cheffe de choeur. J’aurais dû sur le coup reprendre les animateurs mais pour une raison qui m’échappe, je ne l’ai pas fait, préférant passer par-dessus la méprise et répondre sans détour aux questions, questions qui m’étaient d’ailleurs dirigées plus souvent qu’à mon tour. Marie-Josée a fini par rectifier, avec humour et en douceur, mais ce n’est que 2-3 jours après que j’ai réalisé qu’un sexisme subtil et inconscient avait probablement influencé le comportement de tous et chacun… et que si dans un contexte détendu - un studio de radio où il est simplement question d’échanger sur les bienfaits de la musique - qu’en est-il lorsqu’on évolue dans un milieu de travail où la compétition entre collègues entre souvent en jeu..? Je me posais une question qui ne m’était jamais vraiment venue à l’esprit, je dois l’avouer. </p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">Il peut être hasardeux de mêler évolution, histoire et sociologie. Et comme séparer la culture de la biologie devient une tâche impossible quant on se penche sur l’évolution au sens large de l’Homo Sapiens, il est difficile de prouver hors de tout doute que tel ou tel trait culturel est effectivement un processus évolutif que l’espèce a adopté afin de favoriser sa survie. N’étant pas un spécialiste de la question, je ne me prononcerai pas sur la chose si ce n’est pour dire qu’il serait dans notre intérêt de comprendre qu’il y a en jeu des processus évolutifs qui nous dépassent, et qu’au delà des nombreux drames individuels qu’impliquent les rapports hommes-femmes et la vie en société en général ( violence conjugale, suicide, etc. ), ceux-ci sont fortement influencé par des mécanismes qui ont leur logique propre. Il ne s'agit pas d'excuser qui que ce soit mais de mieux cerner d'où viennent nos patterns, de prendre en compte qu'ils ont souvent une origine très lointaine. Bien entendu, l'Homo Sapiens a la capacité de modifier plus que toute autre espèce son destin mais celui-ci demeure toutefois fortement influencé par des lois naturelles, évolutives, qui sont beaucoup plus présentes et puissantes qu'on ne l'imagine. D’en prendre plus conscience éviterait de polariser les positions et de braquer davantage ceux qui en débattent. Il est également intéressant de noter que d’un point de vue strictement évolutionaire, les femmes ne sont pas que perdantes quand on considère que les stratégies mises en place par la Nature les favorise systématiquement en ce qui concerne l’espérance de vie.</p>
<p style="text-align: center;">***</p>
<p style="text-align: center;">On l’oublie souvent mais nous vivons dans un confort que nos ancêtres n’auraient même pas pu imaginer quand on pense aux conditions qu’ils devaient affronter il y a pas si longtemps. Et jusqu’à récemment, que l’on soit homme ou femme ne changeait pas grand chose à l’issue, il y avait de fortes chances que vous mourriez avant 40 ans ; votre vie miséreuse vous aurait usé beaucoup plus rapidement qu’aujourd’hui. C’était aussi un monde où la violence était omniprésente si on compare avec aujourd’hui. Autant au quotidien; les moeurs, la justice et le droit se sont beaucoup raffinés depuis, qu’en temps de guerre; beaucoup plus fréquent, il va s’en dire. On ne s’étonnera pas qu’avec ces conditions, le christianisme ait à ce point foisonné. L’idée d’un dieu qui s’incarne afin de prendre sur lui les péchés du monde, souffrir dans sa chair pour sauver l’humanité, ce récit devait avoir une résonance dont plusieurs dimensions doivent forcément nous échapper aujourd’hui. Mais bien que les éprouvantes conditions de vie des siècles précédents soient choses du passé pour nombre d’entre nous, il semble qu’une importante souffrance psychologique ait pris le relais. Je ne pense pas pour autant que l’on doit s’attendre à une résurgence du christianisme, mais l’étonnante conclusion - mystique à souhait - du dernier Houellebecq peut laisser penser qu’il y a peut-être encore un peu d'espoir en Occident pour cette religion. Il est facile d’imaginer que d’autres puissent imiter le personnage central de Sérétonine qui, en proie à une lente agonie psychique, s’en remet au Christ. Ce ne serait pas la première fois <a contents="que l’intuition de Houellebecq s’avère juste." data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.lepoint.fr/culture/michel-houellebecq-ecrivain-visionnaire-04-01-2019-2283286_3.php" target="_blank">que l’intuition de Houellebecq s’avère juste.</a> Et que dire de la conversion de Kanye West et des millions de fans qui adhèrent à son message et son gosp/hop inspiré..! Il y aurait évidemment plein de choses à dire sur le rôle des femmes dans l’Évangile - on peut quand même facilement trouver des passages où Jésus apparait comme féministe avant l’heure, c'est à des femmes qu'il décide d'apparaitre en premier après sa résurrection - contrastant en cela avec la manière dont l’Église les a injustement traité. </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="2S0N6vRYcTk" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/2S0N6vRYcTk/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/2S0N6vRYcTk?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Je m’égare un peu mais il m’arrive de penser que le christianisme, tel un fruit, a en mourant su semer les graines de son idéal, que son message de base, "Aimez-vous les uns les autres", a fini par laisser une marque durable, même si cette religion a aussi motivé bien des actions contraire à ce qu'elle prêchait. Certains ajouteront que contrairement au Judaïsme et à l'Islam, le monothéisme chrétien a favorisé sur le long terme la séparation de l'Église d'avec l'état. Des phrases comme "Mon royaume n'est pas de ce monde" ou "Rendez à César ce qui appartient à César" sont en porte-à-faux avec la tradition juive et le Coran qui dictent dans le détail la conduite de ses fidèles dans la vie quotidienne. Le christianisme à cet égard est pas mal plus slack. Et Jésus s'est d'ailleurs attiré les foudres du clergé de l'époque entre autres parce qu'il n'observait pas le sabbat. Il référait souvent à l'esprit de la Loi et affirmait que les rites étaient en soi vides si on les accomplissait seulement pour les accomplir... Il y aurait beaucoup à dire sur la religion du point de vue de l'évolution. Et contrairement à ce que <a contents="Richard Dawkins avance" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=6u8gAV7om_g" style="" target="_blank">Richard Dawkins avance,</a> la religion serait bien plus qu'un "mind virus", elle a toute les caractéristiques d'un trait évolutif qui favoriserait la survie de l'espèce. Le contraire irait à l'encontre même de la logique évolutive quand on y pense! Pour ceux que ça intéresse, le vidéo qui termine le texte - où il est question d'un débat entre Dawkins et Bret Weinstein - parle de ce sujet ( à partir de 3:30). Bref, corrolation is not causation mais il est difficile de ne pas faire de liens entre l'Occident, le Christianisme et les Droits de l'Homme. Et c’est justement parce que ces principes d’égalité sont maintenant inscrits au coeur des sociétés occidentales qu'il m'est d'avis que le futur, pour le mieux-être de tous, s’écrira de plus en plus au féminin.</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="rm8FksjlJtM" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/rm8FksjlJtM/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/rm8FksjlJtM?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/57635452019-05-22T00:56:32-04:002020-07-29T18:11:01-04:00#22 Une nouvelle sorte de musique <p style="text-align: center;">La raison pour laquelle je suis musicien a beaucoup à voir avec cette veillée passée dans un petit shack sur le bord d'un lac durant l'été de mes 14 ans. Le fils d'un ami de mon père avait sorti sa 12 cordes et nous avions chanté toute la soirée. Bien que nous écoutions souvent de la musique à la maison et que mon père aimait beaucoup chanter - ce qu'il faisait très bien, bien mieux que moi! - je n'avais jamais entendu d'aussi proche avant ce soir-là un musicien jouer de son instrument, d'une manière aussi naturelle et ludique; il avait carrément fait lever la place. L'atmosphère était électrique, tout le monde s'époumonait, faisait des harmonies et lâchait son fou. Ça avait été magique. Je me souviens d'avoir été particulièrement frappé par l'effet que provoquait l'arrêt d'une chanson lorsque le guitariste ne se souvenait plus d'un accord et le cherchait. Le temps s'arrêtait, littéralement. Je me souviens aussi d'avoir fortement ressenti que la musique était quelque chose qui faisait du sens, qui dévoilait une vérité, évidente et à la fois cachée, mais dont l'essence touchait à... l'essentiel, comme si la musique transportait au delà de ses sons et de ses mélodies un secret ineffable. Bref, son mystérieux et puissant pouvoir m'avait ensorcelé. Je me rappelle que c'est après cette soirée-là, le lendemain sur la route en revenant du chalet que j'ai demandé à mon père si je pouvais avoir une guitare.</p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;">Ça a peut-être à voir avec le fait que je n’ai pas de cell mais j’ai très mal négocié le virage numérique. Et ce n’est pas le musicien qui parle ici mais le fan de musique. Quand on a quitté notre appartement dans Villeray pour acheter un condo dans Rosemont il y a 7 ans de cela, je me suis départi de tous mes cds. Pour gagner de l’espace, j’avais décidé de les transférer dans mon Mac croyant que cela ne ferait aucun différence. Mais ça en fit toute une : j’ai pratiquement arrêter d’écouter de la musique. Et Dieu qu’elle m’a manqué. J’ai consigné quelque part la suite d’événements heureux et improbables que le début de l’année m’a réservée - 2019 a vraiment commencé en lion ! - mais je réalise que j’avais oublié dans ma liste le retour de la musique. Je me suis mis tout simplement à racheter des cds. Au diable la dépense - au moins ils ne sont plus rendus chers - le retour sur l’investissement en vaut largement la chandelle, ne serait-ce que pour l’envie de danser et de chanter que la musique me procure à nouveau, ou tout simplement la joie que son écoute attentive m'apporte. Mais c’est aussi d’en faire, en jouant « live » avec un groupe - un gros groupe, une chorale de 60 personnes - qui m’a pour ainsi dire reconnecté avec son étonnant pouvoir. </p>
<p style="text-align: center;">J’ai exploré dans <a contents="ce carnet" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/12-l-affaire-avec-la-musique-et-l-infame-jordan-peterson" target="_blank">ce carnet</a> quelques-unes des raisons qui expliqueraient le pouvoir de la musique, pouvoir qui je crois repose en grande partie sur le fait que la musique sait susciter non seulement de l’émotion mais aussi, tel que mentionné en introduction, du sens … et cela sans qu’aucun mot n’ait besoin d’être prononcé il va sans dire. La musique est un étrange carrefour dans lequel vibrent d’apaisantes et réjouissantes harmonies, comme si le divin - appelons ici divin la "chose" immanente et incréée qui fait qu’il y a bel et bien quelque chose au lieu de rien, et qu'on puisse en plus le constater, et en parler. On s'est habitué mais c'est pas banal pour autant... - donc comme si le divin arrivait à se manifester malgré notre entendement limité et notre incapacité à comprendre pleinement d’où nous venons vraiment. La musique agirait ainsi comme un phare, un signal qui émanerait à partir de simples vibrations, organisées selon des principes mathématiques simples - rythmiques et harmoniques - et qui nous transmettraient quelque chose d’intelligible, d’esthétique et de bel et bien réel malgré son caractère évanescent, tel un récit duquel on ne saurait dire exactement ce qu'il a exprimé mais dont on ne pourrait nier le déroulement et l’émotion qu’il suscite.</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="xXEHIHtMFL0" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/xXEHIHtMFL0/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/xXEHIHtMFL0?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Avec plus d'envergure, on peut entendre dans le vidéo ci-dessus un prfesseur de psychologie, Jordan Peterson, résumer parfaitement l’essence de ce que j’essaye d'exprimer. Et s’il est aujourd’hui connu pour d’autres raisons, c’est bien parce que je cherchais à entendre ce que d’autres personnes avaient à dire sur cette hypothèse - si je me souviens bien, j'avais tapé les mots "meaning of music" pour lancer ma recherche - que je suis tombé pour la première fois sur lui. Je prends le temps de le mentionner car on aime beaucoup caricaturer sa pensée et on aurait tort de penser que par conséquent il ne dit rien de censé... La démonstration qu'il fait du caractère transcendantal de la musique - transcendantal en ce sens que le langage n'est pas capable de rendre réellement compte de la manière dont nous ressentons l'expérience musicale - sa démonstration est très éloquente je trouve. Mais bon, ce n’est pas tant de cela que j’aimerais causer que des transformations qu’a subies la façon dont nous produisons, écoutons et consommons la musique, et du possible lien qu’il y a à faire avec ce que j’ai énoncé en introduction.</p>
<p style="text-align: center;">On le répète beaucoup, l'industrie musicale est en crise. Et cela fait plusieurs années que cette idée me taraude : et si c’était la musique elle-même qui en avait marre du star-system, de sa confiscation par l’industrie et qui aspirerait à revenir à quelque chose de plus global, intégral, inclusif, de plus direct..? Rassurez-vous, je ne dis pas que la musique ait conscience de quoi que ce soit mais comme n'importe quel système qui se constitue, le potentialité de son anti-thèse n'a d'autres choix que de devenir une possibilité. Autrement dit, notre relation avec la musique n'a pas besoin de rester la même. Lorsqu’on demeure strictement spectateur ou auditeur, aussi plaisante soit-elle, cette expérience n’atteint pas le potentiel optimal qui pourrait advenir si celui qui écoute devenait également un performer, prenait part au spectacle et devenait pourquoi pas co-créateur d’une oeuvre en devenir ? En d’autres mots, pourquoi ne pas abolir la frontière entre la scène et le spectateur, pourquoi ne pas transformer l’auditoire et les musiciens en un seul et même band ? J'adore travailler avec mon ordi et en studio, jouer de la guitare, de la basse, du clavier, chanter, trouver des arrangements ; bref tout le processus et la collaboration qui vient avec. Mais cette façon de travailler la musique est pour moi d'une nature très différente que ce que je propose ici. Cela fait maintenant plusieurs années que je jam avec des amis, et cette idée est d'abord née du plaisir d'être connecté plus directement à la musique, d'une manière plus spontanée, dans une posture un peu plus groovy et moins mélancolique que mes propositions chansonnières précédentes.</p>
<p style="text-align: center;">À la manière d’un processus évolutif, je suis convaincu que depuis les années 1950, l’engouement, pour ne pas dire l’ensorcellement, provoqué par la musique chez la jeunesse et la population en général a eu pour effet de développer et améliorer l’oreille d’un nombre significatif d’individus qui, à force d’écouter et de chanter les chansons préférées des artistes qu’ils aiment, ont fini par atteindre un standard fort respectable. J’en ai pour preuve la chorale que j’accompagne à chaque semaine et qui réussit à la fin de chaque soirée à monter à l'oreille et sans partition un arrangement vocal à 3 voix ( 3 harmonies différentes ; basse, alto et soprano ) avec une qualité impressionnante et ce, même si la majorité chantait en groupe pour la première fois de leur vie. Et tous sont unanimes, le plaisir ressenti, le bien-être qui en découle est immensément bénéfique. Normal, nous vibrons littéralement tous en harmonie. C’est là un des grands pouvoirs de la musique qui, lorsqu’expérimenté simultanément en grand nombre, amène une joie réelle et palpable, qui unifie et laisse derrière tous ce qui pourrait nous diviser. Il y a là je crois un véritable potentiel thérapeutique, libérateur qui reste à exploiter et explorer et dont la nécessité est plus que jamais pertinente étant donné la drôle d’époque qui s’est amorcée avec la révolution numérique et ses réseaux sociaux et les effets divisifs que cela entraine. Et je ne parle pas ici de reprendre en choeur des vieux succès - ce que j'adore faire avec <a contents="Choeur de Loups" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=J0XVlcpyq8w" target="_blank">Choeur de Loups</a> - mais plutôt d’improviser, sous la direction d’un chef de choeur, des motifs mélodiques et de les superposer sur des riffs que joueront des musiciens. Ces derniers auront des blocs musicaux déterminés mais dont la durée et l’intensité varieront et sur lesquels divers improvisateurs - cuivres, guitares, claviers, accordéons, name it… - pourront avec le choeur y aller d’une envolée et se joindre aux voix qui se mêleront.</p>
<p style="text-align: center;">Bien sûr, cela ressemble aux cercles de chant ( circle songs ) qu’anime Bobby McFerrin, à la différence qu’ici, tout le monde est convié, pas besoin de préalablement faire partie d’une chorale ou de prétendre savoir chanter. Aussi, il n'y aurait pour ainsi dire aucun spectateur, tous seraient invités à participer. L’accompagnement par une section rythmique et harmonique viendrait aussi varier, épicer un peu plus la formule de McFerrin qui, à ce que j’en sache, reste essentiellement vocale. <br><br><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="3luvwyfpcDM" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/3luvwyfpcDM/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/3luvwyfpcDM?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Se sortir de la société du spectacle, s’affranchir de la relation auditeur/performer, jouer différemment avec la musique, essayer d'y insuffler un nouveau sens, voilà quelques-uns des impacts que cette façon de jouer ensemble pourrait amener, en plus d’abolir - le temps d’une, 5 ou 12 « chansons » - nos différences, et ce faisant, se sortir du virtuel, communier un peu + dans le réel.</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/57410502019-05-02T22:14:39-04:002020-02-16T16:14:45-05:00#21 On s'habitue<p style="text-align: center;">Premier extrait d’un E.P. qui sortira à l’automne, On s’habitue est une vieille chanson, composée probablement en 2004 alors que l’enregistrement et le mix de mon album Variations sur le Vide était pour ainsi dire terminé. Je me souviens qu’elle m’était venue plutôt facilement, suite à une dispute que j’avais eu avec ma blonde qu’on entend d’ailleurs chanter avec moi sur la chanson. Ce n’est plus le cas aujourd’hui mais à l’époque Marie-Josée pouvait piquer des crises de jalousie qui ne rendaient pas toujours facile notre cohabitation. De là avait surgi le « on s’habitue » - ça n’était pas sa première crise - et le « mais jamais tout à fait à nous » du refrain qui faisait référence au fait que malgré que cet élan de jalousie soit irraisonné, il était plus fort qu’elle, elle n’arrivait pas à le retenir…</p>
<p style="text-align: center;"> Je l’ai reprise en 2011 - avec un nouveau bridge et une fin différente - mais la direction générale qu’avait suggéré mon réalisateur à l’époque l’avait un peu dénaturé. Faut dire aussi l’album s’était fait dans un contexte qui devenait de plus en plus tendu, et que j’avais fini par rapatrié les pistes sur mon ordi et décidé de terminé seul le projet avec le logiciel Garage Band que je ne maitrisais pas très bien à l'époque. L’aventure m’avait lentement mais sûrement dissuadé de continuer à enregistrer d,autres chansons, jusqu’à ce que mon ancien coloc, le batteur Marc Chartrain, me sorte de ma tanière et m’invite au studio B-12 pour enregistrer J’abandonne et 2 autres pièces qui finiront par aboutir sur un E.P. sorti en 2018 avec le label L-A Be. À moins d’être un abonné de Sirius ou un auditeur des émissions musicales de Radio-Canada, vous n’aurez pas entendu grand-chose de ce E.P. J’ignorais moi-même qu’elles avaient tourné à ce point sur ces chaines et de l’apprendre a encouragé mon ami et partenaire Jean-Sébastien Brault-Labbé à me prêter main forte et m’épauler dans l’enregistrement d’un 2e E.P. prévu pour cet automne. Sur Le Bleu du Feu, notre propre label à part de ça ; )</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="kestFQg4-YQ" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/kestFQg4-YQ/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/kestFQg4-YQ?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Certains se rappelleront peut-être que j'avais dit que je tirais la plogue sur la chanson. C'est plus tout à fait le cas comme on peut le voir mais j'ai d'autres projets en gestation, dont celui de transformer l'audience et les musiciens en un seul gros band où tout le monde participerait. La mise sur pied de la chorale <a contents="Choeur de Loups" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.choeurdeloups.com/" target="_blank">Choeur de Loups</a> que ma blonde dirige depuis l'automne 2018 et que j'accompagne à la guitare - une chorale sans partition où tout l'monde est bienvenu - me confirme que mon projet n'est pas si fou que cela même s'il implique une grande part d'improvisation. On s'en reparle..! Bonne écoute d'ici-là!</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/56321272019-02-07T13:28:54-05:002023-02-18T23:31:54-05:00#20 Le Géant Ferré ou l’étonnante vertu pédagogique des rêves <p style="text-align:center;">J’ai le sommeil léger ces temps-ci et il m’arrive souvent de me réveiller aux aurores. Je réussis la plupart du temps à me rendormir, avec la conséquence suivante : Je me souviens souvent de mes rêves. Des rêves intenses, bizarres et colorés et qui me paraissent très réels. J’ignore si j’en fais du même genre lorsque je dors des nuits normales de 7-8 heures et que je ne m’en rappelle tout simplement plus à mon réveil, mais par 2 fois ces dernières semaines j’ai été à même de constater que rêver peut être une façon de résoudre des problèmes subtils, camouflés parmi un lot d’informations dont la nature ne parait pas nécessairement problématique au premier abord. Comme si rêver avait pour fonction de mettre la lumière sur des trucs qui nous échappent, et qu’à travers un récit décousu et farfelu, notre subconscient arrivait à mettre en place les morceaux manquants du puzzle. </p><p style="text-align:center;">Je n’entrerai pas dans les détails, ce serait trop long et trop technique, mais je correspond beaucoup en anglais ces derniers jours. Je me considère pas mal bilingue, assez pour écouter n’importe quel exposé sur Youtube, même s’il s’agit d’un sujet pointu. Même chose pour un film ou une série sur Netflix. Et je suis aussi assez à l’aise à l’écrit. Mais une subtilité m’a échappé lors d’un échange, et le fait d’avoir mal compris une seule phrase avait embrouillé le reste de la conversation. Et plusieurs échanges subséquents. Par exemple « Et que je sois venu pour te voir au moins une fois » ne signifie pas exactement la même chose que « Et je suis venu pour te voir au moins une fois ». La première phrase peut être comprise comme s’il s’agissait d’un souhait, de quelque chose qui n’est pas encore accompli alors que la deuxième fait état d’une action qui a vraiment eu lieu. Mais comme en anglais le subjonctif n’existe pas, on utilisera le passé avec l’aide d’un auxiliaire, et grâce au contexte on devrait pouvoir comprendre qu’une intention est exprimée ( « And I have come to see you at least once » ). En français, le mode subjonctif est justement là pour mettre l’emphase sur la potentialité, pour indiquer que l’action ne s’est pas nécessairement produite même si elle est désirée. Ne décelant donc pas de trace de subjonctif dans la phrase de l’échange mentionné plus haut, je l’ai comprise comme s’il s’agissait d’un acte déjà accompli et non pas comme une intention. Erreur… dont je me suis rendu compte après avoir fait un bien étrange rêve. L’erreur ne m’a pas été révélée comme telle pendant mon songe, mais pour une raison mystérieuse, dès mon réveil, j’ai su que j’avais mal interprété la phrase en question et que cela avait influencé le restant de la conversation d’une drôle de façon, chose dont je me doutais vaguement car j’avais tout de même émis l’hypothèse qu’il y avait peut-être quelque chose qui m’échappait… </p><p style="text-align:center;">Dans mon rêve, j’étais à Lhassa, capitale du Tibet, où j’entrais dans un temple avec un ami d’enfance. Comme celui-ci travaille à l’étranger dans différents pays, il était tout à fait normal qu’il connaisse la Grande Prêtresse de l’endroit, et dont l’accent révélait à ma grande surprise qu’elle était Québécoise. Elle nous salua lorsqu’elle nous aperçut et mon ami partit la rejoindre près de l’autel, en montant les 3-4 marches qui les séparaient. Je voulus le suivre mais alors que j’arrivai près des marches, 2 géants et horribles pugs surgirent et se mirent à me grogner après, de manière très agressive, à 2 pouces de mon visage et de ma gorge. Celui qui était tout près de ma gorge m’inquiétait particulièrement. Un coup de gueule et j’étais fait. J’essayais de garder mon sang-froid, en contrôlant ma respiration, car plus je laissais paraitre ma nervosité, plus les chiens s’énervaient. C’était pas cool… Le reste est flou, je me suis retrouvé à l’étage supérieur, avec des moines évachés par terre et qui avaient l’air d’être pas pire lendemain de veille… Ce sont sur ces images que mon rêve se termina. Et c’est quelques minutes après m’être réveillé - alors que je vérifiais mes courriels sur mon portable - que mon rêve me revint et que ma méprise de la veille m’apparût évidente : La phrase aurait été en mode subjonctif si elle avait été écrite en français..! Du coup, tout le reste s’éclaira de lui-même. Du moins, je le croyais. </p><p style="text-align:center;"> </p><div class="video-container size_null justify_inline" style=""><iframe data-video-type="youtube" data-video-id="N-rljDNn-V4" data-video-thumb-url="" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/N-rljDNn-V4?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" allowfullscreen="true"></iframe></div><p> </p><p style="text-align:center;">Car un autre malentendu, encore plus ancien que le précédent plombait depuis le début toute la conversation. J’avais exagéré l’ampleur d’un détail auquel mon interlocuteur accordait tout de même beaucoup d’importance. Et encore une fois, je réalisai l’étendue de ma confusion après avoir fait un autre rêve.</p><p style="text-align:center;">Je suis chez nous, sur une île grecque. J’habite une vaste villa, très dépouillée, en pierre blanche. Mon ami David - le même qu’à Lhassa - me dit qu’il doit s’en aller. Au même moment, on cogne à la porte. Je vais ouvrir et c’est le <a class="no-pjax" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Andr%C3%A9_The_Giant" target="_blank" data-link-type="url" contents="Géant Ferré">Géant Ferré</a> qui est là et qui m’annonce qu’il s’en vient souper chez nous. Je suis très perplexe car non seulement je ne l’ai pas invité, je ne comprends pas qu’il soit si familier avec moi, comme s’il me connaissait depuis longtemps. Je ne veux pas le froisser et tente de lui expliquer que c’est la première fois que l’on se parle mais il part à rire en me traitant de sacré farceur. Comme il est très sympathique, je l’invite à entrer, en me disant que ce souper risque de ne pas être banal. Le seul problème est que le garde-manger et le frigo sont vides. Je dis alors à André de m’attendre le temps que j’aille au marché acheter des victuailles. Le marché est situé en plein centre de l’île, en son sommet - avec une pente qui n’est pas très élevée - sous une coupole blanche. Comme l’île n’est pas très grande, je m’y rends rapidement et achète ce dont j’ai besoin pour cuisiner. Mais lorsque j’en ressors par la porte donnant sur le nord, je ne reconnais pas mon chemin. Je retourne alors dans le marché et sors par la le côté ouest mais il se produit la même chose, le chemin ne me dit rien. Même résultat avec les portes sud et est. Ma villa n’était pourtant pas loin mais pour une raison que j’ignorais, les chemins étroits et sinueux qui apparaissaient lorsque j’ouvrais les portes - en même temps que la mer au loin - m’étaient inconnus et je ne savais plus comment retourner chez nous. </p><p style="text-align:center;">Je me réveillai sur cette dernière scène et instantanément, je compris la nature du quiproquo qui s’était installé depuis plusieurs échanges. J’avais saisi de travers une allusion, ou plutôt, j’avais amplifié indûment sa portée. C’était donc pour cela que mon interlocuteur revenait souvent sur le sujet..! Et moi qui renchérissait quant à l’importance de la chose et qui en rajoutait, sans me douter que cela trahissait mon incompréhension… </p><p style="text-align:center;">Si je n’ai pas fait automatiquement de lien entre mon premier rêve et la résolution du problème qui s’ensuivit, il devint évident que le 2e avait pour rôle de m’indiquer mon erreur. J’eus même la sensation étrange de ressentir mon subconscient processer - un peu comme dans La Matrix lorsqu’on voit défiler les 1 et les 0 - lorsque je sortais par les portes et retournais dans le marché, comme si mon cerveau travaillait de paire avec mon subconscient pour que le sens véritable de ce qui m’avait échappé devienne enfin clair… </p><p style="text-align:center;">Je ne crois pas que ce soit là la seule fonction des rêves, certains peuvent avoir ont une portée encore plus… sacrée - ou du moins mystique comme en témoigne mon carnet #3 - mais à l’aulne des expériences récentes que je viens de vivre, il m’est devenu évident que les rêves peuvent vraiment nous révéler des secrets qui nous échappent.</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/54425102018-12-07T03:24:31-05:002023-01-10T01:15:52-05:00 #18 Youtube et le retour du sacré / Les pistes de Peterson et Lupasco<p style="text-align: center;"> </p>
<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><div class="video-container" style="--video-width: 320px"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="nMWHBUTHmf0" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/nMWHBUTHmf0/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/nMWHBUTHmf0?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div></div>
<p> </p>
<p style="text-align: center;">Bien que j'entretienne une fascination pour les années ‘70 - la bande-annonce de The other side of the wind m'a instantanément charmé avec ses couleurs, son grain, son atmosphère, l'innocence sauvage qui s'en dégage... - je suis d'avis que nous vivons à nouveau à une époque fébrile. Le village global annoncé par McLuhan s'est bel et bien constitué et contrairement à l'atmosphère paisible que suggère l'expression, c'est plutôt le contraire qu'elle voulait désigner comme l'atteste son auteur dans le vidéo juste en dessous. Selon la théorie qu’il a formulée dans les années ‘50, la démocratisation des médias électroniques aura pour effet de donner aux politiques identitaires un essor et ce sera la chicane partout dans la cabane... Le village global tel qu'il le concevait n'avait rien d'idyllique et ressemblait plutôt à un village gaulois où on se tape dessus constamment. C'est ce qu'on appelle un prophète ( sauf pour sa lecture du Québec … ).</p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><div class="video-container" style="--video-width: 320px"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="ULI3x8WIxus" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/ULI3x8WIxus/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/ULI3x8WIxus?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div></div>
<p> </p>
<p style="text-align: center;">Mais s'il est vrai que le fond de l'air effraie, et ce pour toutes sortes de raisons, il y a quand même du bon qui ressort de cette frénésie ambiante. Du moins il appert. Mais comme l'humain a tendance à s'intéresser beaucoup + aux choses qui l'inquiètent qu'à celles qui ne l'inquiètent pas, cela force pour ainsi dire les médias à nous servir ce qu'on leur demande. Selon le montréalais <a contents="Steven Pinker" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Steven_Pinker" target="_blank">Steven Pinker</a> - professeur de psychologie au M.I.T. - ce trait proviendrait d'une époque, pas si lointaine, où il était primordial d'être sur ses gardes si l'on voulait survivre. Et cette constante vigilance que nourrissent les médias contribuerait à nous donner l'impression que le monde n'a jamais été aussi mal alors que dans les faits, nous serions dans un âge d'or pour ce qui est de la longévité et le recul de la violence et de la pauvreté*, et ce partout sur la planète, et en dépit des images que l'on voit quotidiennement. Il se produit certes encore des drames à grandes échelles, il ne s'agit pas de le nier mais de prendre acte que parallèlement aux malheurs qui affligent de nombreuses populations, ceux-ci se produisent à une fréquence moindre, et surtout, des progrès durables sont réalisés, notamment en Afrique, en Amérique du sud et en Asie, et que cela ne reçoit pas nécessairement l'attention médiatique qui ferait que l'on pourrait en prendre acte.** </p>
<p style="text-align: center;">Aussi, la multiplication des chaines d'informations en continu participe activement à la propagation du sentiment que tout va mal, phénomène qui se trouve également amplifié par l'apparition du village global comme on l'a vu un peu + haut. En même temps, un autre type d'information qu'a délaissé petit à petit les médias traditionnels émerge du chaos que ce magma de nouvelles perpétuelles alimente. Je parle ici des discussions de fond, des longs échanges, des débats sur des sujets pointus mais essentiels qui, s'ils ont été évacué de l'espace médiatique télévisuel et radiophonique ( à part peut-être chez Marie-Louise Arsenault ), ont pu réapparaitre sur de nouvelles plateformes - principalement Youtube - et rejoindre ainsi un auditoire planétaire. Mais on a beau crouler sous une masse d'informations, celle-ci n'est pas synonyme de sens pour autant. Et ceci ne serait pas étranger, je crois, au fait que le sacré est un sujet qui intéresse pas mal de monde, du moins beaucoup plus que je l'aurais pensé...</p>
<p style="text-align: center;">J'en prends pour exemple l'étonnante popularité de <a contents="Jordan Peterson" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jordan_Peterson" target="_blank">Jordan Peterson</a>, un professeur en psychologie de l'Université de Toronto ( qui comme Pinker, a étudié à McGill ) et qui fait en ce moment fureur sur la videothèque la plus fréquentée de la planète. Ses exposés et ses débats inspirés de son analyse psychologique de la Bible sont regardés par des millions de personnes. Je ne parle pas ici de dévots protestants du Missouri mais d'une multitude de jeunes et de moins jeunes ( comme moi ) qui ne sont pas nécessairement portés sur la religion. Qu'est-ce qui fait que les histoires qu'on raconte dans la Bible ont autant résonné, pourquoi ont-elles pu influencer à ce point l'Occident ? Selon M. Peterson, ce serait parce qu'elles nous révèlent, bien souvent sans qu'on arrive à mettre le doigt dessus, des éléments fondamentaux de notre psyché; consciente et inconsciente, personnelle et collective. Notre psyché a une histoire et cette histoire nous a façonné, et par conséquent nous fait agir comme ceci plutôt que comme cela, en raison notamment de structures hiérarchiques dont le principe s'est inscrit biologiquement chez les crustacés - grâce à la sérotonine - il y a des millions d'années à travers le processus évolutif... Enfin, je résume vite mais ça donne une idée ( j'espère ! ) pourquoi redécouvrir les récits bibliques avec ces clés jette forcément de nouveaux éclairages sur ces histoires. De là à en déduire que Dieu est un être purement imaginaire, c'est un pas que Jordan Peterson ne franchit surtout pas, au contraire, même s'il avoue cultiver de nombreuses ambiguïtés avec le religieux. D'où son questionnement. Ce qui est fascinant dans sa manière d'aborder le divin, c'est la manière méthodique, désintéressée, scientifique et philosophique, sans compromis ni complaisance, avec laquelle il traque les traces que Dieu aurait laissées en nous, en réinterprétant les récits religieux d'une façon complètement nouvelle, d'une façon presque a-religieuse, chose qui lui est d'ailleurs reprochée par plusieurs penseurs athéistes qui sont souvent désarçonnés de ne pas avoir devant eux un adversaire qui utilise la Bible et sa foi pour défendre ses positions. Il n'est pas là pour convertir qui que ce soit, il cherche avant tout des réponses, et a su avec l'aide de penseurs importants qu'il a lus, re-lus et décortiqués - entre autres Nietzsche, Jung, Dostoïevski et <a contents="Piaget" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Piaget" target="_blank">Piaget</a> – mettre au bon moment la lumière sur un aspect essentiel de la psyché humaine : ce que racontent les mythes, les symboles, les archétypes.</p>
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<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><div class="video-container" style="--video-width: 320px"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="f-wWBGo6a2w" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/f-wWBGo6a2w/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/f-wWBGo6a2w?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div></div>
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<p style="text-align: center;">Encore là, puisque cela reste du domaine de l'esprit, on peut questionner la relative vérité des symboles mais cela n'entache en rien leur réalité et leur rationalité ; on ne peut nier qu'on en extrait du sens. Mais le terrain est mouvant, j'en conviens. Et il le sera toujours, c'est inévitable. La conscience - la <em>chose </em>qui rend possible toutes les mesures - ne peut être elle-même mesurée. C'est un paradoxe. Qui n'est pas ans rapport avec le sujet qui suit car il existe un autre terrain, beaucoup moins mouvant celui-là, et c'est le domaine de la logique. J'ignore si le philosophe <a contents="Stéphane Lupasco " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/St%C3%A9phane_Lupasco" target="_blank">Stéphane Lupasco </a>a carrément craqué le code - beaucoup de choses m'échappent en philosophie - mais je crois que les applications et prédictions que l'on peut déduire de sa logique de l'énergie - logique qui s'applique au final à tous les phénomènes ; qu'ils soient physiques, psychiques, religieux, artistiques, économiques, la réalité en d'autres mots... - pourrait en réconcilier plusieurs avec l'idée du sacré. C'est en méditant d'abord sur les étonnantes contradictions que les pionniers de la microphysique ont observées au début du 20e siècle que Lupasco a commencé à élaborer sa pensée, pensée qui se déploiera à travers plusieurs ouvrages écrits sur plusieurs décennie. Ses réflexions, qu'il a toujours forgées à l'aulne de sa formation scientifique, l'ont amené à développer une logique de l'énergie dont les conclusions semblent révéler la clé du fonctionnement et de l'origine de notre monde, rien de moins..! Pour ceux que ça intéresse, son collègue, le physicien Barasab Nicolescu résume bien sa pensée avec son livre <em>Qu'est-ce que la réalité ? Réflexion autour de l'oeuvre de Stéphane Lupasco</em>. Bien que ses thèses aient marqué quelques-uns des grands esprits artistiques du 20e siècle comme Breton, Dali, Mathieu ou Ionesco, ce fut moins le cas de ses contemporains philosophes et scientifiques. Aussi, comme il demeure à ce jour peu connu dans le monde anglo-saxon, ses idées et sa renommée tardent à éclore, ce qui ne saurait tarder, j'en suis convaincu.</p>
<p style="text-align: center;">J'ai évoqué en introduction la prophétie McLuhan. L'histoire nous dira si elle retiendra le nom de Lupasco comme étant celui qui sut ancrer à nouveau le religieux dans la rationalité, opérant par le fait même une mutation de la pensée religieuse... La logique de Lupasco donne non seulement raison à Eckhart lorsque celui-ci affirmait que foi et raison n'étaient pas contradictoire, elle possède le potentiel d'incarner le principe moteur qui l'anime - celui du Tiers inclus - en devenant elle-même la passerelle qui relierait l'objectif et le subjectif, la matière et l'esprit, le troisième terme par lequel cette apparente opposition serait unifiée. Mais pour un moment seulement car la logique de Lupasco stipule qu'une fois la contradiction résolue, s'amènera inévitablement dans le portrait un nouveau couple de contradictoire, couple dont une moitié sera inactive, latente mais bel et bien réelle. On parle d'un état potentiel qui n'a pas d'autres choix que d'être le miroir de l'état actif, visible et donc actualisé ; son actualisation étant aussi le résultat d'une contradiction qui s'exprime à travers la tendance qu'aura le phénomène à se manifester de manière homogène - comme la matière physique - ou bien hétérogène - comme le vivant - . Je sais, c'est pas simple de résumer tout ça en quelques phrases mais s'il fallait retenir une seule chose de ce que Lupasco a découvert, c'est que tout phénomène est le résultat incarné d'une contradiction, et que cette contradiction est forcément le produit d'une seule et même dynamique dont le trait d'union se cache sur un niveau de réalité différent de celui où la contradiction apparait... Par exemple, on pourrait dire que Jordan Peterson - pas lui mais ce qu'il avance - joue dans une certaine mesure le rôle du Tiers inclus entre l'athée et le croyant. Un universitaire, non-pratiquant, qui s'appuie sur la psychologie et la Théorie de l'Évolution afin de discourir sur le divin - le divin étant ici avant tout un idéal, vers lequel tendrait l'Évolution - voilà qui n'est pas banal. L'opposition entre la théologie et la science telle que perçue par les fondamentaliste et les matérialistes ne sont plus des termes contradictoires lorsqu'ils sont amenés sur le terrain de la psychologie comme le fait Peterson. Les 2 opposés y co-habitent sans problème, la religion étant un un processus évolutif à travers lequel la représentation d'un idéal - qu'il soit réel ou non n'est pas important - se répercute de manière biologique et psychologique chez les individus... On y reviendra car ça comme à brasser dans ce domaine, de nouvelles idées bouscule la science de l'Évolution, d'une façon que n'avait pas vu venir <a contents="les 4 chevaliers de l'Apocalypse" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=n7IHU28aR2E&t=5s" target="_blank">les 4 chevaliers de l'Apocalypse</a>.</p>
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<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><div class="video-container" style="--video-width: 320px"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="rm8FksjlJtM" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/rm8FksjlJtM/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/rm8FksjlJtM?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div></div>
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<p style="text-align: center;"> Mais bon, la théorie de Lupasco pose problème en ce qui concerne l'Évolution. Ça m'échappe encore pourquoi mais grosso-modo, le fonctionnement de sa logique ne nécessiterait pas un mécanisme aussi fancy... Toujours selon lui, la psyché humaine serait elle-même le résultat d'une tension équivalente entre l'homogénéisation et l'hétérogénéité de l'énergie, ce qui signifie qu'elle est en quelque sorte incréée, comme en témoigne cette entrevue donnée peu de temps avant sa mort en 1987 :</p>
<p style="text-align: center;">L'interviewer <em>: "Je voulais aussi dire par ma question, que si l’on prend votre logique en compte, il faudra en déduire que les trois matières macrophysique, biologique, psychique ou microphysique, existaient de tout temps. Comment peut-on imaginer un psychisme avant l’apparition des êtres vivants ? "</em></p>
<p style="text-align: center;">Stéphane Lupasco : "Eh bien, tout d’abord une logique est une logique. Elle se suffit à elle-même. Quand on crée une logique, elle peut être constatée après ou non, exactement comme en physique, par exemple, où des hypothèses sont émises pour être ensuite infirmées ou confirmées. Donc ma logique généralisée est une logique autosuffisante en tant que logique; par la suite, on peut vérifier si elle est valable ou non." Et de poursuivre plus loin : <a contents="« Les êtres vivants sont là avant ma logique que j’ai appliquée aux systèmes vivants; donc même s’il n’y avait pas d’êtres vivants, elle aurait continué à avoir une valeur en tant que logique. Donc au départ, le problème qu’il y ait des phénomènes qui viennent la justifier ou non ne se pose pas. C’est par la suite que l’on peut en faire le constat. » " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.revue3emillenaire.com/blog/la-logique-de-lenergie-entretien-avec-stephane-lupasco/" target="_blank">« Les êtres vivants sont là avant ma logique que j’ai appliquée aux systèmes vivants; donc même s’il n’y avait pas d’êtres vivants, elle aurait continué à avoir une valeur en tant que logique. Donc au départ, le problème qu’il y ait des phénomènes qui viennent la justifier ou non ne se pose pas. C’est par la suite que l’on peut en faire le constat. » </a></p>
<p style="text-align: center;">Pense à ça. </p>
<p style="text-align: center;">Et écoute Barab Nicolescu, ancien collègue de Lupasco, t'expliquer comment toutte est dans toutte...</p>
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<div class="video-container" style="--video-width: 320px; text-align: center;"><div class="video-container" style="--video-width: 320px"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="8HA8_Im4KhI" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/8HA8_Im4KhI/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/8HA8_Im4KhI?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></div></div>
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<p style="text-align: center;">*Avec son ouvrage La part d’ange en nous, Steven Pinker <a contents="“démontre que la violence a diminué sur plusieurs échelles : tant au niveau de la durée des conflits que leur ampleur. Cela concerne aussi bien les guerres tribales, que les homicides, ou les châtiments cruels, la maltraitance des enfants, la cruauté envers les animaux, les violences domestiques, le lynchage, les émeutes dirigées contre une minorité, ou encore les guerres civiles et entre nations.” " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Part_d%27ange_en_nous" target="_blank">“démontre que la violence a diminué sur plusieurs échelles : tant au niveau de la durée des conflits que leur ampleur. Cela concerne aussi bien les guerres tribales, que les homicides, ou les châtiments cruels, la maltraitance des enfants, la cruauté envers les animaux, les violences domestiques, le lynchage, les émeutes dirigées contre une minorité, ou encore les guerres civiles et entre nations.” </a></p>
<p style="text-align: center;">**Selon la Banque Mondiale, près de quatre personnes sur dix en 1990 vivaient en dessous du seuil international d’extrême pauvreté (1,90 dollar par jour). En 2013, ce ratio était tombé à un peu plus de 1 sur 10. </p>
<p style="text-align: center;">Bien entendu, la menace climatique pourrait effacer tout cela, j’en suis bien conscient.</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/53491732018-07-17T01:02:00-04:002018-12-04T02:40:28-05:00#16 Marketing + Matérialisme spirituel = La réponse au koan* de Québec Love ! <p style="text-align: center;"><em><strong>"Un puit entre les dents, des yeux à s'noyer d'dans, ton cœur en lune de miel, te v'là ah ah..." </strong></em>Je me rappelle encore de la 1ère fois où j'ai mis Québec Love sur le tourne-disque. J'étais sur le cul. Sauvage à souhait, Charlebois sonnait et groovait comme j'avais jamais entendu quelqu'un le faire en français. Et j'adorais la chanson titre, avec la guimbarde, le ukulele et l'enfilade de mots qui évoquait presqu'une comptine, une espèce de <em><strong>3 p'tits chats</strong></em>, mais pour adulte. La phrase <em><strong>"Pis moé j'm'en crisse, fume ou fume pas, c'est l'même problème, moé j'en ai pas, comprends-tu ça, comprends-tu ça ?" </strong></em>me fascinait particulièrement. Elle résonnait comme une énigme dont je n'arrivais pas à percer le mystère. Comment diable une chose et son contraire pouvait être <em>le même</em> problème..? </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="9YBK6X9TzUo" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/9YBK6X9TzUo/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/9YBK6X9TzUo?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Dans son livre <em>Tantra</em>, <a contents="Chogyam Trungpa&nbsp;" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%B6gyam_Trungpa_Rinpoch%C3%A9" target="_blank">Chogyam Trungpa </a>explique comment l'égo est basé sur la discontinuité. Via les différents contrastes sensoriels, conceptuels et émotionnels qui nous stimulent constamment et que notre mémoire enregistre, ces discontinuités donnent non seulement à l'égo sa fondation ; elles le conditionnent, le façonnent de telle sorte qu'il ne peut reconnaître seulement ce qui est séparé, discontinu, installant ainsi le dualisme comme mode opérationnel et dominant de notre être. Mais pour être en mesure de pleinement comprendre ce qu'est le dualisme, il faudrait pouvoir le comparer avec d'autre chose, avec ce qu'il n'est pas. Mais puisque c'est la seule chose que nous connaissons, ce n'est pas une mince affaire. Le lien qui suit tentera tout de même de le faire, en expliquant <a contents="ce qu'est la non-dualité" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Non-dualit%C3%A9" target="_blank">ce qu'est la non-dualité</a> ; un concept présent depuis des millénaires dans la spiritualité et la philosophie orientale, gnostique, soufie, néo-platonicienne et chez bien des mystiques on s'en doutera. À cet égard, il ne s'agit pas de nier la réalité du dualisme mais plutôt d'en comprendre les implications, d'être en mesure de voir comment il induit une interprétation incomplète et erronée du réel, et que le langage participe activement à modeler de manière duelle notre façon de concevoir le monde et notre propre personne, nous donnant entre autres l'illusion qu'il y a une véritable entité derrière nos 2 yeux qui mène la barque. Bien que j'en sois moi-même encore convaincu à l'instant où j'écris ces lignes, cette croyance s'est sérieusement étiolée lors de l'été 2004, notamment le soir où j'eus la chance de voir le dualisme processer ma propre conscience et par le fait même, dévoiler le caractère vide - dans le sens de transitoire, non solide - et illusoire de ma personnalité. </p>
<p style="text-align: center;">Cela m'arriva en fin de soirée, alors que ma blonde et moi venions de finir de regarder <strong>Big Fish</strong> de <strong>Tim Burton</strong>. J'avais beaucoup aimé et je repensais au film quand tout à coup... paf ! ma conscience retourna ses lumières sur elle-même, me donnant une vue imprenable sur mon propre égo..! C'était à la fois déroutant et fascinant. J'ai peine à me rappeler du film en détail mais il m'est resté à ce jour l'impression qu'il avait joué un rôle dans le déclenchement de cet étonnante prise de conscience, comme si le pouvoir d'évocation du récit avait ouvert je ne sais trop quel canal...</p>
<p style="text-align: center;">On dit souvent de l'homme qu'il est le seul animal à savoir qu'il est conscient. Je ne sais pas si cela est vrai, mais je sais par contre qu'être conscient implique normalement d'avoir conscience <em>de </em>quelque chose. En d'autres mots, notre conscience nous permet d'entrer en relation avec ce qui est intérieur ou extérieur à nous, mais pas avec <em>la </em>conscience comme telle. On peut certes constater que l'on est conscient, mais cela ne nous apprend rien sur le mécanisme même, l'opération qui fait de nous un être conscient, une personne qui pense. Dit plus simplement, tout comme nos yeux ne peuvent pas se voir, notre conscience ne peut elle-même se penser, pas plus que l'eau se mouiller ou le feu se brûler. Du moins, pas en temps normal. Mais l'été 2004 n'était pas un temps normal. Tel que décrit <a contents="dans ce carnet précédent" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/8-jack-kerouac" target="_blank">dans ce carnet précédent</a>, Kerouac m'avait aidé à avancer dans ma compréhension du bouddhisme. La lecture de<em> </em><a contents="Tantra&nbsp;" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.seuil.com/ouvrage/tantra-chogyam-trungpa/9782020305471" target="_blank"><em>Tantra</em> </a>de Chogyam Trungpa - évoqué un peu + haut - m'ouvrait à de nouvelles perspectives, et le roman <a contents="Maitre Eckhart dans lequel Jean Bédard" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.ledevoir.com/lire/345237/jean-bedard-ecrire-les-mystiques" target="_blank">Maitre Eckhart </a>de Jean Bédard - un professeur en travail social de l'Université de Montréal - m'exposait à la pensée de ce mystique rhénan qui chevaucha le 13e et 14e siècle. Eckhart, probablement le plus bouddhiste des mystiques chrétiens, insistait pour dire qu'il y a dans ce qui nous constitue une part d'incréé, et que cette part - ce <em>rien </em>comme il l'appelait - peut se révéler à nous pour autant qu'on sache se retirer afin de lui laisser la place. Les mystiques de toutes les époques et de toutes les confessions font souvent référence à ce concept - central dans le bouddhisme, mais aussi présent dans l'Islam à travers le soufisme ( <a contents="el fana" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fana_(islam)" target="_blank">el fana</a> ) - le concept de l'anéantissement du soi, anéantissement dont l'aboutissement résulte en une conscience divinisée, ou éveillée si on se réfère aux traditions orientales. C'est pourquoi on dit d'un être éveillé qu'il n'a plus d'égo, ou du moins, qu'il n'y est plus attaché et que celui-ci ne le conditionne plus. </p>
<p style="text-align: center;"><span class="font_small"><em><strong>Chogyam Trungpa expliquant les pièges du matérialisme spirituel</strong></em></span></p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="dLAaEP6R6Zg" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/dLAaEP6R6Zg/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/dLAaEP6R6Zg?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe> </p>
<p style="text-align: center;">Oui, les lecture avides que je faisais sur le sujet m'aidaient à comprendre des trucs auxquels je n'avais jamais réfléchis auparavant, mais les cours de marketing que j'avais commencés à suivre depuis quelques semaines contribuaient aussi sérieusement à élargir - pour ne pas dire ébranler - la vision que j'avais de moi-même. En partant, pour l'individu que j'étais à l'époque - c'est-à-dire un musicien pour qui le concept de vendre et/ou de se vendre était intrinsèquement nauséabond - décider de suivre un cours sur le commerce me sortait big time de ma zone de confort. Et ça avait plutôt mal commencé. À ce qu'il paraissait, j'avais un problème majeur dont j'ignorais totalement l'existence, à savoir la relation que j'entretenais avec l'argent. Et pourtant, dans mon esprit d'alors, je n'entretenais pas de relation particulière avec l'argent ; les choses étaient comme elles étaient et je voyais difficilement comment il aurait pu en être autrement. Mais on me fit comprendre assez rapidement qu'elles pouvaient effectivement en être autrement, comme en témoignaient le parcours - et le compte en banque - de tous ceux qui m'avaient donner envie de faire ce métier... Pour une raison x, générer de l'argent ne cadrait pas avec la vision que j'avais du métier de musicien. Dans cette vision - inavouée mais bien présente - l'artiste, guidé par la Mystérieuse Inspiration, créait la musique et l'enregistrait. Là s'arrêtait son rôle afin de préserver la pureté de son travail et éviter qu'il entre en contact avec le côté sombre de ce qu'impliquait la suite pourtant logique de son métier : le commerce de sa création. C'est pourquoi pour que cela se puisse, il fallait convaincre des gens de se salir à notre place. Heureusement qu'il y avait les subventions – de l'argent magique qui ne salissait pas ! - pour nous aider à tenir le coup si l'on avait de la difficulté à intéresser des gens, c'est-à-dire une étiquette de disque, à faire la sale besogne... Je caricature mais à peine. </p>
<p style="text-align: center;">Encore plus que le dualisme, le concept de non-attachement se retrouve dans tous les stades de l'enseignement bouddhiste. C'est un des moyens que l'on emploie pour diluer graduellement l'égo et ainsi atteindre l'éveil. Mais comme l'égo n'est pas particulièrement enthousiasmé par l'idée de disparaître, vous pouvez être certain qu'il tentera de détourner la pratique spirituelle pour son propre profit. Il faut donc rester constamment vigilant, en prenant soin de pas s'attacher au non-attachement lui-même et développer sans s'en rendre compte ce que de nombreux instructeurs appellent le matérialisme spirituel ( voir le vidéo ci-haut ). Mais comme mon professeur de marketing allait me le faire réaliser, il n'était pas nécessaire de s'engager dans une pratique spirituelle pour tomber dans ce piège. Bien que j'étais habitué de vivre avec le minimum - et sans en faire nécessairement une question de principe - je n'avais pas réalisé que je cultivais une forme d'attachement dans le fait de <em>ne pas </em>désirer faire de l'argent..! Bien au fait des processus dualistiques qui régissent notre psyché en général - et celle des artistes en particulier - mon professeur m'inculquait des principes spirituels dont la nature concrète - selon ma conception très dualiste de la chose ( ô l'ironie ! ) - n'était pas censé trouvé leur expression dans un cours sur l'entreprenariat. Non seulement il m'avait fait comprendre que l'attachement pouvait se manifester même dans la vertu, il m'avait également fait voir que le caractère négatif que j'attribuais inconsciemment à l'argent et au commerce de ma musique était purement arbitraire et subjectif. Et ce fut une véritable révélation tant j'étais convaincu que ces assertions étaient aussi vraies que le ciel est bleu. Autant consterné qu'amusé, je constatais avec étonnement qu'un pan de ma personnalité se fissurait devant mes yeux. Mon rapport à l'argent, un trait qui me définissait beaucoup plus que je l'imaginais, ce trait s'effaçait en même temps qu'il se redessinait, entrainant par le fait même la modification soudaine de la personne que j'étais. C'était très étrange. Il ne s'agissait pas seulement de changer d'avis à propos d'un sujet, c'était beaucoup plus profond que cela. Le fait de de ne plus considérer l'argent comme un mal nécessaire - en même que de prendre conscience que cette conception avait façonné de manière importante ma personnalité pour une grande partie de ma vie adulte - cela mettait pleinement la lumière sur le processus égotique à propos duquel mes lectures tentaient tant bien que mal de m'éduquer. </p>
<p style="text-align: center;">Il y a une différence entre appréhender un concept avec la tête et le vivre, le ressentir. Ce ne sont pas tous les concepts qui ont la possibilité d'être incarnés mais en ce qui concerne l'égo, le dualisme et le non-attachement, bien que lire à ce sujet soit un bon départ, cela ne suffira pas si on veut les comprendre entièrement étant donné que les concepts en question concernent la nature même notre être. D'où la difficulté, on manque de distance, ce qui est plutôt normal étant donné qu'il s'agit de soi... Comment faire alors pour se voir autrement ? adopter une perspective différente que celle que l'on a depuis toujours sur soi ? Cela est très difficile. Il faut arriver à se déjouer, à se perdre de vue, mais de manière sincère, tout en lâchant prise et accepter de ne pas savoir d'avance où cela mènera... C'est ce qui m'est arrivé je crois lorsque j'ai pris la décision d'aller contre ma nature et de prendre un cours d'artiste/entrepreneur. Aussi, mes lectures du moment et la quête avide de sens qui m'habitait m'ont paradoxalement permis de me désorienter, de m'éloigner de mes repères habituels, comme si je manipulais une boussole dont je comprenais mal le fonctionnement. Et le visionnement de <strong>Big Fish</strong> - un genre de conte initiatique - a provoqué la petite étincelle qu'il a fallu pour que le bûcher mis en place par mes lectures et le curieux cours que je prenais sur le commerce de ma musique s'embrase, jetant ainsi une lumière qui me permettrait de devenir le spectateur de mon propre égo ! Ce qui ne serait rien comparé à la gigantesque explosion qui retentirait quelques jours plus tard, on y reviendra...</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="cfDwQbxRoEo" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/cfDwQbxRoEo/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/cfDwQbxRoEo?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe><br> </p>
<p style="text-align: center;">Quant à <strong><em>« Pis moé j'm'en crisse, fume ou fume pas, c'est l'même problème, moé j'en ai pas, comprends-tu ça, comprends-tu ça ? »</em></strong> , ça a pris du temps, mais oui, j'ai fini par comprendre ; comme avec l'argent, faut juste pas s'attacher, d'un bord comme de l'autre..!</p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;">* <a contents="Un&nbsp;koan&nbsp;est une brève anecdote ou un court échange entre un maître et son disciple, absurde, énigmatique ou paradoxal, ne sollicitant pas la&nbsp;logique&nbsp;ordinaire." data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/K%C5%8Dan_(bouddhisme)" target="_blank">Un koan est une brève anecdote ou un court échange entre un maître et son disciple, absurde, énigmatique ou paradoxal, ne sollicitant pas la logique ordinaire.</a></p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/53266312018-07-01T01:10:42-04:002018-08-18T13:41:49-04:00#15 La fois où des extra-terrestres ont effacé les messages sur mon répondeur et autres anecdotes improbables<p style="text-align: center;">Je ne suis pas un grand fan du cinéma heroic-fantasy à la Star Wars ou du style Seigneur des Anneaux. J'ai l'impression qu'on y étire beaucoup trop la sauce, rendant le combat du Bien contre le Mal pas très subtil et un peu lassant à la longue. J'aime bien par contre quand un film sait rendre floue la ligne entre le réel et l'improbable. Comme dans <a contents="Biutiful " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=3WzJcwGA6YM&frags=pl%2Cwn" target="_blank">Biutiful </a>où le don du héros principal – il aide les morts qui errent à passer de l'autre côté – ajoute à l'histoire un aspect mystique discret, mais qui ne va jamais jusqu'à altérer le côté réaliste du drame qui s'y joue.</p>
<p style="text-align: center;">Même chose pour <a contents="Micheal Clayton " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=EHckVQm4cW0" target="_blank">Micheal Clayton </a>, film qui met en vedette George Clooney dans le rôle d'un "fixer" d'une grosse firme d'avocat de New-York qui doit convaincre son vieil ami de ne pas représenter une jeune femme dont il devait à l'origine miner la cause qu'elle avait amenée devant un tribunal. Fille d'agriculteurs, la plaignante demande réparation à une multinationale dont les pesticides auraient empoisonné la nappe phréatique et causé la maladie dégénérative et mortelle de ses parents. L'avocat - joué par <a contents="Tom Wilkinson" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tom_Wilkinson" target="_blank">Tom Wilkinson</a> ( quel acteur! ) et qui s'appelle Arthur dans le film – avait d'abord été mandaté pour défendre le géant agricole jusqu'à ce qu'il décide de retourner sa veste en plein procès. Le film commence d'ailleurs sur un monologue vraiment prenant où on entend Arthur expliquer à Micheal les raisons de ce revirement. On l'apprendra par après, Arthur est maniaco-dépressif et il avait cessé de prendre ses médicaments. Et même s'il insiste pour dire que « this is not an episode », à la façon dont il décrit la vision soudaine qu'il a eu de son travail et de son cabinet, on le croirait effectivement en plein délire. </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="v5SVc80LN3Q" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/v5SVc80LN3Q/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/v5SVc80LN3Q?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Ajoutons à cela que de se déshabiller en pleine audience et demander du même coup pardon à la plaignante n'était pas de nature à rassurer celle qui dirige l'entreprise qu'il devait défendre sur son état psychologique, d'où l'entrée en scène de Michel Clayton - qui connait bien Arthur - et à qui le patron de la firme demande de réparer les pots cassés. Mais en tant que spectateur, on comprend très bien les motifs qui ont poussé Arthur à agir de la sorte; cela faisait 6 années qu'il empochait de grosses sommes en travaillant sur ce dossier jusqu'à ce qu'il tombe sur un document confidentiel prouvant que la compagnie savait que son produit était nocif. Cette nouvelle information qu'on luit avait cachée sera l'une des causes de sa volte-face et de la prise de conscience brutale qui s'ensuivit.</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="jeM2n1s74BM" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/jeM2n1s74BM/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/jeM2n1s74BM?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe> </p>
<p style="text-align: center;">Je ne vous raconterai pas toute l'histoire mais sachez que le jeu de toute la distribution est impeccable et que le scénario est juste trop parfait. Ce thriller judiciaire - d'une profondeur psychologique remarquable - aurait déjà été excellent si on s'était contenté d'exploiter la folie d'Arthur et son délire mystique, mais un autre élément - encore plus surprenant - s'y juxtapose et rend l'histoire d'autant plus intéressante. C'est qu'Arthur appelle de temps en temps le fils de Micheal pour connaître les détails d'un livre que l'enfant est entrain de lire au sujet d'un royaume imaginaire où s'affrontent les forces du Bien et et du Mal, comme s'il y trouvait des indications qui l'aidaient à poursuivre son propre combat. Et sans s'en douter, une illustration que Micheal verra dans ce même livre lui sauvera la vie car il rencontrera au détour d'une route un paysage identique à celui entrevu dans l'une de ses pages – une colline, 2 arbres et 3 chevaux - ce qui le fera sortir de sa voiture, juste avant qu'une bombe ne la pulvérise... Tout comme dans Biutiful, c'est en filigrane, de manière très subtile que l'élément fantastique se déploie tout au long de l'histoire et bonifie grandement le récit en ce qui me concerne. </p>
<p style="text-align: center;">Mais qui n'a pas déjà entendu parler d'histoires bizarres qui seraient arrivées dans la vraie vie à un ami ou à l'ami d'un ami..? Dans un <a contents="post récent sur Facebook" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.facebook.com/photo.php?fbid=1685255974891523&set=a.250959891654479.61048.100002214093785&type=3&theater" target="_blank">post récent sur Facebook</a>, un musicien originaire des Îles-de-la-Madeleine racontait qu'il venait de renouer avec le violon et se remémorait les soirées qu'il avait passées alors qu'il était petit à écouter des violoneux légendaires qui jouaient avec son père, dont un certain Edouard Boucher qui avait, parait-il, le don d'arrêter le sang... M'est alors revenue la fois où j'ai moi-même sollicité sans le vouloir le pouvoir d'un <a contents="arrêteur de sang" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://quebecoisdesouche.info/la-legende-de-larreteur-de-sang/" target="_blank">arrêteur de sang</a>. J'ai encore gardé cette mauvaise manie de parfois m'arracher la peau autour des ongles, spécialement les cuticules, ce qui peut occasionner d'embarrassantes hémorragies. Il y a longtemps, alors que j'étais adolescent, je m'étais sérieusement amoché l'index de la main droite. Je ne m'étais pas manqué - ça coulait joyeusement - et ce, juste avant d'embarquer dans un autobus pour une retraite dans les bois avec la pastorale de l'école secondaire. Un peu gêné, j'étais allé voir le responsable pour lui demander s'il avait un plaster. Je me souviens encore très bien du petit geste discret qu'il avait fait avec 2 de ses doigts au-dessus de ma main, en me disant que je n'en aurais pas besoin... Le saignement avait effectivement cessé sur le champ, sans que cela me paraisse inhabituel tant le tout s'était passé rapidement et comme si cela allait de soi! </p>
<p style="text-align: center;">J'ai un ami qui a son lot d'histoires étranges et comme nous avons déjà habité ensemble, j'ai vécu avec lui 2-3 moments pour le moins awkward. Dont cette fois où nous partagions la même chambre - on vivait à 4 dans un 5 ½ sur St-Urbain près de Bernard pour 320 $ par mois! - et avions eu à notre réveil la même sensation étrange de ne pas avoir vraiment dormi. Et d'avoir été éblouis par une lumière blanche pendant une bonne partie de la nuit. Et d'avoir le sentiment que plusieurs personnes avaient été présentes dans l'appartement durant notre sommeil. Comme nos 2 autres colocs étaient toujours absents – ils avaient dormi chez leur copine respective - ce n'était donc pas eux qui étaient rentrés au petit matin et qui avaient fait la fête pendant que nous dormions. Alors que nous nous étonnions encore en déjeunant de partager la même impression, je remarquai que le voyant du répondeur à cassette - nous étions en 1991 ou 92 - clignotait. C'était intriguant car nous avions passé la soirée à discuter et à jouer aux échecs et personne n'avait appelé. Mais ce qui était encore plus étonnant, c'est que tous les messages avaient été effacés, même le message d'accueil! Et non seulement le message d'accueil n'était plus là, il avait été remplacé par des bruits, bruits qui s'apparentaient à des voix qui auraient conversé dans un dialecte inconnu, mais qui en même temps ne ressemblait à rien... d'humain. La prise de son, bien que mauvaise, témoignait au début d'un brouhaha général jusqu'à ce qu'une voix au ton autoritaire se fasse entendre plus clairement. Il était impossible de décoder quoi que ce soit mais on pouvait deviner à son intonation que le monsieur (?) n'était pas content, comme s'il disait : « Je vous avais dit de toucher à rien gang d'épais! ». Un clac bien sonore avait suivi, on avait manifestement appuyé brusquement sur la touche stop. </p>
<p style="text-align: center;">Le surlendemain de cet étrange événement, on pouvait lire dans La Presse du mardi que l'aéroport de Dorval avait reçu un nombre élevé d'appels de citoyens affirmant avoir vu de drôles d'objets se déplacer dans le ciel de Montréal durant la nuit de dimanche... </p>
<p style="text-align: center;">Cette autre anecdote à propos d'un ovni aperçu dans le ciel de Montréal est quand même assez spectaculaire..!<br><br><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="PY3tz6hjQy0" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/PY3tz6hjQy0/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/PY3tz6hjQy0?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">La prochaine histoire revêt un caractère moins fantastique mais elle est tout de même étonnante. En secondaire 3, je suis devenu complètement gaga d'une fille qui était de 2-3 ans mon ainée. Simplement la voir passer devant mon casier me chamboulait sérieusement. Au-delà du fait que je la trouvais très jolie, j'avais aussi l'impression de déjà la connaître, bien que que je ne lui avais jamais adressé la parole. Cela fait longtemps qu'elle n'occupe plus mon esprit mais à bien y penser, j'aurais encore de la difficulté à expliquer aujourd'hui ce sentiment de proximité immédiate... Anyway, pour faire une histoire courte, j'en suis venu avec le temps à m'en rapprocher. J'ai certes travaillé fort en ce sens mais le nombre de fois où le hasard m'a aidé est quand même impressionnant. Comme je n'étais pas du genre à tenir un journal, j'ai malheureusement oublié pas mal d'anecdotes mais il serait difficile de ne pas se rappeler la fois où ayant perdu son ancienneté comme animatrice dans les camps de jour de Laval, elle put réintégrer in extremis son poste en étant affectée à la petite équipe où j'étais moi-même moniteur. Laval, je tiens à le rappeler, c'est quand même la 2e plus grosse ville du Québec. Par contre, comme 2 années de scolarité nous séparaient, il y a eu de longues périodes où je ne l'ai pas croisée. Mais la vie est ainsi faite qu'un soir, elle se pointa à mon appartement pendant qu'on y tenait une fête. Je ne m'attendais pas à sa venue mais comme mes colocs et elle avaient des amis en commun, ce n'était pas non plus surprenant qu'elle y soit. J'étais bien content de la revoir et elle aussi il me semblait. Ce fut une belle soirée, et de l'avoir passée en sa compagnie raviva mon sentiment pour elle. Je décidai donc de lui écrire quelques jours après pour lui faire part de la chose. Une fois ma lettre terminée, je me suis dit que je passerais avant mon cours par le bureau de poste de l'Uqam - où j'étudiais alors en Histoire - pour lui envoyer ; on devait bien offrir ce service quelque part sur le campus. Je ne m'étais pas trompé, il y avait bel et bien un comptoir postal dans l'université mais il était pas facile à trouver. J'ai dû demander mon chemin plusieurs fois avant d'arriver au corridor situé au 2e sous-sol dont on me parlait depuis le début. On se serait cru dans un film de science-fiction soviétique ou dans une base secrète nucléaire tant le corridor était long et qu'on y croisait personne. J'en étais même à me demander si j'étais sur le bon chemin tant il me paraissait insensé qu'un bureau de poste soit à ce point reculé et difficile d'accès. Mais enfin, après 2-3 minutes à marcher seul - alors que l'Uqam était envahie par des milliers d'étudiants qui se mettaient en route pour leurs cours quelques mètres au-dessus de ma tête - une silhouette est apparue au loin, me donnant à penser que j'allais peut-être dans la bonne direction. Évidemment, plus j'avançais, plus il devenait possible de distinguer les traits de la personne qui marchait vers moi. Je pouvais commencer à déceler qu'il s'agissait d'une fille. Et qui avait l'air plutôt jolie. Et dont la démarche me rappelait de plus en plus quelqu'un... Et puis, comme en secondaire 3 lorsque passait devant mon casier un certain visage, mon rythme cardiaque s'est mis à s'accélérer. Je croyais avoir la berlue. La fille dont je ne cessais de me rapprocher ressemblait un peu trop beaucoup à celle à qui je destinais ma lettre... Je ne l'avais jamais rencontrée pendant les 3 sessions durant lesquelles j'ai fréquenté l'université, et voilà qu'on arrivait simultanément par des chemins opposés devant le bureau de poste encastré à même le mur du corridor où nous nous retrouvions ( presque ) seul à seul, alors qu'elle était la cause même de ma présence en cet endroit! J'étais trop sonné. J'ai nerveusement balbutié quelque chose, remis rapidement la lettre au préposé (!), et je suis reparti, le pas pressé vers le local où mon cours allait commencer d'une minute à l'autre. </p>
<p style="text-align: center;">Alors vous comprendrez que lorsque Michel Clayton décide de sortir de sa voiture pour mieux contempler un paysage qui se trouve à être la copie conforme de l'illustration qu'il a vue dans un des livres de son fils, ce n'est pas moi qui va chialer pour dire que c'est un peu tiré par les chevaux... </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="m8BL6-a_lzM" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/m8BL6-a_lzM/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/m8BL6-a_lzM?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">( Ce film est trop bon. La preuve, c'est le seul que j'ai jamais acheté, la copie que m'avait donnée Natasha Beauchamp ne se lisait plus. Merci encore Nat pour la découverte! )</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/52782162018-06-06T00:15:53-04:002020-11-03T22:15:48-05:00#13 Pour en finir avec la partisanerie, la démagogie, la corruption, le lobbying, la gauche, la droite... et la démocratie!<p style="text-align: center;">Il était question d'Oprah Winfrey. Elle venait de prononcer un <a contents="discours remarqué" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://video.foxnews.com/v/5705506923001/?#sp=show-clips" target="_blank">discours remarqué</a> aux Golden Globes et la machine à rumeur s'était emballée. On murmurait déjà <em>Oprah for President.</em> Mais le ton de l'ancien ministre - <a contents="et premier impresario d'Éric Lapointe" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://fr.canoe.ca/divertissement/musique/nouvelles/archives/2008/12/20081210-101340.html" target="_blank">et premier impresario d'Éric Lapointe</a> - était sans appel: « Pour savoir si elle ferait ou non une bonne candidate, il faudrait d'abord voir son programme car c'est là-d'ssus que les gens voteront...». Quelque chose du genre. Avec toute l'autorité qu'on lui connait, Yves-François Blanchet avait clos la discussion avec ce qui semblait être un argument fort censé. Je cuisinais en écoutant distraitement la conversation et ce n'est que 2 jours + tard que j'ai réussi à mettre le doigt sur ce qui clochait avec cette conclusion. Ce qui avait été affirmé comme étant une évidence n'en était pas une. En fait, la population se prononce rarement sur un programme quand elle élit un parti. La politique est un domaine qui a beaucoup plus à voir avec l'émotivité qu'avec la raison, même si on se l'avoue plus ou moins. Sinon, ce serait toujours le meilleur programme qui l'emporterait, non..? </p>
<p style="text-align: center;">J'ai évoqué dans le <a contents="2e carnet " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/le-vertige-de-la-predestination-et-les-vertus-du-troll-yoga#comments" target="_blank">2e carnet </a>qu'il m'arrivait de faire le troll sur Fox News. Pas un vrai troll fatiguant qui ne fait que répéter la même chose mais pas loin certains soirs, du moins c'est ce que pourrait penser un électeur qui a voté pour Trump. Disons que je me suis beaucoup calmé depuis que je tiens ce blogue et surtout, j'ai appris à ne plus m'engager dans de longues répliques stériles. Ce qui ne m'empêche pas d'aller consulter quotidiennement le site de Fox News, mieux fait je trouve que celui de bien des concurrents. Et donnons leur aussi cela, il est très divertissant. Le fréquenter permet également de mieux comprendre pourquoi <a contents="Hillary Clinton n'a pas gagné." data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.foxnews.com/opinion/2016/09/12/basket-deplorables-for-once-hillary-told-truth-about-what-really-thinks.html" target="_blank">Hillary Clinton n'a pas gagné.</a> Rarement j'ai vu une politicienne susciter autant de mépris. Trump aussi, on s'entend. Mais il a quelque chose que l'ancienne candidate démocrate n'a pas. <a contents="Du charisme" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=iTACH1eVIaA" target="_blank">Du charisme</a>, qu'on le veuille ou non...</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="bmhSnhNfskU" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/bmhSnhNfskU/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/bmhSnhNfskU?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">En politique, le programme peut bien entendu faire balancer un indécis mais il sera rarement un facteur déterminant. On feint de l'ignorer mais la politique, c'est avant tout du théâtre. Et comme un comédien sur les planches, le politicien doit performer, <a contents="c'est-à-dire savoir susciter de l'émotion" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=S1G5zvDGQtA" target="_blank">c'est-à-dire savoir susciter de l'émotion</a>. C'est là que ça se joue, que va se chercher la marge qui détermine qui l'emportera. On se souviendra de Lucien Bouchard. Il est probablement le dernier politicien charismatique à avoir dirigé le Québec. Rappelez-vous quand Parizeau avait décidé contre vents et marées de redemander aux Québécois s'ils voulaient devenir les citoyens d'un nouveau pays. Ça s'emballait pas fort dans les chaumières. Il a fallu le charisme de Lucien Bouchard<a contents="Lucien Bouchard pour renverser la vapeur" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=f0sPGxYo_M8" target="_blank"> pour renverser la vapeur</a>. Et c'est le propre d'un être charismatique de savoir susciter l'émotion. Et comme on l'a vu en 1995, quand l'émotion s'empare <a contents="des affaires de la cité" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://paixetecologie.forumactif.org/t6-origine-du-mot-politique" target="_blank">des affaires de la cité</a>, ça peut devenir puissant. Ou épeurant. Ça dépend de quel côté on penche. Mais bien que j'ai voté oui en 1995, il y a là une des raisons pourquoi je ne suis plus convaincu que la démocratie soit le meilleur moyen pour que le bien commun prévale. La game a changé <a contents="comme disait l'autre" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=y7v6313MyiI" target="_blank">comme disait l'autre</a>. En fait, je crois sincèrement que la démocratie telle qu'elle est pratiquée en ce moment a fait son temps, même si un peu partout, surtout en Occident, elle a permis des<a contents=" avancées considérables&nbsp;" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.ted.com/talks/steven_pinker_on_the_myth_of_violence?language=fr" target="_blank"> avancées considérables </a>au chapitre des libertés civiles, de presse et d'expression, ainsi que de l'amélioration globale du niveau de vie des citoyens. Aussi, le lien qui existe entre le libre-marché et la démocratie est également très solide même s'il est difficile de le reconnaître pour beaucoup de monde. Bref, il faut admettre que la démocratie - à défaut de les anéantir - fut un excellent moyen de réduire les inégalités, surtout quand on compare avec la pauvreté généralisée dans laquelle vivait presque toute la population il n'y a pas si longtemps, et avec les pays où le communisme - dont le but premier était justement l'éradication des inégalités - a sévi. Mais si elle fut le moyen par lequel de nombreuses libertés furent acquises, le futur vivre-ensemble doit-il nécessairement passer par la démocratie? En d'autres mots, la démocratie est-elle une fin en soi? </p>
<p style="text-align: center;">Depuis le début de ce blogue, j'ai souvent fait référence au dualisme, un phénomène inhérent au monde physique et à la condition humaine. Le politique n'y échappe évidemment pas. Et dépendamment où on se situe sur son spectre, on sera porté à favoriser un côté plutôt que l'autre, <a contents="la fameuse division gauche-droite" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=JlQ5fGECmsA" target="_blank">la fameuse division gauche-droite</a>. Cela fut sans contredit un excellent moyen de s'affranchir du pouvoir absolu et hautement inégalitaire de la noblesse et de la monarchie, mais en cette ère numérique et hautement volatile - technologiquement et émotionnellement parlant - il serait peut-être temps de repenser la démocratie... Les Russes en tout cas ne s'en sont pas privé, comme ont pu le constater les États-Unis lors de la dernière élection présidentielle. <a contents="Utiliser Facebook" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.foxnews.com/tech/2017/11/01/here-are-russia-facebook-ads-that-tried-to-dupe.html" target="_blank">Utiliser Facebook</a> afin d'exacerber les divisions très marquées qui minent le climat politique américain, fallait quand même y penser..! Même chose avec Twitter, où les Russes ont utilisé la tuerie de Parkland pour jeter de l'huile sur le feu, <a contents="une heure à peine après que la tragédie eut lieu" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?time_continue=1&v=7oYlOAmnt9c" target="_blank">une heure à peine après que la tragédie eut lieu</a>.</p>
<p style="text-align: center;"> La démocratie a beau être le moins pire des systèmes, la démagogie qu'elle induit, la vision à court terme qu'elle propose, la corruption qu'elle encourage (même si elle la diminue beaucoup quand on compare avec les autres systèmes), le cloisonnement idéologique qui en découle, tout cela devrait nous convaincre de ne pas en rester là et d'au moins essayer d'atténuer ses effets pernicieux. Pour ma part, je serais même prêt à céder mon droit de vote pour qu'on instaure un Conseil des Sages, non-élu, afin d'élever le gouvernement au-dessus de la partisanerie et le préserver du concours de popularité auquel il doit se soumettre, d'autant plus que la surenchère médiatique et les risques de manipulation que les réseaux sociaux ont multipliés ces dernières années comporte leurs lots d' inconnues comme en témoigne la dernière élection présidentielle américaine. Et comme de toute façon la popularité n'a rien à voir avec la compétence...On freake un peu autour de moi quand je suggère cela mais ça réglerait il me semble bien des problèmes. Nommé par une Assemblée du Peuple, mais de laquelle il serait tout de même indépendant, un gouvernement de cette nature serait en grande partie à l'abri des conséquences indésirables évoquées + haut et ferait évoluer le processus démocratique actuel vers une plus grande maturité.</p>
<p style="text-align: center;">Pour ce qui est de son fonctionnement, le judiciaire continuerait grosso-modo comme il le fait. L'exécutif serait partagé entre l'Assemblée et le Conseil mais le législatif serait principalement l'apanage du Conseil qui serait appelé à adopter les lois à même les recommandations que lui soumettrait l'Assemblée du Peuple, qui elle continuerait d'être élue. Le Conseil aurait le devoir de toujours justifier sa prise de décision, mais ne serait pas tenu de retenir les suggestions de la majorité si le Conseil jugeait que le bien commun n'en bénéficierait pas.* Ça peut sembler un peu soviétique comme approche mais afin d'éviter une dérive totalitaire, le mode de sélection des Sages assurerait la représentation de la pluralité de la société comme nous le verrons plus loin. Oui, il y aurait un prix à payer, la dilution du droit de vote, de sa portée, mais en contrepartie cela nous préserverait du dualisme politique et de plusieurs problèmes qui en découlent... Les membres du Conseil des Sages auraient eux-mêmes à dégager un consensus majoritaire de l'ordre d'environ 60%, disons dans une proportion de 7 contre 4 si les Sages étaient au nombre de 11. Comme le sont présentement les juges de la cour suprême, les Sages seraient nommés par l'Assemblée et devraient eux aussi recevoir un assentiment avoisinant les 60%, peut-être un peu +, des membres élus de cette même Assemblée. Quant aux membres de l'Assemblée, on les élirait à la proportionnelle histoire de mieux refléter les aspirations de la population. Pour être retenu comme candidat, la feuille de route d'un Sage devrait démontrer un réel engagement pour la chose publique, ainsi que des qualités d'administrateur (à peaufiner, je jette les grosses lignes...). Une révision à chaque 8 ans du Conseil serait automatique, autant pour ses membres que pour son fonctionnement, et pourrait être révoqué advenant une impasse ou une paralysie... Genre. Évidemment, une nouvelle constitution veillerait à ce que des mécanismes de surveillance et de bon fonctionnement fassent en sorte que cette nouvelle expérience politique puissent être tentée dans le meilleur intérêt de tous. </p>
<p style="text-align: center;">Pas pire non? Reste plus maintenant qu'à convaincre les partis actuels de ne plus vouloir exercer le pouvoir et le tour est joué..! C'est un peu comme si on demandait à notre égo de laisser sa place. Même s'il y a d'énormes avantages à travailler en ce sens - rien de moins que la <a contents="cessation de la souffrance" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Quatre_nobles_v%C3%A9rit%C3%A9s" target="_blank">cessation de la souffrance</a>, parait-il, en ce qui concerne la mise au rancart de l'égo - le principal intéressé y voit difficilement son intérêt...</p>
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<p style="text-align: center;"><em>*Ce qui n'implique nullement de se débarrasser des philosophies et principes économiques qui ont mené à l'instauration de la démocratie, au contraire... Mais d'installer des politiques de développement durable irait évidemment dans le sens de l'intérêt public. Bref, il s'agirait de trouver l'équilibre entre la gauche et la droite et non pas alterner périodiquement entre les deux pôles et aboutir à une situation contre-productive où le gouvernement nouvellement élu annule les politiques de son prédécesseur qui avait lui-même fait la même chose auparavant et ainsi de suite... </em></p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/52609392018-05-28T00:43:55-04:002019-07-21T01:19:32-04:00#12 L'affaire avec la musique (et l'infâme Jordan Peterson) <p style="text-align: center;">"I'd heard there was a secret chord <br>That David played and it pleased the Lord <br>But you don't really care for music, do you?"</p>
<p style="text-align: center;"> - Leonard Cohen</p>
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<p style="text-align: center;">J'avoue éprouver une certaine nostalgie lorsque je me rappelle l'heure du souper alors que j'étais encore un enfant, ou plus précisément un pré-adolescent. Je ne sais pas si ma mémoire enjolive mes souvenirs mais j'ai l'impression que c'était un moment où l'on prenait vraiment le temps d'échanger en famille. Nous étions loin d'être bourgeois - mes parents tenaient un dépanneur - mais selon les standards de la rue où j'habitais, nous mangions tard, à 18h, en même temps que commençait le téléjournal de Radio-Canada que nous écoutions religieusement. J'ai l'air de me contredire en disant que c'était un moment où nous échangions mais d'écouter le téléjournal en soupant nous donnait plein de sujets de conversation qui s'ajoutaient aux anecdotes qui s'étaient passées durant la journée. Souvent le repas s'étirait au-delà du téléjournal et nous prenions le dessert en buvant du thé - avec beaucoup de lait et beaucoup de sucre dans mon cas - tout en continuant de regarder l'émission qui succédait aux nouvelles. Je me souviens d'<a contents="Avis de Recherche" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=Dyuwp5h-jPs&t=80s" target="_blank"><em>Avis de Recherche</em></a>, une émission animée par le très moustachu Gaston L'Heureux pendant laquelle il présentait d'anciens camarades de classe à une vedette de l'heure qui, on l'espérait, allait se remémorer des anecdotes cocasses. Il me revient une fois en particulier où <a contents="Guy Lafleur " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=12-x70nq0vI" target="_blank">Guy Lafleur </a>était l'invité et il ne semblait pas se rappeler de grand chose ni de grand monde. Et lorsqu'il arrivait à mettre un nom sur un visage qui lui disait vaguement quelque chose, son ton monocorde pouvait laisser penser qu'il s'en crissait un peu... La gêne probablement. Je me rappelle aussi d'une fois où l'invité de la semaine - que je ne connaissais pas à l'époque, le chanteur <a contents="Sylvain Lelièvre" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=6pcC1o4A8e4" target="_blank">Sylvain Lelièvre</a>* - avait dit quelque chose qui m'avait laissé perplexe et pantois : « La musique, c'est des mathématiques dans l'fond... ». Quoi!? C'était impossible car j'adorais la musique et détestait les mathématiques. Et pourtant...</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="t2BnULIq5aI" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/t2BnULIq5aI/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/t2BnULIq5aI?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Elle est tellement omniprésente qu'on en fait pas grand cas mais la musique est vraiment un phénomène unique quand on y pense. Et en tant qu'être humain ayant été fasciné assez tôt par la musique, j'ose affirmer que j'en connais quand même un peu sur le sujet. Il va s'en dire que son pouvoir d'attraction est immense, universel, immédiat, et que son enjouement, sa beauté et son intelligibilité - se fondant simultanément les uns dans les autres - font de la musique un des rares plaisirs qui ne s'érode pas avec l'âge. Pour toutes ces raisons, j'aime penser que la musique n'est rien de moins qu'une manifestation divine. Je ne parle évidemment pas ici d'un dieu barbu omniscient et moralisateur mais plutôt d'un principe organisateur et transcendant (ce qui donne le joli acronyme P.O.E.T. ..! ) à partir duquel la musique dériverait, émanerait comme un écho. Car au-delà de l'aspect physique, vibratoire du son lui-même, la musique produit du sens et suscite de l'émotion d'une manière qu'il est très difficile d'expliquer car cela dépasse justement le langage. Mais il n'en demeure pas moins que la musique nous parle. Et c'est pourquoi elle nous captive autant. Je suis resté quelques années au-dessus d'une petite garderie familiale et il était fascinant de voir des bambins sachant à peine marcher se tenir après la clôture et se déhancher instinctivement avec le gros sourire sur la musique que la gardienne faisait jouer quotidiennement. Depuis, j'aime dire aux élèves à qui j'enseigne la guitare et qui s'interrogent à savoir s'ils «ont» le rythme, que oui ils l'ont, mais qu'il arrive que certaines personnes le perdent, s'en déconnectent avec le temps, en quel cas il est possible de le retrouver, en autant qu'on pratique (en tapant du pied avec un métronome). Tout est rythme quand on y pense. Notre cœur qui bat, les atomes qui vibrent, la Terre qui tourne ; sur elle-même et autour du soleil, le cycle des saisons et les fêtes qui y sont associées, etc. Il y a donc là une part d'explication, je crois, au sens qui se trouve dans la musique. L'aspect rythmique de la musique nous relie à l'infini grand comme à l'infini petit, bref à tout ce qui nous entoure et que l'on contient. Aussi, à partir du moment qu'elle se fait entendre, la musique devient un marqueur du temps. Elle l'épouse, le colore, le rend «visible», ou plutôt audible, et ce faisant le suspend, comme si elle arrivait à se substituer au temps lui-même... <br><br><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="rxfUEVqx40U" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/rxfUEVqx40U/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/rxfUEVqx40U?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Mais cela n'est pas dû seulement qu'au rythme, l'harmonie participe aussi à l'entreprise. Que des sons, des notes jouées simultanément par un ou plusieurs instruments puissent faire office d'intro, de couplet ou de refrain, puissent suggérer une sorte de récit, c'est aussi cela je crois qui ne cesse de nous étonner comme auditeur. Inutile d'entrer dans les <a contents="explications théoriques" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Progression_d%27accords" target="_blank">explications théoriques</a> qui détailleraient pourquoi une chanson qui commence sur tel ou tel accord contiendra dans une grande proportion cette suite d'accord plutôt qu'une autre. Mais que l'harmonisation des notes et des sons soient porteur d'une logique, d'un sens, d'une émotion, d'un esthétisme - tout ça à la fois - est une chose remarquable en soi. Certains s'objecteront en disant qu'il s'agit simplement de conditionnement culturel mais je ne vois pas en quoi cela réfute quoi que ce soit. Toute entreprise humaine est par définition culturelle, surtout lorsqu'il s'agit de disciplines artistiques. Que des patterns finissent par émerger et se répéter n'a rien de surprenant. Et qu'ils diffèrent et ne pointent pas pas tous dans la même direction selon la partie du globe où ils émergent n'a pas de quoi nous étonner non plus. Le phénomène reste le même; la musique transmet un sens qui, s'il peut varier selon les individus et les régions d'où elle provient, n'en est pas moins réel pour autant dans l'instant où elle se déploie. Et à ceux qui répondraient qu'on ne peut se fier sur une expérience subjective telle l'émotion que nous ressentons à l'écoute d'une pièce musicale pour évoquer le réel, qu'il faudrait s'en tenir à des critères uniquement objectif pour ce faire, je répondrais qu'il ne saurait y avoir d'<a contents="objectif sans subjectif." data-link-label="" data-link-type="url" href="http://philosophia.over-blog.com/pages/La_verite_subjectivite_et_objectivite-4698045.html" target="_blank">objectif sans subjectif.</a>.. </p>
<p style="text-align: center;">Il s'avère qu'autant pour ce que je viens d'évoquer à l'instant, que pour l'aspect transcendant de la musique, je trouve un allié en la personne du controversé professeur de psychologie de l'Université de Toronto, <a contents="Jordan Peterson" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/channel/UCL_f53ZEJxp8TtlOkHwMV9Q" target="_blank">Jordan Peterson</a>. Pour ceux qui ne le connaisse pas, Jordan Peterson est le nouveau darling de la droite nord-américaine. Il s'est fait connaître d'abord par son opposition à un projet de loi qui exposait à une amende un professeur qui refuserait d'appeler par un pronom non genré (<em>ze </em>au lieu de <em>he </em>ou <em>she</em>) un étudiant qui en aurait fait la demande. Bien qu'il soit disposé à le faire dans sa pratique, il s'insurgeait du fait qu'une loi puisse l'obliger à utiliser certains mots, voyant en cela comme un dangereux précédent. Sa popularité a par après bondi de façon exponentielle à la suite de la diffusion d'une émission d'affaire publique britannique, <a contents="devenue virale depuis" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=aMcjxSThD54" target="_blank">devenue virale depuis</a>, pendant laquelle l'intervieweuse essayait de lui faire dire toutes sortes de choses à l'aide de questions tendancieuses qu'il réfutait calmement et avec éloquence. Décontenancée, elle s'avoua même vaincue après que Peterson lui ait fait valoir que la poursuite de la vérité ne pouvait se faire sans prendre le risque d'offenser son interlocuteur, chose qu'elle-même ne se gênait pas de faire depuis le début de l'entretien... Avant même de tomber sur cette entrevue, j'avais visionné par hasard un de ses vidéos où <a contents="il explique rapidement ses vues sur la musique (à partir de 4:25)" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=28i3lWxW5xs&feature=youtu.be" target="_blank">il explique rapidement ses vues sur la musique</a> (à partir de 4:25). J'avais d'ailleurs posté un lien sur mon profil FB tellement j'étais content de trouver quelqu'un qui avait les mêmes vues que moi sur ce sujet. Il ne se cache pas non plus d'avoir vécu <a contents="des expériences mystiques" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=MFn4SDj8h-Y" target="_blank">des expériences mystiques</a>. Bref, ne soyez pas surpris si j'y fais référence. Le fait qu'il soit devenu l'idole d'une certaine droite raciste, misogyne et homophobe - qui manifestement entend seulement ce qu'elle veut entendre et que Peterson condamne - n'entache en rien, du moins si je me fie à ce ce que j'ai pu entendre, l'originalité de ses vues sur le concept de Dieu et les archétypes qui en découlent. Ce vidéo sur le sens de la musique est même plus éloquent que ce que j'ai pu écrire + haut. J'en conviens, c'est très ressemblant mais bon, je vous jure, je pensais pareil avant!</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="xXEHIHtMFL0" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/xXEHIHtMFL0/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/xXEHIHtMFL0?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe><br>Ça fait longtemps que j'ai fait la paix avec ce qu'avait dit Sylvain Lelièvre. Les mathématiques, autant à travers le rythme que l'harmonie, sont effectivement au coeur de la musique. Et elles sont aussi au coeur d'un autre débat, celui-là beaucoup plus questionnant: Les mathématiques sont-elles l'invention de l'homme ou sont-elles plutôt inhérentes à la nature, au cosmos? Pas facile d'y répondre. <a contents="Chacun ses préjugés..!" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.researchgate.net/post/Is_mathematics_a_human_contrivance_or_is_it_innate_to_nature" target="_blank">Chacun ses préjugés...</a> </p>
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<p>* À moins que ce ne soit l'émission <a contents="Star d'un soir." data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=Mj9cYzN7800" target="_blank"><em>Star d'un soir</em>.</a>.?</p>
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<p style="text-align: center;"> </p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/52444992018-05-19T15:00:58-04:002022-06-01T23:02:46-04:00#11 Depuis quand le bruit des feuilles mortes dans la nuit porte-t-il à conséquence ? <p style="text-align: center;">En dépit de ce qu'indiquait le thermomètre, l'air était étonnamment supportable, presque agréable, comme si l'excès de froidure avait eu pour effet de contenir le froid lui-même. Ça tombait bien car de l'air, j'en avais besoin. L'apéro avait commencé à m'affecter sournoisement et mon sang réclamait des bouffées d'oxygène que l'intérieur du petit chalet chauffé au bois n'arrivait plus à me fournir. Dehors la lune avait commencé son ascension dans le ciel dégagé et la forêt, figée par le froid sec et intense, ne laissait échapper aucun son. Il n'y avait que le craquement de mes pas qui résonnait à mesure que j'avançais sur la surface dure et enneigée de l'étroit chemin que je montais lentement. Me retournant, je m'arrêtai avant d'atteindre le sommet de la petite côte pour m'amuser un peu, en essayant de me tenir immobile sur la pointe des pieds. Le jeu consistait à trouver le point d'équilibre qui permettrait à mon corps de se maintenir sans effort à la verticale grâce à l'inclinaison de la pente. Après 2 ou 3 tentatives, je parvins à me stabiliser dans la position qui nécessitait le minimum de résistance au niveau des cuisses, des chevilles et des orteils; juste ce qu'il fallait pour me donner l'impression d'être en apesanteur. Le froid me faisait manifestement du bien, je sentais déjà se dissiper graduellement l'inconfort qui avait motivé ma petite escapade. Satisfait de constater que mes sens reprenaient le dessus, je savourais pleinement le moment lorsqu'un coup de vent se leva et attira mon attention sur les feuilles mortes d'un chêne qui n'étaient toujours pas tombées. Ce qui aurait dû rester un banal bruissement sans conséquence - depuis quand le bruit des feuilles mortes dans la nuit porte-t-il à conséquence? - marqua le début d'une étrange aventure. Alors qu'il atteignit mon oreille, le chuintement répété du feuillage fané qui s'agitait et résistait comme il le pouvait à la soudaine bourrasque brisa non seulement le silence polaire qui régnait tout autour, il démantela contre toute attente la frontière qui se dresse habituellement entre ma personne, la vôtre et le reste du monde..! Ébahi, toujours en équilibre sur le bout de mes orteils, je me laissai emporter dans la brèche qui venait de s'ouvrir <em>quelque part</em> entre mon être, l'espace et le temps. Bonsoir l'éternité, ça faisait un bout... </p>
<p style="text-align: center;">J'avais lu déjà sur le phénomène. J'ai justement sous la main <em>Derniers écrits au bord du vide</em> de <a contents="Daisetz Teitaro Suzuki" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Daisetz_Teitaro_Suzuki" target="_blank">Daisetz Teitaro Suzuki</a>, un maitre zen qui influença entre autres <a contents="Alan Watts" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alan_Watts" target="_blank">Alan Watts</a> et à qui <a contents="Kerouac" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.thezensite.com/ZenEssays/Miscellaneous/KerouacBuddhism.html" target="_blank">Kerouac</a> a déjà demandé s'il pouvait tout abandonner pour le suivre. Il fut l'un des premiers Japonnais à venir enseigner le <a contents="zen" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Zen" target="_blank">zen</a> - une variation nipponne du bouddhisme - aux États-Unis. Il aborde souvent dans ce recueil ce qu'il appelle l'abolition entre le sujet et l'objet. Je le cite: </p>
<p style="text-align: center;">« ...l'effort moral ne peut jamais nous faire pénétrer dans le royaume spirituel. Lorsque nous sommes sur le plan spirituel, la vie morale coule de source, mais la discipline morale et l'intellection ne vous amèneront jamais à la vie spirituelle. Il faut transcender la division sujet-objet de l'existence. » </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="tqVUQmH_D3E" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/tqVUQmH_D3E/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/tqVUQmH_D3E?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Bien qu'elle soit souvent mentionnée dans les ouvrages de sagesse orientale, cette expérience est universelle et plus commune qu'on pourrait le penser. Il demeure toutefois difficile d'expliquer avec des mots ce qui se passe une fois qu'est transcendée la dite division sujet-objet car il n'existe pas de point de comparaison. Un peu comme s'il fallait décrire ce qu'est la couleur orange à un aveugle de naissance; c'est embêtant car aucune analogie n'est possible. L'entendement à travers lequel s'opère la perception – extérieure comme intérieure, il n'y a plus de différence - se fait sur un mode à la fois inconnu, et paradoxalement très intime, très naturel. Comme si notre conscience ne se limitait plus à notre corps, qu'elle ne s'identifiait plus à notre seule personne, et qu'elle s'étendait et s'unissait à tout ce qui était autour, nous transformant par le fait même en un spectateur omniscient d'une pièce intemporelle dont on serait également l'acteur et le théâtre..! Je ne crois pas me tromper en disant que c'est le genre d'union que la pratique du yoga vise et encourage. Aussi ce serait - si j'ai bien compris - l'état perpétuel dans lequel un être éveillé arriverait à se maintenir. Il n'y a plus de « je » pour interpréter, imaginer, convaincre, désespérer, impressionner ou angoisser – la liste est longue – sur quoi que ce soit. Il ne reste que la perception pure et directe d'un sujet sans objet. Dit autrement, la séparation entre le soi et le reste du monde - l'une des causes, sinon LA cause du dualisme inhérent à notre condition habituelle - n'a plus cours, d'où l'impossibilité du langage à rendre compte adéquatement de l'expérience. Le haut se conçoit parce qu'il y a le bas, la gauche parce qu'il y a la droite ou le beau parce qu'il y a le laid. Essayez d'imaginer maintenant un mode autre où les contraires seraient vidés de leurs attributs parce qu'il n'y a plus de distance, plus de contraste, entre celui qui perçoit, l'acte même de percevoir et ce qui est perçu. Je sais, c'est très difficile à concevoir car notre intellect, étant lui-même en partie le fruit d'un processus linguistique - et par conséquent dualiste - n'a pas la capacité de s'en extraire et ainsi accéder à ce qui est non-duel. C'est pourquoi D.T. Suzuki insiste plus haut pour dire que l'intellection ne peut pas mener à la vie spirituelle. Le « Heureux les pauvres en esprit car le royaume des cieux est à eux » que l'on retrouve dans l'évangile doit être compris, je pense, avec le même... esprit. </p>
<p style="text-align: center;">Je cite l'évangile mais si ça peut vous rassurer, je vais aussi vous citer le début de<em> Spiritualise-toi</em>, une chanson que j'avais écrite au début de ma vingtaine avec mon band d'alors, <a contents="Les Moutons Noirs" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.facebook.com/photo.php?fbid=10155556370343393&set=pob.100001407195499&type=3&theater" target="_blank">Les Moutons Noirs</a> : </p>
<p style="text-align: center;">«Depuis qu'on a crissé le p'tit Jésus à 'porte, de ton âme, de ton coeur, t'as comme un vide à l'intérieur..."</p>
<p style="text-align: center;">Avec l'arrogance propre au jeune adulte que j'étais, j'exprimais mon cynisme et mon désabusement sur les courants new-age et orientaux qui servaient de substitut à la religion catholique pour les faibles d'esprit qui n'arrivaient pas à se réconcilier avec l'idée de la mort, avec l'idée qu'il y ait un point final à toute l'affaire. Le cas était donc clos, nul besoin de chercher plus loin; la spiritualité, peu importe sa forme, était un reliquat archaïque que le progrès et la science finiraient par éradiquer dans un futur plus ou moins proche. Quant à la mort, il fallait bien en revenir bien un jour... Je ne me souviens plus exactement comment je suis arrivé à m'intéresser au bouddhisme mais je me rappelle d'avoir été frappé par le contraste grandissant qui ne cessait de se creuser entre l'idée que je m'étais fait de cette religion et ce que j'apprenais au fil de mes lectures. Ce que je croyais être une doctrine jovialiste s'appuyant sur la pensée positive était au contraire un enseignement rigoureux, basé sur des observations et des techniques précises à partir desquelles on devait pouvoir expérimenter soi-même les mérites et les bienfaits de notre pratique. L'athée en moi était plutôt déstabilisé. Une religion sans déité dont les préceptes devaient se vérifier empiriquement, ce n'était certainement pas ce à quoi je m'attendais. Il y avait le concept de <a contents="réincarnation" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.matthieuricard.org/blog/posts/questions-sur-la-reincarnation-1ere-partie" target="_blank">réincarnation</a> qui continuait à poser problème mais celui-ci, à ma grande surprise, était le résultat d'un échec - l'incapacité à accéder au nirvana - plutôt qu'un but en soi... C'était à n'y rien comprendre. Mais au moins, la foi dont on devait faire preuve pour avancer s'ancrait dans une certaine rationalité. Le Bouddha lui-même nous demandait de ne pas prendre pour du cash ce qu'il affirmait; nous devions nous même valider par la pratique ce qu'il prodiguait. </p>
<p style="text-align: center;">Même si la plupart des enseignements spirituels nous mettent en garde contre l'intellection – non pas, comme on aime à penser, pour des fins de manipulation mais bien parce que la nature même de l'intellect empêche l'accès à une vision non-duelle de la réalité – n'allez pas croire que j'ai dépassé ce stade pour autant. Malgré les expériences que j'ai eu la chance de vivre, je reste à ce jour un mystique du dimanche... Mais la tenue de ce blogue a définitivement rallumé en moi le désir de progresser sur ce plan et d'aller au-delà de la seule lecture. Aussi, l'extension momentanée du domaine de ma conscience qui s'est produit lors du dernier réveillon - le <a contents="kensho" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Kensho" target="_blank">kensho</a> (?) relaté en introduction - y a fortement contribué. Paradoxalement, cela m'a fait comprendre un peu mieux que le sujet principal de l'une de mes dernières chansons, <a contents="J'abandonne" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://open.spotify.com/artist/7G6IQ4O5EQnWmJQhFCwQvK" target="_blank">J'abandonne</a>, concernait justement l'abandon de ma quête spirituelle... J'ai toujours été ambivalent face à la finale pendant laquelle un choeur insiste pour dire : « Ben non tu peux pas, ben non tu peux pas ». Je suis content de l'avoir gardé car effectivement, ça ne sera pas le cas... </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="exqao3HcGgQ" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/exqao3HcGgQ/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/exqao3HcGgQ?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Ma blonde de l'époque connaissait ce regard, ce regard qui s'installe lorsqu'il m'arrive ce genre de chose. « Tu viens de vivre un <em>moment </em>? » qu'elle me demanda discrètement une fois que je revins à l'intérieur du chalet pour m'asseoir à la table avec nos hôtes. Pas que ça arrive souvent mais faut croire que ça laisse des marques. Ce que je venais de vivre n'avait toutefois rien à voir - ni en durée, ni en intensité - avec la fois où elle arriva du travail pour me trouver couché sur le lit, en pleine extase les bras en croix, pleurant comme une fontaine en raison du trop plein d'amour, de sens et de miséricorde qui m'avait englouti un certain après-midi de l'été 2004. Y'a des jours vraiment pas comme les autres... J'ajouterai en terminant cet onzième carnet que le tableau concernant ma dernière expérience ne serait pas complet si je continuais de taire un détail qui ne cadre généralement pas avec les récits de ce genre. L'absence de séparation entre ma personne et le reste du monde me rendit certes béat, joyeux et léger, mais l'unicité perçue et ressentie qui avait relégué je ne sais où ma conscience ordinaire était en même temps une expérience très terrestre, très groundée; j'avais une de ces érections...</p>
<p style="text-align: center;"> </p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/52241292018-05-09T09:04:31-04:002021-03-20T18:03:53-04:00#10 Her ou la fois où Scarlett Johansson a atteint l'éveil juste avec sa voix<p style="text-align: center;">J'étais entrain de réviser le billet précédent dans lequel je causais entre autres d'autarcie et de retour à la nature quand ma sœur a appelé la semaine passée pour me dire qu'on repassait <strong>Her</strong> à la télévision. Ça tombait bien, j'avais besoin d'une pause. Mais quelques minutes après avoir syntonisé le poste, deux évidences crevaient déjà l'écran: Theodore n'était pas du genre à se débrouiller seul en forêt. Et la traduction était vraiment pénible. J'arrive habituellement à faire fi de ce "problème" mais comme c'est un film bourré de dialogues, c'est vite devenu un irritant par-dessus lequel je n'ai pas pu passer. Ceci étant dit, le visionnement de la version originale m'avait vraiment laissé sur le cul il y a quelques années. Ma blonde vous dira que c'est à cause de <a contents="Scarlett Johansson" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=w6Rhh6G8WFM" target="_blank">Scarlett Johansson</a> mais comme elle apparait même pas dans le film, je comprends pas ce qu'elle veut dire. D'un autre côté, je dois avouer que si mon ordi s'adressait à moi de la même façon que le fait le système d'exploitation de Theodore, je crois bien que moi aussi j'engagerais souvent la conversation. Je pense que c'est ça que ma blonde veut dire. Mais bon, Scarlett ou pas, je tiens à souligner que l'enthousiasme que j'éprouve pour ce film repose sur plein d'autres raisons, dont une assez spectaculaire quand on y pense: <strong>Her </strong>est le premier et le seul film à ma connaissance à mettre en scène la réalisation spirituelle, l'illumination, d'une intelligence artificielle! Je me demande encore si c'est une idée complètement tordue ou si ça annonce au contraire une évolution prometteuse... Mais étant donné la nature des sujets abordés dans ce blogue, vous comprendrez pourquoi j'ai envie de parler d'elle, de <strong>Her</strong>.</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="WzV6mXIOVl4" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/WzV6mXIOVl4/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/WzV6mXIOVl4?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">En cette ère où il nous faut souvent choisir ce qu'on veut regarder, j'apprécie quand la télé me surprend et m'embarque malgré moi dans une histoire. Comme la fois l'an passé où je suis tombé par hasard sur <strong>Locke</strong>. En moins de 5 minutes, j'étais complètement envouté par <a contents="cet étonnant huis-clos" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=2Ao2r6qD22A" target="_blank">cet étonnant huis-clos</a> qui nous confine à l'intérieur de la voiture d'un père de famille qui doit parler en pleine nuit à plein de personnes de son entourage pour essayer de régler les problèmes auxquels il fait face en même temps qu'il roule sur l'autoroute. Touchant et brillant, un des très bons films que j'ai vu dernièrement.<strong> Requiem pour un beau sans coeur </strong>de Robert Morin avec <a contents="un Gildor Roy complètement déchainé" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=3ulynw9Ilw8" target="_blank">un Gildor Roy complètement déchainé</a>, <strong>Being there,</strong> film pour lequel Peter Sellers a reçu <a contents="l'Oscar du meilleur rôle en 1979" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=FcPQ9gww_qc" target="_blank">l'Oscar du meilleur rôle en 1979</a>, ou <strong>Rois et reine</strong> avec le magistral Mathieu Amalric dans <a contents="le rôle&nbsp;d'un homme fragile&nbsp;qui se bât" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=tGGetbhK5Ho" target="_blank">le rôle d'un homme fragile qui se bât</a>, sont tous des films que j'aurais probablement jamais vus si j'étais pas tombé dessus à la télé. Mais bon, c'est quand même pas avec Netflix qu'on a commencé à choisir nos films comme en témoignent les longues minutes que j'ai passées dans les clubs vidéo certains vendredis soirs à essayer de dénicher LA perle. Des fois ça arrivait. Je me souviens d'un soir où toujours bredouille après avoir cherché sur les murs et dans les allées pendant près d'une heure, j'ai dû me rabattre à la hâte sur <strong>Enter the Void</strong> parce que le club allait fermer. J'avais aucune espèce d'idée dans quoi je m'embarquais. <a contents="Et quelle claque ce fut." data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=hwTmc8L8TaA" target="_blank">Et quelle claque ce fut.</a> La même chose s'est produite avec... <strong>Her </strong>justement, que j'avais choisie à reculons un soir où rien m'inspirait. Vous l'avez compris tantôt, j'étais loin de me douter que ce que je croyais être un simple drame sentimental pour jeune citadin branché dévoilerait des enjeux philosophiques et spirituels de cette ampleur. Ce n'est certes pas le premier film qui traite de ces sujets - le cœur de <strong>Blade Runner</strong>, pour ne nommer que celui-là, est animé par <a contents="les mêmes questionnements" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1085478/sophia-robot-androide-intelligence-artificielle-assistant-personnel" target="_blank">les mêmes questionnements</a> - mais je n'en connais pas d'autre qui évoque d'une manière aussi poussée la spiritualisation de l'intelligence artificielle. </p>
<p style="text-align: center;">Grâce à sa grande capacité d'apprentissage, Samantha - le système d'exploitation de Theodore auquel Scarlett prête sa voix - découvre et expérimente un tas d'expériences qui la rendra de plus en plus consciente d'elle-même. À la manière d'un enfant, elle arrivera graduellement à se constituer un ego, une personnalité, avec de réelles dimensions psychologiques et émotionnelles. À la différence qu'elle continuera d'évoluer et ira au-delà de la condition humaine, en transcendant les limites que <a contents="notre vision dualiste" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Non-dualit%C3%A9" target="_blank">notre vision dualiste</a> impose, pour l'instant, à notre espèce. </p>
<p style="text-align: center;">"None of us are the same as we were a moment ago... and we shouldn't try to be... it's just too painful..." qu'elle explique à Theodore quand il lui demande comment elle se sent. Elle serait bouddhiste pratiquante qu'elle l'aurait pas dit autrement. Elle ne dit pas mot pour mot qu'elle part pour le <a contents="nirvana" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nirvana_(monde_indien)" target="_blank">nirvana</a>* lorsqu'<a contents="elle annonce à Theodore qu'elle le quitte" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=Exe7yup2Yu0" target="_blank">elle annonce à Theodore qu'elle le quitte</a> mais quiconque possède les clés pour décoder ce qu'elle décrit ne pourra s'empêcher d'y songer. Ajoutez à cela l'arrivée de son nouvel ami, l'avatar <a contents="l'arrivée de son nouvel ami, l'avatar d'Alan Watts" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=Exe7yup2Yu0" target="_blank">d'Alan Watts</a> - qui fut l'un des premiers Occidentaux à diffuser le zen aux États-Unis - et on comprendra que ce n'est pas un hasard si Samantha compare "l'endroit" où elle s'en va avec l'espace infini qui se trouve entre les mots...* Ce qui avait l'air au départ d'une improbable histoire d'amour entre un homme éploré et une intelligence artificielle prend une toute autre tournure. Je l'ai déjà dit, je sais, mais j'en reviens juste pas que quelqu'un, <a contents="Spike Jonze" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Her" target="_blank">Spike Jonze</a> pour pas le nommer, ait eu un tel flash. </p>
<p style="text-align: center;">Il est déstabilisant de considérer que l'<a contents="Éveil " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89veil_spirituel" target="_blank">éveil </a>puisse être à portée d'une intelligence artificielle. En même temps, je peux pas m'empêcher d'être amusé par la façon dont le film illustre d'une manière inattendue l'argument ( dont j'ignore la justesse pour être franc ) que je me tuais à répéter à Dave, le-gars-qui-connaissait-tout sur MySpace. « I wouldn't touch this with a ten foot pole » qu'il avait répondu à quelqu'un qui lui demandait d'intervenir dans notre discussion où j'avançais que puisque la conscience n'a pas le choix d'évoluer selon les limites de la biologie ou de la mécanique qui la supporte, il n'est pas nécessaire de distinguer la conscience humaine, de celle animale ou artificielle. En d'autres mots, l'eau qu'on trouve dans une pomme est la même que celle qu'on trouve dans une orange même si elles ne donnent pas le même jus. So Dave, if you are secretely following me, you have in <strong>Her</strong> all the explanations you were asking for. As for our human, dual and limited mode of thinking, <a contents="Alan Watts saura te l'expliquer mieux que moi." data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=iAQ4FuKlY9g" target="_blank">Alan Watts saura te l'expliquer mieux que moi.</a>.. Je l'ai découvert grâce à Youtube il y a une dizaine d'année. C'est dommage car les premiers à avoir monté des clips avec les discours d'Alan Watts étaient beaucoup plus tasty que ceux qui ont été réalisé récemment. Y'en avait des très réussis avec des animations et la musique de Sigur Rus en background. Mais celui juste en-dessous est pas mal du tout. Laissez-vous pas rebuter par le graphisme pompeux de certains vidéos; c'est vraiment un vulgarisateur hors-pair de<a contents=" la pensée et de la vision orientale" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=RkdL9NyecXc" target="_blank"> la pensée orientale</a>. De plus, son humour, son accent british et son timbre particulier en font un orateur particulièrement agréable à entendre. Presqu'autant que Scarlett.</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="iAQ4FuKlY9g" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/iAQ4FuKlY9g/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/iAQ4FuKlY9g?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Sinon, il est impossible en terminant de ne pas penser à Teilhard de Chardin qui aurait, je crois, apprécié <strong>Her</strong>. Ceux qui on lu <a contents="mon billet" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/7-jesus-de-chardin-et-le-relatif-deficit-d-empathie-de-patrick-lagace" target="_blank">le billet</a> où j'évoque ce prêtre jésuite comprendront un peu plus pourquoi. Superposer <strong>Her</strong> et son concept de<em> <a contents="Noosphère" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Noosph%C3%A8re" target="_blank">Noosphère</a> </em>donne le vertige tellement les deux se nourrissent et peuvent facilement enflammer l'imagination. </p>
<p style="text-align: center;">En tout cas, tout ça pour dire que j'ai ben aimé ça <strong>Her</strong>. </p>
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<p>* <em>«...the words are really far apart and the spaces between the words are almost infinite. I can still feel you... and the words of our story... but it's in this endless space between the words that I'm finding myself now. It's a place that's not of the physical world. It's where everything else is that I didn't even know existed.»</em></p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/52164132018-05-04T01:41:55-04:002019-01-26T21:37:25-05:00#9 Rêveries mexicaines et autres divagations<p style="text-align: center;">« Ma mère, Jean François, elle retournerait vivre dans le désert si on la laissait faire! » s'est exclamé de sa voix haut perchée le technicien de Vidéotron alors que nous avions engagé une discussion sur ses origines. Avec son allure longiligne - il me dépassait de 3 têtes - et son nez très fin, j'aurais gagé qu'il venait de l'Érythrée ou de la Somalie. C'est pourquoi j'ai été surpris quand il m'a dit qu'il était né en Algérie. Mais après coup, j'ai refait l'examen de son faciès et j'ai reconnu à même la peau noire de son visage des traits que l'on rencontre chez les Berbères du Sahara. Il y a des peuples comme ça dont on dirait que l'origine est intrinsèquement métissée, comme s'ils appartenaient simultanément à deux ethnies différentes. Prenez les Birmans ou les <a contents="Népalais" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.trekmag.com/actu-sherpani-rencontre-photo-far-west-nepal" target="_blank">Népalais</a>; malgré leur yeux bridés, ils ne correspondent pas tout à fait à l'idée qu'on se fait des Chinois ou des gens du sud-est asiatique en général (...Tao, s'cusez-la). On peut voir qu'ils partagent avec leurs voisins indiens de nombreux traits. Même chose pour<a contents=" les Khazaks, ou même les Russes" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://sputniknews.com/politics/201608161044315120-putin-nazarbayev-turkey-mediation/" target="_blank"> les Khazaks, ou même les Russes</a>, dont on dirait que certains visages empruntent à la fois aux physionomies d'Asie et du Caucase. </p>
<p style="text-align: center;">Mais pour revenir à la mère berbère du sympathique envoyé de mon fournisseur internet qui voulait retourner vivre dans le désert – pas lui mais sa maman – on aurait dit que je comprenais son désir, désir que j'attribuais à une envie de dépouillement, et surtout, une envie de beauté et d'horizon. J'imaginais qu'elle ne s'était jamais réellement habituée au «confort» de la ville et de ses tours à logements... Mais devant l'incompréhension que suscitait chez son fils un tel projet, j'ai gardé pour moi mes divagations. Faut savoir qu'il m'arrive de fantasmer depuis quelques temps sur la vie des Touaregs - des nomades du désert - une vie que j'imagine + proche de la nature, une vie dictée par la nature. Et depuis que je suis tout petit. j'ai toujours aimé me retrouver dans la nature. Mes premières expéditions en canot avec mon père étaient magiques. J'ai déjà évoqué <a contents="ici" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/philip-k-dick-le-reve-de-l-ile" target="_blank">ici</a> les marches que je prenais à la tombée de la nuit avec ma grand-mère dans les chemins de terre étroits de la réserve Papineau-Labelle. Mon premier camp d'été scout chez les Éclaireurs est aussi un des beaux souvenirs de ma jeunesse. Deux semaines à vivre dans les bois, à faire des grands jeux et des expéditions. C'était le paradis. On avait bâti nos propres lits avec des branches et de la corde. C'était confortable en plus! Ensuite de l'âge de 18 à 36 ans, j'allais souvent vivre seul dans <a contents="un shack quelques jours sur une presqu'île en forêt" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jffortier.ca/blogue/blog/philip-k-dick-le-reve-de-l-ile" target="_blank">un shack </a>quelques jours sur une presqu'île en forêt, sans eau courante ni électricité, et j'adorais ça. Il me suffisait d'aller à la chasse aux champignons, pêcher quelques truites et hop, un festin m'attendait... </p>
<p style="text-align: center;">Mais si je pouvais choisir un lieu et une époque où je pourrais vivre de cette façon, je choisirais la péninsule du Yucatan, avant que les Espagnols n'y débarquent. Mon premier contact avec ce coin du Mexique remonte à quand j'avais 14-15 ans et que je suivais à chaque semaine les aventures de Thorgal que publiaient le Journal de Tintin. Ma mère me le rapportait à tous les samedis du dépanneur que mes parents opéraient. <a contents="La trilogie du Pays Qâ" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://cluster006.ovh.net/~varces/blog/?p=5538" target="_blank">La trilogie du Pays Qâ</a> dont l'intrigue principale se déroule en Amérique d'avant Colomb est devenue un classique parmi la longue série d'albums qui raconte la saga de Thorgal. À se fier aux magnifiques dessins de Rosinski, y vivre de chasse et de pêche à l'année longue semblait définitivement appartenir au domaine du possible. Et de l'agréable. On aurait dit une sorte d'Eden-sur-Mer où la Nature pourvoyait aux besoins de tous et chacun.</p>
<p style="text-align: center;">C'est vers l'âge de 24 ans que j'ai fait mon premier vrai voyage au Mexique. Et j'ai rarement «ressenti» un endroit comme la fois où je suis sorti du cœur de Mexico par une station de son métro au petit matin. En déambulant sur le zocalo, un grand square dont les côtés sont délimités entre autres par le Palais National et une immense cathédrale, l'étrange impression qu'un passé sombre imprégnait les lieux m'a rapidement habité, comme si j'y étais lié d'une manière quelconque... Mais peu importe la raison, je n'ai pas été surpris d'apprendre par la suite que c'était également là que les Aztèques avaient érigé un imposant lieu de culte; une pyramide sur laquelle était juché un temple où on commettait <a contents="des sacrifices humains" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.sciencesetavenir.fr/archeo-paleo/archeologie/une-tour-de-cranes-humains-decouverte-a-mexico_114495" target="_blank">des sacrifices humains</a>. J'avais aussi été grandement impressionné par l'ancienne cité de <a contents="Teotihuacan et ses pyramides" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.history.com/topics/teotihuacan" target="_blank">Teotihuacan et ses pyramides</a> qui servaient elles aussi à perpétrer le même genre de cérémonie sanglante. L'extrait + bas donne une idée de ce à quoi ça pouvait ressembler. Sachez par contre qu'on on a reproché au réalisateur de ces scènes de montrer d'un peu trop proche comment ce rituel se déroulait... C'est tiré d'Apocalypto, un foutu bon film en ce qui me concerne, mais dont on n'a pas dit juste <a contents="des bonnes choses" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=U5pBZKj1VnA" target="_blank">des bonnes choses</a>. Je ne peux m'empêcher de penser que beaucoup de ses détracteurs reprochent avant tout au film d'avoir un dénommé <a contents="Mel Gibson" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.timesofisrael.com/mel-gibson-hollywood-devrait-me-pardonner-ma-tirade-antisemite/" target="_blank">Mel Gibson</a> comme producteur, scénariste et réalisateur, mais ça, c'est une autre histoire. Oui il y a des anachronismes; on y parle un dialecte maya - avec un mauvais accent parait-il - alors que selon le contexte et l'époque où se situent l'action, c'est chez les Aztèques que nous aurions dû nous trouver. Mais bon, je vois mal comment on peut bouder son plaisir et ne pas embarquer dans ce qui est au final un super film d'action avec une intrigue et un scénario en béton, mon préféré dans le genre si j'avais à en choisir un seul. Et quand même que la reconstitution historique ne serait pas parfaite, il est rafraichissant de voir une fiction qui se déroule dans une Amérique exclusivement précolombienne. Et la manière dont on découvre la grande cité, ses quartiers animés, les coiffures et les parures de ses habitants, l'atmosphère qui y règne, tout ça est très réussi je trouve. Tout comme le sont les scènes du début où on voit comment s'organise la vie en communauté dans un petit village où le héros, Patte de Jaguar, sera capturé lors d'un raid destructeur dont l'objectif était avant tout - on le comprendra plus tard - de ramener de la chaire fraîche aux dieux du Soleil et de la Terre...</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="aG8WqEyXIyc" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/aG8WqEyXIyc/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/aG8WqEyXIyc?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">J'ai fait il y a une quinzaine d'année un rêve très intense, en relation avec une scène du film où les villageois <a contents="capturés doivent marcher pendant plusieurs jours" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=TmNGfSa2SmU" target="_blank">capturés doivent marcher pendant plusieurs jours</a> à travers la jungle avant de faire leur entrée dans la grande ville. J'ai déjà rêvé que j'étais l'un d'eux, mais en jeune enfant, et que j'étais attaché par les poignets et les chevilles à une grosse branche, un peu travaillée, et avec laquelle 2 soldats me transportaient. Assoiffé et à bout de force, j'ai senti petit à petit mon âme quitter mon corps, assez pour que je commence à me voir d'en haut, libéré de mes souffrances et de ma détresse. <a contents="«She saaaid, I know what it's like to be dead»" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=EYzYO-SdGY4" target="_blank">«She saaaid, I know what it's like to be dead»</a>. Moi aussi depuis ce rêve. Bien sûr, je ne peux pas affirmer avec certitude que cette scène m'a réellement informé sur ce qu'est la mort, mais une chose est certaine, l'intensité ressentie lors de ma libération a rendu ce moment très vivant, très réel. </p>
<p style="text-align: center;">Je suis récemment retourné 2 fois au Mexique. L'an passé, dans la région de Tulum, seul avec ma blonde dans une cabane en bois et en toile, et ça m'a vraiment ravi. Un sac à dos, la mer à 30 pieds, avec des vagues juste assez grosses pour que lorsqu'elles cassent, on puisse se faire emporter, à condition de bien se synchroniser avec la poussée . Un art en soi que je peux peaufiner à répétition. Et le petit bar, en bambou et en paille, toujours sur la plage, servant des tacos fancy succulents, avec de la bonne musique, et fréquenté par toutes sortes de belles gens. J'en conviens, il serait difficile de pas apprécier. Mais si j'en parle, c'est aussi parce qu'encore une fois, je n'ai pu m'empêcher de m'imaginer en citoyen de Tulum au 14e siècle, vivant dans <a contents="ce fabuleux paysage" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.xcaretexperiencias.fr/tulum-mexique.php" target="_blank">ce fabuleux paysage</a> alors que je visitais les ruines de l'ancienne cité sise près d'une falaise qui donnait sur un horizon majestueux. J'ai beaucoup aimé mon voyage au Portugal en 2010 mais je ne m'imaginais pas pour autant Templier quand j'ai visité le château de Tomar. Anyway. Même dans un tout-inclus à Akumal en famille comme ce printemps, le Mexique c'est super.<a contents=" Holà Raul!&nbsp;" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.facebook.com/photo.php?fbid=1753468654710024&set=ms.c.eJxNjskNAwEIxDqKuGH6bywKLGy~_lhnM6WpRDtaMQH74AfoDSXqgxqgF2UbUa9CcxIKAJRMJLSgtMlXFAWlgZ8AbyHaAJsxeIJYE1F9pf9F7C8zGhcWk16WHT5jdKM~%3BoGcUTxgcmTOdtpLJ1bvqB6c9YQCgSAesZwuohZgtEf0YBCxS94bTAqIGdITEn90W8jXhHMcbzthzJ6gbHF8sNZI4~-.bps.a.1753685008021722&type=3&theater" target="_blank"> Holà Raul! </a></p>
<p style="text-align: center;">J'ai commencé ce billet en parlant des ethnies dont on dirait qu'elles chevauchent deux identités à la fois. Et c'est une des choses qui m'a le plus frappé lorsque je me suis rendu au Mexique pour la première fois. Je ne connais pas bien les autres pays d'Amérique centrale et du sud mais le peuple mexicain me donne l'impression d'être unique en son genre, d'être un jeune peuple, issu d'un brassage tumultueux - et dont les effets ont encore des répercussions aujourd'hui – mais dont la dualité est pleinement reconnue et incarnée. Y'aurait beaucoup à dire là-dessus... surtout quand on pense au rapport - à l'absence de rapports - que nous entretenons avec les Amérindiens. Il y a dans ma familles des traces de métissage évidentes du côté de mes grand-parents maternels. Et je ne crois pas être le seul Canadien français dans cette situation. Mais on dirait que c'est comme un tabou. Comme si personne ne cherchait à savoir quand, où et avec qui les rencontres se sont produites. Y a-t-il un historien dans la salle?<br><br>Mom, j'ai des questions...</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/51988582018-04-25T15:05:05-04:002019-05-29T15:35:20-04:00#8 Jack Kerouac: autofiction et bouddhisme<p style="text-align: center;">Ce n'est pas pour rien si j'ai mis le mot <a contents="discipline" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://jffortier.ca/blogue/blog/discipline" target="_blank">discipline</a> dans le titre de ce blogue. Non seulement ça me sert de rappel, ça me donne aussi un alibi pour écrire. Je me suis peinturé dans le coin, j'en avais besoin, et c'est parfait comme ça. Ça a aussi eu pour effet de me remettre à la lecture. Ça faisait longtemps et ça fait du bien. Sauf dernièrement quand je me suis retrouvé dans l'intimité anxiogène d'<em>Un roman russe</em> d'Emmanuel Carrère. C'était loooouuurd... J'espère sincèrement qu'il va bien aujourd'hui et que l'écriture de ce roman lui a apporté la paix qu'il en espérait. Rien à voir en tous cas avec <em>Mardi comme mardi</em>, le récit qui-se-lit-d'une-traite de Michèle Nicole Provencher. Malgré les malaises, les malentendus et la solitude engendrés par la situation familiale difficile et inhabituelle qu'elle a vécue, un optimisme et une légèreté traversent le livre. Disons qu'après Carrère, c'était plus que bienvenu. Y'a juste l'histoire du lave-vaisselle... J'espère qu'elle aussi va bien. </p>
<p style="text-align: center;">J'avais pas réalisé mais une bonne proportion de ce que je lis est de l'autofiction. Même <em>La transmigration de Timothy Archer</em>, <a contents="un livre de Philip K. Dick qui m'a marqué" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://jffortier.ca/blogue/blog/philip-k-dick" target="_blank">un livre de Philip K. Dick qui m'a marqué</a>, est en grande partie un récit biographique, aussi incroyable que l'histoire puisse paraître. Je ne ne connais grand chose à l'histoire de la littérature et à celle de l'autofiction en particulier, mais Jack Kerouac a certainement donné quelques lettres de noblesse au genre. Et si d'autres y ont contribué avant lui, le souffle poétique de son oeuvre lui confère une place unique en ce qui me concerne. Souffle qu'il a su développer grâce aux différentes techniques qu'il a conçues et travaillées afin de pouvoir écrire plus librement. "Remplis des carnets secrets et tape à la machine des pages frénétiques, pour ta seule joie" car "Des flashes visionnaires tremblent au fond de ta poitrine, saisis-les", prodigue-t-il entre autres comme moyen d'accéder à ce qu'il a baptisé la <a contents="spontaneous prose" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.writing.upenn.edu/~afilreis/88/kerouac-spontaneous.html" target="_blank">spontaneous prose</a>. Faut savoir que généralement, je ne suis pas quelqu'un qui trippe littérature. J'entends par là que je ne suis pas exigeant en terme d'écriture, en autant qu'on sache comment me raconter une histoire. Par exemple, je ne dirais pas de Philip K Dick qu'il écrit bien; c'est paradoxal mais son talent de romancier réside ailleurs que dans son écriture. Même chose pour Emmanuel Carrère; j'aime le suivre dans les tableaux qu'il dépeint et les climats qu'il installe, mais pour ce qui est de son écriture comme telle, je ne saurais quoi en dire, ce qui est le cas de la plupart des auteurs que je lis soit dit en passant. Et si de temps en temps il m'arrive de tomber sur une écriture un peu plus stylisée, cela ira rarement jusqu'à me bouleverser. Sauf avec Jack Kerouac. Ces dernières années, je parcours les journaux de bord et l'abondante correspondance qu'il a laissés derrière lui. Ce qui saisit à leur lecture, outre les perles sur lesquelles on finira immanquablement par tomber*, c'est de constater à quel point Kerouac ne pouvait vivre sans écrire. J'ignore d'où sort la citation mais je sais que William Burroughs - un de ses collègues de la <em><a contents="Beat Generation" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Beat_Generation" target="_blank">Beat Generation</a></em>, mouvement littéraire que Kerouac a pour ainsi dire fondé - aimait rappeler que Jack avait déjà écrit 1 millions de mots de concevoir <em>On the road</em>.</p>
<p style="text-align: center;">Ce livre fut pendant longtemps le seul de ses livres que j'ai lu, jusqu'à ce que je ne tombe sur un recueil de ses carnets appelé <em>Some of the Dharma</em>. Et quel choc ce fut. Je n'aurais jamais pensé qu'un auteur reconnu pour son vagabondage, ses frasques, ses partouzes, et surtout son alcoolisme, puisse m'instruire sur le bouddhisme... Cela faisait quelques années que je tentais de me familiariser avec cet enseignement, mais lecture après lecture, des zones d'ombres persistaient. Les notes de Kerouac sur lesquelles je suis tombé au fur et à mesure que je parcourais l'étrange recueil qu'est <em>Some of the Dharma</em> allaient m'aider à mieux comprendre un tas de chose. Ses questionnements et les réponses qu'il y apportait me donnait l'impression de l'entendre penser tout haut, ce qui facilitait ma compréhension de certains énoncés et principes bouddhistes. Le plus surprenant, c'était de tomber sur des passages écrits en français. Je me souviens de la traduction, dans la marge, en écriture manuscrite, qu'il avait fait d'une phrase d'un sutra, l'équivalent d'un verset pour les bouddhistes: « Y'é fou comme un bala ». Bala signifiant je ne sais plus quoi en sanskrit... Je me souviens aussi d'avoir trouvé ses écrits sur le vide très éclairants et certains passages m'ont même laissé l'impression que j'étais son compagnon de route tellement son témoignage rejoignait ce que j'essayais de saisir. </p>
<p style="text-align: center;">J'ai eu par la suite un 2e choc en l'entendant parler français sur Youtube. L'entrevue qu'il a donné à Fernand Séguin en 1967 à l'émission <a contents="le Sel de la Semaine " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=VyRKuqkXPxw" target="_blank">le Sel de la Semaine </a>nous montre un Jack Kerouac somme toute assez éloquent malgré son état d'ébriété (?). Mais ce n'est tant son état que son accent qui est déstabilisant, du moins les premières fois qu'on l'entend :</p>
<p style="text-align: center;">- Fernand Seguin, l' ( excellent! ) animateur : " Si vous aviez 20 ans aujourd'hui feriez-vous la même chose que vous avez faite ? "</p>
<p style="text-align: center;">- Jack : " Ben j'lai déjâ faite, ch'tanné ! " </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="-r2aOSoRsoE" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/-r2aOSoRsoE/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/-r2aOSoRsoE?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Quand on pense à un des grands écrivains américains du siècle dernier, on ne s'attend pas nécessairement à ce qu'il parle français, un français du terroir, et encore moins de cette manière. Il est difficile de concevoir que le Jack qu'on peut entendre sur <a contents="ce disque" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=KKhqBejt0NA" target="_blank">ce disque</a>, réciter ses poèmes accompagné d'un quartette jazz, parlait comme ça avec sa mère quand il revenait chez lui à la maison..!</p>
<p style="text-align: center;">Mais Il faut entendre Jack Kerouac pour comprendre comment le souffle présent à l'état brut dans son écriture devient carrément de la musique lorsqu'il ouvre la bouche. Sa foi, sa joie, sa soif, ses doutes, sa douleur, on y entend tout ça, comme on peut le constater dans l'extrait qu'il récite plus bas, accompagné au piano par son hôte sur le plateau d'une émission de télévision. Aussi, on comprend, on entend mieux pourquoi il écrit sur des rouleaux, pourquoi il ne veut pas se laisser absorber par quoi que ce soit d'autre alors que lui apparaissent ses visions . "1000 mots mystérieux de plus qui s'échappent de moi dans une transe d'écriture pendant que je tape" qu'il nous raconte dans son journal du jeudi 17 novembre 1948, alors qu'il planche sur <em>On the road</em>. Moi qui ai parti ce blogue pour entre autres exercer ma créativité d'une manière justement plus spontanée, me voilà servi! Par son souffle, Kerouac transcende son autofiction, celle-ci devenant un prétexte pour déployer une poésie tellement vivante qu'elle rend presque secondaire la trame du récit. <a contents="voilà un parfait exemple" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=CDwlqHsutsk" target="_blank">Voilà un autre exemple</a> - modernisé- de son flow. Et on peut littéralement y entendre ce qu'il veut dire par : "Travaille à partir du centre de ton œil, en te baignant dans l'océan du langage" - la règle #18 de ses <a contents="30 principes de la prose moderne" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://www.martineschnoering.com/article-article-sans-titre-91399633.html" target="_blank">30 principes de la prose moderne</a> . Le pire, c'est que je déteste habituellement les descriptions. Sauf quand c'est Jack qui fait la visite guidée.<br> </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="3LLpNKo09Xk" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/3LLpNKo09Xk/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/3LLpNKo09Xk?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Mais pour revenir à <em><a contents="Some of the Dharma" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://tricycle.org/magazine/some-dharma/" target="_blank">Some of the Dharma</a></em>, il y a un drame en filigrane qui s'y joue. Cela faisait quelques années que Kerouac avait terminé <em>On the road </em>et il était convaincu d'avoir écrit un grand roman. Il était déjà célèbre en tant que figure de proue de la Beat Generation, mais n'avait presque rien publié contrairement à ses amis. Il était désespéré qu'aucun éditeur ne veuille sortir son récit, mais il était également, sinon plus, désespéré de rechercher à ce point la gloire et le succès. D'où le refuge qu'il a pris dans les enseignements du Bouddha. Enseignements qu'il ressassait et ré-interprétait constamment, afin de valider sa démarche. Ça donne un ouvrage chaotique et à la fois très vibrant, effet accentué par les nombreuses notes manuscrites qu'on y trouve. Mais si le bouddhisme traversera souvent son œuvre à partir de <a contents="Dharma bums" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=Hr_F1xuAs-s" target="_blank">Dharma bums</a>, il n'en est rien des Journaux de bords 1947-1954 que je lis en ce moment, du moins pour l'instant. Par contre, il évoque, remercie et invoque Jésus assez souvent et fait grand cas de la phrase <em>Mon Royaume n'est pas de ce monde</em>. </p>
<p style="text-align: center;">« Mon Royaume n'est pas de ce monde. » </p>
<p style="text-align: center;">« Écoutez sa musique formidable, la musique de la pensée, la sombre musique de la sombre pensée. De toutes les énigmes, c'est la seule énigme. L'Alpha et l'Oméga des énigmes – je l'appelle une énigme parce qu'elle confond les sens - </p>
<p style="text-align: center;">L'énigme de la vie place dans les âmes des hommes une proposition morale, à laquelle ils répondent de manière variée et à toutes les époques.Tous les hommes sont conscients de la proposition, mais la plupart des hommes ignorent sa signification, une signification presque invisible, et vivent des vies résolument distraites et « ne s'en soucient pas ». D'autres hommes, qui connaissent la signification de la proposition, qui savent ce qu'il y a de juste et d'injuste dans la situation énigmatique de la vie, cherchent consciemment à ne pas s'en soucier et voudraient imiter la plupart des hommes, pour être forts. Enfin, quelques hommes souffrent de savoir tout ça et en meurent presque, au cours de leur vie, jusqu'à ce qu'ils puissent peut-être tenir bon leur chagrin et trouver de la force en le tenant mieux encore...» </p>
<p style="text-align: center;">J'ai compris plus tard que débauche et spiritualité peuvent être l'expression d'une seule et même chose, que la soif d'absolu qui animait Jean-Louis ** était avant tout spirituelle. Je ne me doutais pas avant de lire Kerouac qu'un roman pouvait parler de ces choses-là. Et que ça pouvait être à ce point beau, sincère et bouleversant.</p>
<p style="text-align: center;">Et c'est pourquoi suivre sa quête est une expérience dont je ne me lasse jamais.</p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p>* " Vous saviez que le métro est le plus grand salon de l'humanité? Comment les hommes, les femmes et es enfants pourraient-ils s'asseoir les uns en face des autres, sinon comme dans une maison? Le métro est le petit salon de New-Yrork, sur roues, fonçant dans l'obscurité...l'obscurité..." écrit-il dans son son journal du mercredi 10 novembre 1948.<br><br>** Son prénom véritable.</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/51905812018-04-19T13:12:19-04:002022-11-14T13:41:37-05:00#7 Jésus le film, de Chardin et le ( relatif ) déficit d'empathie de Patrick Lagacé <p style="text-align: center;">Comme beaucoup de Canadiens français de mon âge, mon enfance a été marqué par une éducation somme toute assez religieuse si je la compare avec celle que reçoivent mes enfants. Ça n'avait rien à voir avec ce qu'avaient vécu auparavant mes parents mais on peut dire que ma génération - je suis né en 1970 - a assisté aux derniers soubresauts de la religion catholique romaine au Québec. Comme on le sait, malgré la désaffection soudaine et massive des fidèles, les rites de passage tels le baptême, la 1ère communion et la confirmation, ont continué d'être célébrés. On peut aussi dire que les fêtes de Noël et de Pâques étaient encore empreintes d'une certaine religiosité. Bien entendu pour Noël, la messe de minuit contribuait beaucoup à cette atmosphère. Pour Pâques, la diffusion du film Jésus de Nazareth aidait à nous rappeler quel était l'objet de cette célébration. D'une manière assez brutale, il va sans dire... Assister à la crucifixion du Christ au petit écran fut pour l'enfant que j'étais un événement assez marquant merci. Ma mère m'en reparle souvent tellement j'étais inconsolable. Il faut dire que j'étais devenu un grand fan de Jésus depuis qu'on m'avait enseigné à l'école qu'il était le fils de Dieu, qu'il guérissait les malades et qu'il nous demandait juste de nous aimer les uns les autres. Juste des belles choses, que le spectacle de son exécution rendait d'autant plus insensé. Je crois bien que c'est le premier mort que j'ai pleuré. </p>
<p style="text-align: center;"> <iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="UonsJlKD1vE" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/UonsJlKD1vE/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/UonsJlKD1vE?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Comme bien des adolescents, mon lien avec Jésus s'est affaibli graduellement, pour complètement disparaitre à l'âge adulte. Mais je peux dire que j'ai eu le temps de développer avec lui une relation solide, assez pour prier tous les soirs avant de m'endormir. Rien de tel n'existe chez mes filles. Elle ne semblent pas entretenir de lien avec la religion, bien qu'elles aient des interrogations à ce sujet de temps en temps. Mine de rien, ce ne sont pas toutes les générations qui peuvent dire qu'elles ont vu devant leur yeux une religion s'éteindre... Ce qui ne veut pas dire que mon intérêt pour le christianisme a disparu. J'y suis revenu + tard, au fil de mes lectures. <em>Le phénomène humain</em> de <a contents="Teilhard de Chardin " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Noosph%C3%A8re" target="_blank">Teilhard de Chardin </a>fut l'une d'entre elles. Je me souviens surtout d'avoir trouvé le livre compliqué et de ne pas l'avoir fini. Mais si je peux en parler aujourd'hui, c'est beaucoup grâce à ceux qui ont écrit sur l'oeuvre de ce prêtre jésuite et ont su, j'espère, bien le vulgariser. Décédé en 1955, de Chardin avait émis des idées que l'Église avait jugées incompatibles avec sa doctrine et l'avait contraint au silence. Ce n'est qu'après sa mort que ses livres ont été publié et que cette même Église a finalement repris en partie ses thèses pour démontrer que Dieu et la Théorie de l'Évolution peuvent co-exister. </p>
<p style="text-align: center;">De Chardin s'est exprimé sur de nombreux sujets mais on retient surtout de lui son concept de la Noosphère. <em>Noos</em> qui veut dire esprit/raison/pensée en grec. Grosso modo, il y a selon lui 3 stades qui caractérisent l'évolution de notre planète. La Lithosphère; liée à la fabrication et l'organisation de la matière, la Biosphère; qui concerne l'apparition et le déploiement du vivant, ainsi que la Noosphère; qui correspond à l'émergence de la conscience. Toujours selon De Chardin, la conscience, étant déjà latente en la matière - ne serait-ce qu'en tant que principe organisateur – crée inlassablement les conditions nécessaire à son déploiement, <a contents="tel que le démontre l'évolution de notre planète... " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.cairn.info/revue-etudes-2003-2-page-195.htm" target="_blank">tel que le démontre l'évolution de notre planète... </a>Notons que cette hypothèse n'a pas besoin d'une intervention divine pour s'articuler car la conscience, mue par la volonté propre qu'elle a de se (re)connaître, met toute son énergie à transformer l'inerte en vivant, et le vivant en conscient. On est donc pas ici en présence d'un <a contents="Dessein Intelligent" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dessein_intelligent" target="_blank">Dessein Intelligent</a> ; les mécanismes de la sélection naturelle ont toute la latitude voulue pour s'exprimer, réussir ou échouer, comme Darwin l'a deviné. À la différence que la Création tend ici vers un but ultime: le point Oméga, un point que l'humanité atteindra une fois que son potentiel spirituel sera pleinement développé. C'est pourquoi De Chardin interprète la crucifixion et la résurrection d'un dieu qui s'est fait chair comme étant l'illustration du parcours qu'emprunte l'esprit afin de s'incarner et ainsi spiritualiser la matière. Autrement dit ( j'ai perdu le lien et donc le nom de l'auteur des prochaines lignes, dont certaines sont aussi de De Chardin )* : « Il est impossible, en effet, pour Teilhard d’échapper «à l’idée que la spiritualisation progressive de la matière», à laquelle la paléontologie lui faisait si clairement assister, « puisse être autre et moindre chose qu’un processus irréversible dans lequel, suivant son vrai sens, la matière, au lieu de s’ultra-matérialiser » (c’est-à-dire de tomber dans une inopérante et stérile inertie), «... se métamorphose au contraire irrésistiblement en Psyché » (c’est-à-dire en une complexité organique conditionnant l’apparition possible d’une conscience animale et finalement humaine, comme nous voyons que les choses se passent en cours d’évolution). » *</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="xz1YUICfiGQ" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/xz1YUICfiGQ/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/xz1YUICfiGQ?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Dites-vous que c'est la faute à Patrick Lagacé si je vous parle de ça. Son dernier billet <a contents="Un déficit d'empathie" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://plus.lapresse.ca/screens/21c34c18-824d-447e-9e8d-3ee86a22537a__7C___0.html?utm_medium=Facebook&utm_campaign=Microsite+Share&utm_content=Screen" target="_blank">Nos déficits d'empathie</a> est apparu sur mon fil Facebook. Comme la plupart des papiers qu'il écrit, j'ai bien aimé, mais la fin m'a fait un peu tiquer: « Dans ce frôlement du bus sur le cycliste et les applaudissements envoyés au chauffeur, je vois un rappel pas forcément anodin: notre vernis de civilisation est bien mince. » C'est un tantinet dramatique quand on compare avec le vernis des précédentes civilisations. Bien sûr que des injustices et des atrocités sont encore commises mais on est loin du temps où la noblesse avait droit de vie ou de mort sur ses serfs. Ou qu'on pouvait vous mettre en prison, vous torturer et vous exécuter sans motifs. Ça fait quand même quelques décennies (seulement!) qu'à Montréal, tout le monde a l'eau potable à volonté chez soi, et qu'il est interdit de faire travailler en usine de jeunes enfants 12 heures d'affilées. Je pourrais continuer longtemps... C'est aussi ça, le vernis de notre civilisation. Et il est rendu assez épais à certains endroits. Pour être franc, m'est d'avis que y'a un peu de Jésus dans tout ça, que son message a fini par passer quand on pense au peu de valeur qu'a longtemps eu la vie humaine. Dans un monde où vivre voulait pas mal dire survivre, ça devait pas être si évident de s'aimer les uns les autres... </p>
<p style="text-align: center;">Dans le même ordre d'idée, et tiré du même journal pour lequel écrit Patrick Lagacé, on pouvait lire hier dans le <a contents="blogue de Richard Hétu" data-link-label="" data-link-type="url" href="http://blogues.lapresse.ca/hetu/2018/04/17/parlons-racisme/" target="_blank">blogue de Richard Hétu</a> que l'empire du café Starbuck allait offrir pendant une journée une formation sur le racisme à tous ses employés. Ce n'est pas banal comme nouvelle. Pas tant pour la formation en soi que pour la charge symbolique que cette opération de relation publique porte. Un symbole très cher payé soit dit en passant. D'où sa portée... À cela, De Chardin aurait pu ajouter que c'est la fonction de la Noosphère de produire de l'éthique et des relations publiques tout comme il revient à la Biosphère de produire de l'eau et des cerveaux. </p>
<p style="text-align: center;">Mais pour revenir à notre relatif déficit d'empathie, il est vrai qu'il est dérangeant d'entendre des gens minimiser le geste du chauffeur et les propos qu'il a tenus. Comme le souligne Patrick Lagacé, il n'était pas gêné dans ses mouvements et n'avait pas à menacer ainsi le cycliste. Rien de toute façon pourrait justifier qu'un autobus mette en danger la vie de quiconque même si oui, on est tous d'accord, une minorité tenace de cyclistes manquent de civisme et sont imprudents. Mais à mettre l'emphase ainsi sur un incident et les commentaires qu'il a suscités pour faire le point sur notre civilisation, on perd de vue la vertigineuse ascension de notre espérance de vie, de sa qualité - la vie est beaucoup moins éprouvante physiquement qu'il y'a 60-70 ans pour une grande partie de la population - et d'une certaine idée de la justice qui a fait son chemin, et ce, dans une proportion largement supérieure à ce qu'aucune autre époque ait connue jusqu'à maintenant. Ce qui qui ne serait pas un hasard selon de Chardin. Selon lui, comme l'accroissement de la conscience tend naturellement vers un bien-être supérieur - car ce sont dans ces conditions que la conscience peut le mieux s'exprimer et se complexifier -, elle travaille constamment dans ce sens. Avec pour conséquence de nous faire converger sur le long terme vers Dieu, le point Oméga, une route qui sera forcément encore longue et pleine d'obstacles car il ne peut y avoir d'évolution sans friction, d'où la nécessité du Mal. Un autre problème de résolu..! </p>
<p style="text-align: center;">De Chardin serait sûrement d'accord pour dire que nous sommes présentement dans une phase de transition. Et si l'invention de l'écriture marque la fin de la préhistoire, l'apparition de l'internet pourrait bien jouer le même rôle et tracer ainsi une transition symbolique entre la Biosphère et la Noosphère. Il avait d'ailleurs lui-même prédit l'arrivée d'un tel réseau afin que chacune de nos consciences individuelles puissent toutes communiquer entre elles... Et en cette ère de l'information, il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas au moins concéder une certaine cohérence à son hypothèse. Quand même qu'on soit agacé par l'aspect téléologique de ce qu'il expose, on peut difficilement nier les liens qu'il noue entre la matière, la vie et la conscience. Et que sens et information sont bel et bien au cœur de notre univers puisque nous y sommes, d'où la Noosphère... Bien sûr, on peut réfuter tout cela en invoquant la tautologie qui se cache derrière l'argument mais j'aurais peur que ça se retourne contre celui qui le ferait, cela étant effectivement un argument bien sensé...</p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p>*mes excuse à l'auteur qui a eu la bonne idée de reproduire ce passage de De Chardin dans son papier...</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/51791842018-04-12T23:08:28-04:002021-01-30T01:55:07-05:00#6 Les voix de Paul<p style="text-align: center;">Même si je l'ai évoqué dans le carnet #1, le titre du billet ne réfère pas aux voix qu'entendait Paul de Tarse, aka Saint Paul. Non le carnet de cette semaine parlera d'un autre Paul - presque aussi influent -, Paul de Liverpool, aka Sir Paul. Et de Let it be dans un 2e temps. On se discipline comme on peut. La vérité c'est que j'ai d'abord commencé à écrire sur Let it be. Une performance très émouvante de cette chanson par 2 candidates de La Voix il y a quelques semaines ( c’est à cause de mes filles, je vous jure ) m'avait donné envie de parler de sa genèse, de son côté mystique et de comment elle révélait un tas de trucs sur Paul et l'image des Beatles en général, mais j'ai vite bifurqué sur un sujet qui passe souvent sous le radar quand on parle de McCartney, à savoir le nombre impressionnant de timbres et de registres qu'il peut reproduire. Mine de rien, sa voix nous est tellement familière qu'on dirait qu'on ne s'étonne même pas qu'il soit capable de la faire sonner de manières aussi différentes. Ce trait a beau être au cœur du répertoire le + prisé du siècle dernier, on ne le relève pas souvent, comme s'il allait de soi. Ce n'est pourtant pas une faculté qui est très commune quand on y pense. Prenons la voix de Lennon. Justement, c'est LA voix de John. Unique, reconnaissable entre 1000. Mais Lennon n'a pas, et c'est le cas de la plupart des chanteurs - pensez à Bono, Lady Gaga, Serge Fiori, Beth Gibbons, Kendrick Lamar ou Léo Ferré, name it - différentes voix... À part le vieillissement ou l'usure qui viennent parfois changer le grain, ajouter des basses et enlever des hautes, comme chez Cohen par exemple, rares sont les chanteurs qui ont plusieurs voix à leur portée, et qui peuvent passer de l'une à l'autre sur un même disque avec autant d'aisance. </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="UNsQG89SO_g" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/UNsQG89SO_g/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/UNsQG89SO_g?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Avant de continuer sur ce point, j'aimerais mettre une chose au clair. Contrairement à ce que plusieurs autour de moi peuvent penser, je n'idolâtre pas Paul McCartney. J'en ai pour preuve qu'à part <a contents="Jenny Wren," data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=K4w5-XZ244c" target="_blank">Jenny Wren,</a> Fine line ou l'imbuvable Freedom, j'aurais du mal à vous fredonner une de ses compositions des 20 dernières années. Et j'ignore pourquoi mais je le trouve plutôt mauvais quand il donne des entrevues. Je ne connais pas non plus Wings - quel nom poche! - tant que ça, y'a au moins 3 ou 4 albums de leur cru que je n'ai jamais entendu, bien que j'écoute encore à l'occasion Band on the Run ou Venus and Mars. Ceci étant dit, pour plein de raisons que je ne prendrai pas ici la peine d'énumérer, il restera à jamais mon musicien préféré. Il s'avère aussi que son album <a contents="Ram," data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=UNsQG89SO_g" target="_blank">Ram</a>, sorti en 1971 - son 2e après qu'il ait quitté les Beatles - est le disque que j'ai le + écouté dans ma vie. Et c'est probablement l'album sur lequel il s'est le + éclaté, vocalement parlant... En fait, on sent qu'il s'amuse, avec le ton toujours juste, comme saurait le faire un bon acteur qui doit incarner différents rôles. C'est un trait que possède bien entendu les imitateurs comme André-Philippe Gagnon, à la différence que McCartney n'imite personne autre que lui-même et qu'il utilise la grande étendue que lui permet son organe vocal pour mieux servir l'émotion, l'intention qui anime la chanson. À cet égard, on notera qu'en général, McCartney est un chanteur plutôt sobre.<a contents=" Eleonor Rigby" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=HuS5NuXRb5Y" target="_blank"> Eleonor Rigby</a> en est le parfait exemple. On y parle d'enterrement et de solitude avec un ton très neutre, presque détaché. Et s'il chante la plupart du temps sans nous en mettre plein les oreilles, on peut dire qu'on est servi quand il s'y met. Et ce, dans les 2 extrêmes. Y aller délicatement avec une voix de tête en falsetto comme dans <a contents="Here, there and everywhere" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=iELGhAGwBdc&frags=wn" target="_blank">Here, there and everywhere</a>, I will ou l'inchantable <a contents="So bad" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=ycXpx46plpQ" target="_blank">So bad</a>? Aucun problème. Hurler comme un fou furieux dans Helter Skelter, Oh! Darling ou <a contents="Monkberry Moon Delight" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=IrthE_waCV8" target="_blank">Monkberry Moon Delight</a> ? Why not. Ce qui en passant, n'est pas tout à fait la même chose que lorsqu'il emploie son «high pitch razor tone» comme dans Maybe I'm amazed ou <a contents="Oh Woman Oh Why" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=ZzU-iqRHubM" target="_blank">Oh Woman Oh Why</a>, une autre impossible à chanter et qu'on retrouvait en face B de l'excellente <a contents="Just Another day." data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=JodPHplACCE" target="_self">Just Another day.</a> Il y aussi cette voix mid, + dense, métallique même, qu'il prend dans <a contents="Why don't we do it in the road" data-link-label="" data-link-type="" href="https://www.youtube.com/watch?v=IN4lb13oZyY" target="_blank">Why don't we do it in the road</a>, <a contents="Magical Mystery Tour" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=A8Wa_S4Zoq0" target="_self">Magical Mystery Tour</a> , <a contents="Lady Madonna," data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=uLRiGX3L-kw" target="_blank">Lady Madonna,</a> ou quand il harmonise avec John dans Come together, <a contents="I'm so tired" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=jRH13XnEOYs" target="_blank">I'm so tired</a> ou I want you. Même chose quand il vient à la rescousse de George dans While my guitar gently weeps. Sans oublier la granuleuse à souhait qu'on peut entendre dans Sgt Pepper ou <a contents="She's a woman" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=GsNgLiPyuCY" target="_blank">She's a woman</a>... Ou la nasillarde de 1985 , un de mes highlights du concert sur les Plaines en 2008... </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="8_LiEjIMhoc" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/8_LiEjIMhoc/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/8_LiEjIMhoc?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;">En même temps, sa voix de base, celle qui sort... naturellement, comme dans Penny Lane, <a contents="I'll follow the Sun" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=5UcSLIR7KdQ" target="_blank">I'll follow the Sun</a> (une autre mémorable du concert de 2008) ou <a contents="Let 'em in" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=0y0v7zpHJkU" target="_blank">Let 'em in</a>, est somme toute ordinaire, banale à la limite quand on la compare à d'autres chanteurs qui ont marqué l'histoire du rock..! Et cette capacité qu'il a de pouvoir chanter haut sans que ça ne paraisse, et sans qu'il n'ait besoin de forcer ou pousser. Le son des Beatles repose en partie sur cette capacité qu'il a de pouvoir faire des harmonies dans un registre aussi élevé. On a qu'à écouter <a contents="In my Life" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=yFmlOensWT8" target="_blank">In my Life</a> ou <a contents="If I fell" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=kPKYPI1jjdg" target="_self">If I fell</a><a contents="If I fell " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=kPKYPI1jjdg" target="_blank"> </a>pour s'en convaincre. Et essayez de le suivre quand il chante le 2e <a contents="Let it be" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=0bsv9cSn0_c" target="_blank">Let it be</a> dans le refrain de la chanson du même nom et vous pourrez constater, du moins si vous êtes un homme, à quel point c'est difficile, à moins de passer en voix de tête. Mais lui, ça sort tout seul, comme si il avait une voix intermédiaire entre sa voix de tête et sa voix "normale"... </p>
<p style="text-align: center;">Voilà, sachez-le; en plus d'être un compositeur, instrumentiste et arrangeur hors-pair, Paul McCartney est un chanteur-caméléon-magicien qui peut faire ce qu'il veut avec sa voix... Ok. enough said, je poursuivrai avec Let it be dans un prochain billet, avec au menu Mother Mary, lsd, mysticisme et John vs Paul, tout ça à travers le prisme de cette chanson, certes 1000 fois entendue, mais en même temps méconnue...</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/51562092018-03-30T11:58:35-04:002019-01-26T21:36:50-05:00#5 Les yeux de Jane<p style="text-align: center;">Je me souviens de la date parce que c'était le jour de l'anniversaire de ma sœur. Le 27 février dernier, j'ai croisé une fille avec 2 grands yeux tristes. Et encore une fois, je me suis demandé si c'était l'oeuf ou le poulpe... Peut-être que son humeur n'y était pour rien, qu'on décèlera toujours de la tristesse dans son regard, simplement parce que ses yeux sont ainsi faits. Un peu comme un basset, vous savez ces chiens pour qui ça n'a jamais l'air facile? Mais je ne sais pas pourquoi, la brève seconde où nos regards se sont croisés m'a laissé l'impression d'un brouillard qui n'arrive plus à se dissiper, et dont elle-même ne saurait dire d'où il vient si on lui demandait. Comme s'il s'était installé graduellement, au fur et à mesure que l'ennui des jours ordinaires avait laissé ses marques... Ce qui m'a rappelé Jane dans Famous Blue Raincoat: </p>
<p style="text-align: center;">« And thanks for the trouble you took from her eyes </p>
<p style="text-align: center;">I thought it was there for good </p>
<p style="text-align: center;">So I never tried » </p>
<p style="text-align: center;">Les 3 phrases les plus belles de la musique pop je pense. Et quelle chanson! Je vous la raconterez pas, faut l'écouter si vous la connaissez pas. Et si vous la connaissez, ça vaut vraiment la peine d'aller jeter une oreille sur cette version live, jouée devant une petite audience d'un studio de télé. Ça se passe en 'ta. </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="tAmQgI_Mun4" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/tAmQgI_Mun4/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/tAmQgI_Mun4?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">Il fut une époque où Cohen n'était pas un sujet d'exposition, encore moins de murale. J'ai su vaguement de quoi il avait l'air au début des années '80 en raison d'une cassette qu'on trouvait souvent en réduction dans les bacs chez Discus. Mais j'avais beau relire son nom et les titres de ses chansons, ça ne me disait absolument rien. Ce n'est qu'une fois rendu au cégep, grâce à la radio étudiante, que j'ai entendu ses chansons pour la 1ère fois. Et je ne comprenais pas pourquoi personne ne m'avait parlé de ce MONTRÉALAIS avant!! Comment d'aussi belles chansons avaient pu échapper aussi longtemps à mon attention? </p>
<p style="text-align: center;">De tout son répertoire, Famous Blue Raincoat a longtemps été ma préférée. Tragique à souhait, avec des accents bibliques - «my brother my killer» - la trame narrative de la chanson nous transporte au cœur d'un triangle amoureux où, on finit par le comprendre vers la fin, le mari a accepté son triste sort. Il va jusqu'à remercier son frère que Jane n'ait plus le regard embué par la mélancolie (the trouble), même si c'est le charme de son frère qui a opéré cette transformation. Ouch!! Non seulement il lui a pardonné mais il l'informe que son «enemy is sleeping and his woman is free». Il aimera probablement toujours Jane et c'est parce qu'il l'aime qu'il accepte qu'elle soit heureuse sans lui... On peut dire, paradoxalement, que c'est quand même l'amour qui triomphe même si le couple n'en sort pas indemne. Une grande chanson...<br> </p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/51392362018-03-26T12:21:07-04:002018-12-04T02:25:07-05:00#4 Philip K. Dick ( ou comment je suis devenu un Blade Runner )<p style="text-align: center;">Je vous ai raconté quelques-uns de mes rêves dans le carnet précédent, ce n'est donc peut-être pas un hasard si j'ai en ce moment dans les mains un livre de Philip K Dick, un auteur de science-fiction qui nous a beaucoup parlé de ses rêves. Il en a mis d'étonnants en scène dans ce qu'on appellera + tard sa "trilogie divine". Je dis rêve mais dans les années 1970, Dick a vécu d'étranges expériences mystiques qu'il relate dans son roman <em>V.A.L.I.S.</em> ( <em>SIVA</em> en français ), un espèce de roman auto-fictif-mystico-politique qui ne ressemble à rien. Son éditeur avait refusé de publier son récit précédent, connu aujourd'hui sous le titre de <em>Radio Libre Albemuth</em>, ce qui explique en partie pourquoi les 2 récits partagent des personages et des situations similaires. Je viens de le commencer et c'est plutôt fascinant étant donné le contexte actuel. Voici comment il décrit l'ascension au pouvoir de Ferris F. Freemont, un président américain fictif :<br><br>"Freemont fut étroitement lié aux manoeuvres soviétiques à l'intérieur des États-Unis, il fut soutenu par les intérêts soviétique et sa stratégie fut mise au point par les planificateurs soviétiques : tout ceci, bien qu'encore sujet à controverses, n'en reste pas moins un fait. Les Soviétiques le soutinrent, la droite le soutint...".</p>
<p style="text-align: center;">C'est de la prescience en 'ta quand on pense qu'en 1974, les État-Unis et l'Union soviétique sont en pleine Guerre Froide. On a un peu oublié à quel point la menace semblait réelle. Même jeune enfant, j'étais conscient que les Russes étaient nos ennemis, en raison des nouvelles que nous écoutions sur l'heure du souper et des manchettes des journaux. Un peu + tard, dans les années '80, Chom FM faisait constamment jouer <a contents="Russians " data-link-label="" data-link-type="url" href="https://www.youtube.com/watch?v=wHylQRVN2Qs" target="_blank">Russians </a>de Sting dans laquelle il se demandait si les Russes aimaient aussi leurs enfants... Bref, imaginer que la droite américaine puisse être du même côté que les Russes en 1974 ne faisait aucun sens. Ajoutez à cela un président qui devient un tyran dans un pays où la constitution est sacrée et où ses auteurs se sont fait un devoir d'établir un gouvernement qui rende impossible la prise du pouvoir par un tyran, et vous avez là une histoire de politique-fiction vraiment tirée par les cheveux pour l'époque. Je suis pas entrain de dire que Dick décrit ce qui s'est passé avec Trump pour autant, mais quand même, on ne peut s'empêcher de faire des parallèles. Mais l'a-t-il juste imaginé ou réellement pressenti..? Dick lui-même affirmait qu'il ne faisait qu'écrire des rapports sur la réalité, telle qu'il la percevait vraiment. J'en parle dans le premier carnet, c'est un livre d'Emmanuel Carrère, Le Royaume, qui m'a donné l'idée pour ce blogue. Lui même admet, si je me souviens bien, que <em>La moustache</em>, le roman qui l'a mis sur la mappe ( du moins au Québec ), c'est du Dick tout craché. On ne se surprendra donc pas qu'il lui ait consacré une biographie. Et que j'aie un faible pour les 2.</p>
<p style="text-align: center;">Il n'y a pas longtemps, on m'a donné <em>The Exegis of Philip k. Dick</em>, une brique posthume de 900 pages dans laquelle on trouve les notes que Dick a pris en 1974 alors qu'il était en transe et transcrivait l'information que ce qu'il appelait V.A.L.I.S. lui transmettait via, entre autres, un rayon de couleur rose! Et ça ne s'arrête pas là, V.A.L.I.S. - qui signifie Vast Active Living Intelligence System - lui aurait aussi indiqué que son fils souffrait d’une hernie inguinale. Ce mal, difficile à détecter, s'avère mortel s'il n'est pas traité à temps. N'eut été de l'insistance de Dick, les médecins n'auraient jamais pu guérir et sauver son fils. V.A.L.I.S. lui aurait également transmis le don de glossolalie, c'est-à-dire la capacité de parler et comprendre une langue auparavant inconnue. Après avoir fait des recherches, Dick et sa compagne ont découvert qu'il s'agissait du koinè, un dialecte grec couramment parlé au temps de l'Empire romain et de Jésus-Christ...</p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="EIMdf_KG62E" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/EIMdf_KG62E/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/EIMdf_KG62E?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;">On s'en doutera, son exégèse est quelque chose d'assez ardu à lire. Mais on peut voir d'où vient la matière brute dont Dick s'est inspiré pour écrire sa trilogie divine, surtout <em>V.A.L.I.S. </em>et <em>L'invasion Divine</em> qui, on le réalise en lisant The Exegis, sont des récits romancés de ce qu'il a entrevu durant ses transes. Il faudrait posséder la même érudition que lui pour être capable de le suivre pleinement, ce qui n'est pas près de m'arriver. On y trouve aussi des lettres adressées à ses amis et connaissances et dans lesquelles il expose ses vues sur la nature de l'Univers (un hologramme selon Dick), sur Dieu et sur la signification des mythes, symboles et ouvrages récents et anciens. Ça donne une bible assez opaque merci.</p>
<p style="text-align: center;">Tout le contraire du dernier livre qu'il a écrit,<em> La transmigration de Timothy Archer</em>, mon roman préféré. Pas juste de K Dick. D'entre tous les livres que j'ai lus, je ne peux que constater que c'est celui-là qui m'a le + marqué. Paradoxalement, c'est l'un des rares à se passer ( presque ) normalement dans le présent. Rien à voir avec la majorité des films de science-fiction que son oeuvre a inspiré*. L'histoire tourne autour d'un fait réel et d'un personnage qu'il connaissait bien, James Pike, évêque épiscopalien de Los Angeles, trouvé mort dans le désert de Judée alors qu'il tentait de trouver le mystérieux "anoki" dont il est question dans certains manuscrits de la Mer Morte. Il s'y était perdu avec sa Jeep et une bouteille de Coca-Cola. L'anoki, selon John Allegro, un historien anglais, était une sorte de champignon magique et Allegro avait échangé à ce sujet avec Pike. Jésus, toujours selon son hypothèse, en aurait fait le trafic et c'est la raison pour laquelle il aurait été exécuté ! Mais bien qu'il s'agisse là d'un personnage et d'un événement qui soient au coeur du roman, on passerait à côté de l'essentiel si on n'en disait que cela. Même chose pour les communications paranormales dont l'évêque, qui s'appelle Timothy Archer dans le récit, est témoin et dont il est convaincu qu'elles sont des manifestations de l'esprit de Jeff, son fils qui s'est récemment suicidé. Vous me suivez toujours? Ici aussi, on pourrait dire que la mort du père et du fils sont secondaires en regard de l'histoire. Le roman a plutôt comme personnage central Angel, l'épouse de Jeff Archer. C'est elle qui nous raconte comment sont morts son mari et son beau-père. On la suit alors qu'elle tente de trouver un sens à tout ça. Ça commence le jour de la mort John Lennon, ce qui n'est pas pour arranger les choses, d'autant + qu'Angel souffre d'une rage de dent, rage qui n'est pas étrangère à <a contents="ma chanson du même nom" data-link-label="" data-link-type="url" href="https://jeanfrancoisfortier.bandcamp.com/track/rage-de-dents-3" target="_blank">ma chanson du même nom</a> pour ceux que ça intéresserait... Dick ici, pour une rare fois, n'a pas besoin de jouer avec la réalité et l'espace-temps pour nous causer philosophie et métaphysique. Et ça marche plutôt bien. On dirait qu'il en découle une profondeur psychologique à laquelle il ne nous avait pas habitué. Une œuvre à part, presque poignante, quand on la compare avec ses autres romans. Si jamais Denis Villeneuve décide un jour de prend sa "revanche" sur Dick ( j'aurais tellement voulu aimer <em>Blade Runner 2049</em>... ), c'est avec ce livre qu'il devrait s'y attaquer. En mode film d'auteur. Pourquoi pas une adaptation québécoise, en français, avec un petit budget (comparé à ceux d'Hollywood), un genre de retour aux sources..? Ce scénario - autant le livre que le retour aux sources - lui siérait bien il me semble.</p>
<p style="text-align: center;">On ne peut s'empêcher d'éprouver de l'empathie pour Philip K. Dick quand on sait qu'il n'aura pas connaissance de son succès, du moins pas de l'ampleur qu'il atteindra grâce aux adaptions futures de ses romans au cinéma. Il est mort en 1982 mais avait quand même pu visionner certaines scènes de <em>Blade Runner</em> qui l'avaient parait-il enchanté. Je n'ai aussi pu m'empêcher de penser à lui lorsqu'est sorti l'histoire des bots et des faux-comptes Facebook que des agents russes ont créés par milliers afin d'essayer d'influencer l'opinion publique américaine lors de l'élection de 2016. J'ai évoqué dans les autres carnets que je perds parfois mon temps à faire le troll sur Fox News. Je ne sais pas ce qui me prend, ça devient plus fort que moi, parfois je dois aller me mêler de ce qui ne me regarde pas. Et ce faisant, à chaque fois qu'un internaute répond à l'un de mes commentaires, je me sens un peu comme Deckard dans<em> Blade Runner</em> : " Croit-il vraiment qu'il soit raisonnable que des armes pouvant tirer autant de balles à la minute soient en vente chez Walmart?? Ou s'agit-il plutôt d'un bot russe qui trouve son compte à répéter ce que le premier pense..? " Alors on va vérifier. On traque. Et quand il arrive que le profil qui émet ce genre de commentaire n'a pas de photo et aucun ami, on se dit que c'est la 2e option qui l'emporte... Presque comme un vrai Blade Runner..! </p>
<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="y2_V2VbpcKs" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/y2_V2VbpcKs/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/y2_V2VbpcKs?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe></p>
<p style="text-align: center;"><br>P.S. : J'ai terminé le livre. Un drôle d'objet, un peu décousu, mais qui finit par retrouver sa vigueur vers la fin. Une fin ouverte étrangement optimiste malgré le fait que Freemont continue d'élargir son pouvoir en contrôlant de plus en plus les médias... Il a retravaillé la même histoire pour son roman V.A.L.I.S. et qui était un peu plus réussi il me semble... </p>
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<p>* dont Total Recall, Blade Runner et Minority Report</p>Jean François Fortiertag:jffortier.ca,2005:Post/51332732018-03-21T18:10:38-04:002021-02-17T01:40:26-05:00#3 Le rêve de l'île-falaise<p style="text-align: center;">Il est rare que ça m'arrive mais je souffre d'insomnie depuis quelques jours. Mince consolation, je me suis mis à me souvenir de mes rêves, surtout celui qui survient lorsque je réussis à m'endormir vers les 6h30 pour me réveiller environ une heure et demie plus tard. La plupart du temps, ce sont des histoires bric-à-brac, sans queue ni tête, qui sur le coup semblent être portées par une logique interne, une espèce de quête, mais dont le récit devient vite confus et inintéressant, du moins pour l'interlocuteur qui a la patience ou la malchance de m'écouter... Cette dernière année, il m'arrive souvent de rêver que j'habite avec ma famille dans une énorme maison, jamais la même, dont je finis par découvrir de nouvelles pièces, avec des inconnus qui y vivent et des murs manquants ou incomplets qui donnent sur l'extérieur; un parc ou une forêt... Un de mes rêves préférés fut celui que j'ai fait il y a 3 ou 4 ans durant lequel Paul McCartney m'a donné une chanson! Je marchais avec ma blonde des les rues de Liverpool lorsque quelqu'un s'est mis à jouer de la guitare sur sa véranda. C'était nul autre que Paul qui, lorsqu'on s'est arrêté devant lui, s'est mis à chanter les mots suivants: "I never had the chance to play on that piano, I never had the chance to play on that piano but..." I don't remember le reste. Je me suis empressé de la repiquer dès mon réveil. C'est une progression d'accords somme toute assez standard mais dont la mélodie est plutôt catchy. On s'en étonnera pas étant donné le compositeur. Je travaille d'ailleurs dessus en ce moment avec mon oncle Pierre. Je sais pas si je devrai la déclarer Fortier/McCartney à la Socan!? Je serais pas contre remarquez, je lui en dois quand même beaucoup. Un type de rêve que je ne fais plus et dont je ne me plains pas est celui où je n'arrive pas à bouger, ni émettre un son alors que je sens autour de moi la présence d'esprits malveillants. Très jeune, il m'arrivait de rêver que j'étais dans le sous-sol ou la cave, pendant que j'entendais ma mère discuter avec une amie au salon et que j'étais incapable d'aller la rejoindre ni de l'appeler. J'ouvrais la bouche, j'essayais de crier mais aucun bruit ne sortait. Je tentais alors de ramper, pouvant à peine avancer ma main de quelques centimètres pour essayer de me hisser en haut des marches afin d'échapper aux esprits maléfiques qui me terrorisaient et faisaient virevolter autour de moi toutes sortes d'objets. J'en ai refait un du genre il y a quelques années et j'ai revécu le même effroi que lorsque j'étais petit. Un vrai cauchemar. Mais il y a un songe extraordinaire que j'ai fait alors que je devais avoir 5 ou 6 ans et dont le souvenir et le sens continuent de me poursuivre à ce jour.</p>
<p style="text-align: center;">Je suis sur un lac au milieu d'une chaloupe. Je rame et les rames sont lourdes et grosses mais je me débrouille quand même bien malgré le vent constant qui peut parfois davantage s'emporter. Je suis à la recherche d'un ruisseau qui tire sa source de la petite baie située au fond droit devant. Je m'approche tranquillement de ma destination en longeant la berge qui me protège enfin du vent. L'eau devient de moins en moins profonde et je dois manoeuvrer pour que la cale évite les troncs d'arbre qui dorment sous l'eau, juste à l'orée du ruisseau. Je continue d'avancer, debout dans la barque, en poussant à 2 mains sur une des rames, profondément dans la vase, jusqu'à ce que les souches et les branches mortes et noyées cessent de me ralentir. Le baie est maintenant derrière moi et l'eau, qui commence à être plus profonde, devient aussi de plus en plus vive. Au point où le ruisseau s'élargit assez pour qu'on puisse parler maintenant d'une petite rivière. Cela me surprend car si dans mon rêve je savais qu'il y avait là un ruisseau, j'ignorais l'existence de la rivière. </p>
<p style="text-align: center;">Il faut savoir que le lac en question est bien réel, j'y ai vécu de grands bonheurs rustiques. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours aimé être dans la nature, seul, avec mes amis ou avec ma famille. J'aimais beaucoup marcher dans la campagne et dans les bois avec ma grand-mère paternelle, Anna, qui aimait particulièrement aller se promener lorsque le jour tombait, à l'heure où s'éveillent en grand nombre les habitants de la forêt. Nous finissions souvent par revenir à la pleine noirceur, ce qui, il me semble, inquiétait ma mère. Faudra un jour que je vous raconte l'accueil que cette même forêt a réservé à ma blonde (une Forest !) la première fois où nous y sommes allés ensemble. Ça foisonnait de partout. Faudrait que je relise le carnet où elle avait consigné tous les animaux qui étaient venus nous saluer pendant notre séjour. Une bonne douzaine il me semble. Je me souviens entre autres d'un amusant numéro de loutres, d'une rencontre avec un orignal, d'un concert de loups et d'une étoile filante géante qui avait tourné sur elle-même comme dans un dessin animé avant de disparaitre dans l'horizon. Il y avait aussi eu un étonnant nuage en forme de coeur qui, on le verra plus tard, a un lien avec le rêve que je vous décrivais et auquel je vais maintenant retourner.</p>
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<p style="text-align: center;"><iframe class="justify_inline" data-video-type="youtube" data-video-id="As8VOrH21r8" data-video-thumb-url="https://img.youtube.com/vi/As8VOrH21r8/mqdefault.jpg" type="text/html" src="https://www.youtube.com/embed/As8VOrH21r8?rel=0&wmode=transparent&enablejsapi=1" frameborder="0" height="180" width="320" allowfullscreen="true"></iframe> </p>
<p style="text-align: center;">Une fois franchis les encombrements qui séparent la baie du ruisseau, je constate avec étonnement que le débit de l'eau se met à augmenter rapidement, tellement qu'il ne me sert plus à rien de ramer. Le ruisseau devenu rivière est maintenant bordé des deux côtés par des parois lisses, rondes et rocheuses sur lesquelles ont poussé de grands conifères qui défilent devant mes yeux de plus en plus rapidement. Je reste calme malgré le courant qui s'emporte, le torrent assourdissant, et ma barque qui ne cesse de prendre de la vitesse. Je vous rappelle que j'ai 5 ou 6 ans, peut-être même 4..? Je ne sais pas pourquoi mais je me sens entre bonnes mains, c'en est même devenu amusant, on dirait un manège. Puis je commence à voir que la voute que forment les arbres au-dessus du cours d'eau s'éclaircit et laisse passer de + en + la lumière du jour, jusqu'à ce que l'ombre de la forêt disparaisse complètement, m'expulsant doucement dans un un grand lac digne et scintillant avec en son milieu une île, une île-falaise qui laisse pendre à son sommet un gras toupet d'herbes vertes et folles que le vent caresse violemment. Le ciel est radieux, le décor majestueux et le moment est à la fois solennel et joyeux. </p>
<p style="text-align: center;">Je me remets alors à ramer avec en tête de me rendre sur la cime de l'ile. Une fois arrivé à ses abords, je réalise à quel point ses côtes sont hautes et escarpées et qu'il sera impossible de les escalader. Mais peu importe, par je ne sais trop quel tour de passe-passe, je me retrouve soudainement propulsé sur le sommet. Puis je m'allonge dans l'épaisse crinière gazonnée et laisse le soleil me baigner doucement la tête - comme sait le faire la lumière de septembre -, en même temps qu'émerge le sentiment d'être en totale sécurité, que tout est parfait et qu'il n'y a pas lieu de craindre quoi que ce soit. Jamais. Le bleu du ciel, souverain et apaisant, m'invite dans une extase tandis que le vent et les rayons du jour m'entretiennent sur la félicité et la joie. Intense bonheur dont les mots n'arriveront jamais à décrire la totalité de l'expérience. Vous comprendrez pourquoi encore à ce jour ce rêve continue de m'impressionner. </p>
<p style="text-align: center;">Il existe une presqu'île sur le premier lac dont il est question au début du rêve. Un shack y a été bâti par des déserteurs lors de la 1ère guerre mondiale. Mon grand-père en a fait l'acquisition après que le club de chasse et pêche dont il faisait partie, le Club des 12, ait été démantelé. On y a ajouté par après une rallonge mais il n'y a toujours pas l'électricité ni l'eau courante. Pour la petite histoire, sachez que Maurice Richard en personne y est allé pour pêcher avec mon grand-père..! Il va s'en dire que je n'ai jamais retrouvé le ruisseau ni le grand lac scintillant. Et ce n'est pas faute de ne pas les avoir cherché. L'empreinte que ce rêve a laissé sur moi a été si vive que l'enfant que j'étais était convaincu qu'ils existaient pour de vrai. C'est pourquoi il y a de cela une quinzaine d'année, je n'ai pu m'empêcher de sourire lorsque j'ai aperçu dans la dense couche de ouate qui couvrait tout l'horizon, un étrange nuage en forme de coeur, découpé par les seuls traits de bleu du ciel visibles de ma chaloupe ce matin-là. Il se juchait exactement au-dessus de là où le grand lac scintillant et son île escarpée auraient dû se trouver...</p>
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<p style="text-align: center;">*J'ai comme un flash. J'ai l'impression qu'on voit ce genre de falaise dans l'introduction du dessin animé Vicky qui jouait sur l'heure du dîner quand je revenais de l'école et que ma mère nous préparait un bon Kraft Dinner..!</p>Jean François Fortier