#13 Pour en finir avec la partisanerie, la démagogie, la corruption, le lobbying, la gauche, la droite... et la démocratie!

Il était question d'Oprah Winfrey. Elle venait de prononcer un discours remarqué aux Golden Globes et la machine à rumeur s'était emballée. On murmurait déjà Oprah for President. Mais le ton de l'ancien ministre - et premier impresario d'Éric Lapointe - était sans appel: « Pour savoir si elle ferait ou non une bonne candidate, il faudrait d'abord voir son programme car c'est là-d'ssus que les gens voteront...». Quelque chose du genre. Avec toute l'autorité qu'on lui connait, Yves-François Blanchet avait clos la discussion avec ce qui semblait être un argument fort censé. Je cuisinais en écoutant distraitement la conversation et ce n'est que 2 jours + tard que j'ai réussi à mettre le doigt sur ce qui clochait avec cette conclusion. Ce qui avait été affirmé comme étant une évidence n'en était pas une. En fait, la population se prononce rarement sur un programme quand elle élit un parti. La politique est un domaine qui a beaucoup plus à voir avec l'émotivité qu'avec la raison, même si on se l'avoue plus ou moins. Sinon, ce serait toujours le meilleur programme qui l'emporterait, non..? 

J'ai évoqué dans le 2e carnet qu'il m'arrivait de faire le troll sur Fox News. Pas un vrai troll fatiguant qui ne fait que répéter la même chose mais pas loin certains soirs, du moins c'est ce que pourrait penser un électeur qui a voté pour Trump. Disons que je me suis beaucoup calmé depuis que je tiens ce blogue et surtout, j'ai appris à ne plus m'engager dans de longues répliques stériles. Ce qui ne m'empêche pas d'aller consulter quotidiennement le site de Fox News, mieux fait je trouve que celui de bien des concurrents. Et donnons leur aussi cela, il est très divertissant. Le fréquenter permet également de mieux comprendre pourquoi Hillary Clinton n'a pas gagné. Rarement j'ai vu une politicienne susciter autant de mépris. Trump aussi, on s'entend. Mais il a quelque chose que l'ancienne candidate démocrate n'a pas. Du charisme, qu'on le veuille ou non...

En politique, le programme peut bien entendu faire balancer un indécis mais il sera rarement un facteur déterminant. On feint de l'ignorer mais la politique, c'est avant tout du théâtre. Et comme un comédien sur les planches, le politicien doit performer, c'est-à-dire savoir susciter de l'émotion. C'est là que ça se joue, que va se chercher la marge qui détermine qui l'emportera. On se souviendra de Lucien Bouchard. Il est probablement le dernier politicien charismatique à avoir dirigé le Québec. Rappelez-vous quand Parizeau avait décidé contre vents et marées de redemander aux Québécois s'ils voulaient devenir les citoyens d'un nouveau pays. Ça s'emballait pas fort dans les chaumières. Il a fallu le charisme de Lucien Bouchard pour renverser la vapeur. Et c'est le propre d'un être charismatique de savoir susciter l'émotion. Et comme on l'a vu en 1995, quand l'émotion s'empare des affaires de la cité, ça peut devenir puissant. Ou épeurant. Ça dépend de quel côté on penche. Mais bien que j'ai voté oui en 1995, il y a là une des raisons pourquoi je ne suis plus convaincu que la démocratie soit le meilleur moyen pour que le bien commun prévale. La game a changé comme disait l'autre. En fait, je crois sincèrement que la démocratie telle qu'elle est pratiquée en ce moment a fait son temps, même si un peu partout, surtout en Occident, elle a permis des avancées considérables au chapitre des libertés civiles, de presse et d'expression, ainsi que de l'amélioration globale du niveau de vie des citoyens. Aussi, le lien qui existe entre le libre-marché et la démocratie est également très solide même s'il est difficile de le reconnaître pour beaucoup de monde. Bref, il faut admettre que la démocratie - à défaut de les anéantir - fut un excellent moyen de réduire les inégalités, surtout quand on compare avec la pauvreté généralisée dans laquelle vivait presque toute la population il n'y a pas si longtemps, et avec les pays où le communisme - dont le but premier était justement l'éradication des inégalités - a sévi. Mais si elle fut le moyen par lequel de nombreuses libertés furent acquises, le futur vivre-ensemble doit-il nécessairement passer par la démocratie? En d'autres mots, la démocratie est-elle une fin en soi? 

Depuis le début de ce blogue, j'ai souvent fait référence au dualisme, un phénomène inhérent au monde physique et à la condition humaine. Le politique n'y échappe évidemment pas. Et dépendamment où on se situe sur son spectre, on sera porté à favoriser un côté plutôt que l'autre, la fameuse division gauche-droite. Cela fut sans contredit un excellent moyen de s'affranchir du pouvoir absolu et hautement inégalitaire de la noblesse et de la monarchie, mais en cette ère numérique et hautement volatile - technologiquement et émotionnellement parlant - il serait peut-être temps de repenser la démocratie... Les Russes en tout cas ne s'en sont pas privé, comme ont pu le constater les États-Unis lors de la dernière élection présidentielle. Utiliser Facebook afin d'exacerber les divisions très marquées qui minent le climat politique américain, fallait quand même y penser..! Même chose avec Twitter, où les Russes ont utilisé la tuerie de Parkland pour jeter de l'huile sur le feu, une heure à peine après que la tragédie eut lieu.

 La démocratie a beau être le moins pire des systèmes, la démagogie qu'elle induit, la vision à court terme qu'elle propose, la corruption qu'elle encourage (même si elle la diminue beaucoup quand on compare avec les autres systèmes), le cloisonnement idéologique qui en découle, tout cela devrait nous convaincre de ne pas en rester là et d'au moins essayer d'atténuer ses effets pernicieux. Pour ma part, je serais même prêt à céder mon droit de vote pour qu'on instaure un Conseil des Sages, non-élu, afin d'élever le gouvernement au-dessus de la partisanerie et le préserver du concours de popularité auquel il doit se soumettre, d'autant plus que la surenchère médiatique et les risques de manipulation que les réseaux sociaux ont multipliés ces dernières années comporte leurs lots d' inconnues comme en témoigne la dernière élection présidentielle américaine. Et comme de toute façon la popularité n'a rien à voir avec la compétence...On freake un peu autour de moi quand je suggère cela mais ça réglerait il me semble bien des problèmes. Nommé par une Assemblée du Peuple, mais de laquelle il serait tout de même indépendant, un gouvernement de cette nature serait en grande partie à l'abri des conséquences indésirables évoquées + haut et ferait évoluer le processus démocratique actuel vers une plus grande maturité.

Pour ce qui est de son fonctionnement, le judiciaire continuerait grosso-modo comme il le fait. L'exécutif serait partagé entre l'Assemblée et le Conseil mais le législatif serait principalement l'apanage du Conseil qui serait appelé à adopter les lois à même les recommandations que lui soumettrait l'Assemblée du Peuple, qui elle continuerait d'être élue. Le Conseil aurait le devoir de toujours justifier sa prise de décision, mais ne serait pas tenu de retenir les suggestions de la majorité si le Conseil jugeait que le bien commun n'en bénéficierait pas.* Ça peut sembler un peu soviétique comme approche mais afin d'éviter une dérive totalitaire, le mode de sélection des Sages assurerait la représentation de la pluralité de la société comme nous le verrons plus loin. Oui, il y aurait un prix à payer, la dilution du droit de vote, de sa portée, mais en contrepartie cela nous préserverait du dualisme politique et de plusieurs problèmes qui en découlent... Les membres du Conseil des Sages auraient eux-mêmes à dégager un consensus majoritaire de l'ordre d'environ 60%, disons dans une proportion de 7 contre 4 si les Sages étaient au nombre de 11. Comme le sont présentement les juges de la cour suprême, les Sages seraient nommés par l'Assemblée et devraient eux aussi recevoir un assentiment avoisinant les 60%, peut-être un peu +, des membres élus de cette même Assemblée. Quant aux membres de l'Assemblée, on les élirait à la proportionnelle histoire de mieux refléter les aspirations de la population. Pour être retenu comme candidat, la feuille de route d'un Sage devrait démontrer un réel engagement pour la chose publique, ainsi que des qualités d'administrateur (à peaufiner, je jette les grosses lignes...). Une révision à chaque 8 ans du Conseil serait automatique, autant pour ses membres que pour son fonctionnement, et pourrait être révoqué advenant une impasse ou une paralysie... Genre. Évidemment, une nouvelle constitution veillerait à ce que des mécanismes de surveillance et de bon fonctionnement fassent en sorte que cette nouvelle expérience politique puissent être tentée dans le meilleur intérêt de tous. 

Pas pire non? Reste plus maintenant qu'à convaincre les partis actuels de ne plus vouloir exercer le pouvoir et le tour est joué..! C'est un peu comme si on demandait à notre égo de laisser sa place. Même s'il y a d'énormes avantages à travailler en ce sens - rien de moins que la cessation de la souffrance, parait-il, en ce qui concerne la mise au rancart de l'égo - le principal intéressé y voit difficilement son intérêt...

 

*Ce qui n'implique nullement de se débarrasser des philosophies et principes économiques qui ont mené à l'instauration de la démocratie, au contraire... Mais d'installer des politiques de développement durable irait évidemment dans le sens de l'intérêt public. Bref, il s'agirait de trouver l'équilibre entre la gauche et la droite et non pas alterner périodiquement entre les deux pôles et aboutir à une situation contre-productive où le gouvernement nouvellement élu annule les politiques de son prédécesseur qui avait lui-même fait la même chose auparavant et ainsi de suite... 

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